Le 18 octobre 2004
En l’espace de quelques années, Frédéric Boilet est devenu une figure incontournable de la bande dessinée mondiale. Son oeuvre, à la croisée des chemins, unit deux traditions, l’européenne et la japonaise, dans des histoires où érotisme et sentiments se prêtent main-forte.
À la croisée des chemins entre traditions européenne et japonaise, une œuvre où érotisme et sentiments se prêtent main-forte.
Né en 1960 à Epinal, formé à l’école des Beaux-Arts de Nancy de 1978 à 1983, Frédéric Boilet publie tout d’abord quelques albums sans réelle importance avant de dessiner son premier titre en tant qu’auteur complet en 1987, Le rayon vert (éditions Magic-Strip). Il y peaufine son style, un encrage dur au service d’un graphisme très photographique.
Mais c’est en 1990 qu’il trouve enfin sa propre veine scénaristique et son thème de prédilection avec le surprenant 3615 Alexia (réédité depuis chez Ego comme X), une fable amère et violente sur les rapports entre hommes et femmes.
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La même année, grâce à un premier voyage au Japon parrainé par le Centre national des lettres et les entreprises Shoei, sa carrière prend un nouveau tournant. Désormais le pays du soleil levant ne le lâchera plus. Ses œuvres suivantes, en collaboration avec Benoît Peeters, traiteront non seulement de questions sentimentales, mais donneront aussi une approche presque documentaire du Japon contemporain. Love Hotel, tout d’abord, sera nominé à Angoulême dans la catégorie meilleur album. Suivra Tokyo est mon jardin pour lequel il s’adjoindra la collaboration graphique de Jirô Taniguchi.
1995, de retour à Paris, Boilet s’installe à l’atelier des Vosges avec ses acolytes David B., Christophe Blain, Émile Bravo, Emmanuel Guibert, Joann Sfar et Tronchet. C’est là qu’il dessinera Demi-tour, une romance sur le thème du hasard en collaboration avec Benoît Peeters et Emmanuel Guibert (aux couleurs), publié en 1997 dans la collection Aire Libre (Dupuis).
En mai 1997, il s’installe définitivement à Tokyo. Il y collabore avec différents journaux et revues (manga, illustration) et y adapte Tokyo est mon jardin et Demi-tour pour le marché japonais.
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Peu à peu, Fréderic Boilet devient un véritable chaînon manquant entre deux traditions de la bande dessinée. Ses œuvres suivantes, L’épinard de Yukiko et Mariko parade (en collaboration avec Kan Takahama [1]) seront éditées presque simultanément en France et au Japon sous le label "Nouvelle manga", du nom d’un mouvement (initié par lui-même et quelques autres auteurs) dont le but affiché est d’instaurer une nouvelle BD d’auteur internationale qui unirait les caractéristiques de la nouvelle BD française et celles de "la" manga d’auteur (par opposition au manga - au masculin - désignant la BD commerciale japonaise). C’est animé par ces préoccupations et soucieux de donner une meilleure image de la diversité de la BD européenne qu’il adaptera en japonais des œuvres d’auteurs français (Sfar, Marc Antoine-Mathieu, Schuiten et Peeters) et s’occupera également, juste retour des choses, de la traduction et de l’adaptation d’œuvres japonaises pour le marché français (Quartier lointain de Taniguchi, L’homme sans talent de Yoshiharu Tsuge).
©Kan Takahama (photo et retouches), 2003
D’album en album, l’œuvre de Frédéric Boilet a imposé avec force sa singularité. Singularité d’un auteur coincé entre deux pays, deux cultures et deux traditions éditoriales, singularité d’une œuvre inséparable de la vie elle-même, de par sa dimension documentaire et sa propension à évoquer le quotidien. L’unité de son œuvre tient surtout dans le fait que chaque album suscite le suivant et rappelle le précédent tout en se proposant comme une ultime variation sur le thème du sentiment amoureux et du désir. Sans aucun sentimentalisme ni apitoiement, Frédéric Boilet a su redonner à la bande dessinée une vraie dimension romantique teintée d’une touchante dimension érotique. Avec des albums aussi réussis que Tokyo est mon jardin et L’épinard de Yukiko, Frédéric Boilet a prouvé que c’est dans la singularité même qu’un artiste peut prétendre à l’universalité.
Nous ne mentionnerons ici que les ouvrages publiés sur le marché français. Les titres dont nous vous recommandons particulièrement la lecture sont indiqués en gras. Ceux qui ont été chroniqués sur aVoir-aLire.com apparaissent en bleu ciel. Il suffit de cliquer !
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[1] Nous en profitons pour remercier Frédéric Boilet de nous avoir fourni la photo d’illustration de cet article (reprise en plus grand) dans l’article, ainsi que Kan Takahama pour nous avoir autorisés à utiliser cette image, qu’elle a elle-même prise et retravaillée. Pour en savoir plus sur la dessinatrice, nous vous invitons à visiter son site.
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