Récolte fructueuse
Le 9 janvier 2006
Un sacré panel d’auteurs en herbe, bourrés de talent et d’humour, qui assureront la relève, c’est certain.
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Sortie en poche de l’anthologie des meilleures nouvelles policières américaines, établie et préfacée en 2002 par Lawrence Block [1]. Un sacré panel d’auteurs en herbe, bourrés de talent et d’humour, qui assureront la relève, c’est certain.
Le "Grand Maître" de la littérature policière américaine et les éditions Rivages [2] ne s’y sont pas trompés. Choisi pour départager les vingt meilleures nouvelles policières de l’année 2000 parmi les cinquante sélectionnées au préalable par Otto Penzler et Michele Slung pour les éditions Rivages, le grand observateur de la faune new-yorkaise, social et humain, faisait honneur en 2002 à son non moins émérite prédécesseur, Donald Westlake, et nous offrait un sacré cru d’auteurs à se mettre sous la dent. Une gageure d’autant plus audacieuse qu’elle proposait une kyrielle de styles et d’atmosphères très variés, servis en majorité par des nouvellistes encore inconnus du grand public et qui se frottaient pour la première fois au sacro-saint des genres outre-Atlantique.
Face à l’essor des ventes des petits formats made in "poche" et à l’engouement des lecteurs français pour les histoires policières, les maisons d’édition spécialistes du genre finissent toutes forcément par accoucher d’une seconde fratrie. Une floraison d’explorations du noir qui, bien que très éloignées pour la plupart du polar américain, se dévorent des yeux, pour un coût modique. Les éditions Rivages auraient eu tort de se priver. Avec le lancement de Moisson Noire, édition de poche, version rajeunie 2005, l’opération commerciale est certes rondement menée, mais pas seulement.
En effet, si les talentueux T. Jefferson Parker et Bill Pronzini n’en sont pas à leur premier coup d’essai, force est de constater que les non moins connus et brillants Russell Banks [3] et Joyce Carol Oates [4] réussissent haut la main l’examen d’entrée. Alliant respectivement au tragique la fraicheur des situations saugrenues chères à John Irving ou une poésie renversante à un traitement de l’horreur digne des plus grands thrillers.
La récolte n’en est pas moins fructueuse du côté des nouvellistes qui, s’ils ne rivalisent tous d’imagination et de style, se lisent tous d’un trait, avec plaisir, et assurent de beaux lendemains à un genre en perpétuelle mutation. Si avec Le cœur battant [5] et Le tapissier [6], Jennifer Anderson et William Gray nous offrent chacun un récit poétique qui explore magistralement les frontières du réel et du mysticisme, Leslie Edgerton et Clark Howard, jouent tous deux la carte de la débauche et du franc-parler, et ancrent leurs visions du crime dans la lignée des meilleurs polars américains. David Means, quant à lui, nous fait manger la poussière, et la misère humaine d’une Foire [7] digne, tant sur le fond que sur la forme, des Raisins de la colère, le chef-d’œuvre de Steinbeck.
Moisson noire, Rivages, coll. "Noir", 2005, 544 pages, 9,50 €
[1] Lire nos critiques de la Moisson noire 2003 présentée par James Ellroy, et de la Moisson noire 2004 présentée par Michael Connelly
[2] Créateur, entre autres, du célèbre agent privé, alcoolique, sans foi ni loi, Matthew Scuder - Matt pour les intimes -, Lawrence Block fut sacré "Grand Maître" du genre en 1994. Une reconnaissance tardive, ô combien méritée depuis la parution de Eight millions ways to die (1982), Huit millions de morts en sursis (Gallimard, 2000), cinquième opus des aventures de Matt, adapté au cinéma par Hal Ashby, en 1986, sous le titre original
[3] Russell Banks, La soirée Homard. Titre original : Lobster Night, paru dans Esquire, 2000 ; L’Ange sur le toit, Actes Sud, 2001. Pierre Furlan pour la traduction française
[4] Joyce Carol Oates, Portrait de jeune fille avec œil au beurre noir. Titre original : The girl with the blackened eye, paru dans The Ontario Review, Inc., 2000. Stéphane Carn pour la traduction française
[5] Jennifer Anderson, Le cœur battant. Titre original : Things that makes your heart beat faster, paru dans The Missouri Review, 2000. Frédéric Grellier pour la traduction française
[6] William Gray, Le tapissier. Titre original : The paperhanger, paru dans Harper’s Magazine, 2000. Dominique Mainard pour la traduction française
[7] David Means, Foire. Titre original : Carnie, paru dans Witness, 2000. Virginie Buhl pour la traduction française
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