Détective Keaton
Le 22 avril 2018
Croisement amusant entre l’enquête policière et la comédie existentielle qui fit sa gloire, Meurtre Mystérieux à Manhattan sonne les retrouvailles de Woody Allen avec sa muse Diane Keaton, six ans après Radio Days. Mineur, mais tout à fait délicieux.
- Réalisateur : Woody Allen
- Acteurs : Diane Keaton, Anjelica Huston, Woody Allen, Zach Braff, Alan Alda, Jerry Adler, Lynn Cohen
- Genre : Comédie, Policier / Polar / Film noir / Thriller / Film de gangsters, Comédie policière
- Distributeur : Gaumont Columbia Tristar Films
- Durée : 1h48mn
- Box-office : 1.347.071 France / 630.697 entrées Paris Périphérie
- Titre original : Manhattan Murder Mystery
- Date de sortie : 13 octobre 1993
Résumé : L’éditeur Larry Lipton et son épouse Carol logent dans un luxueux appartement de Manhattan où ils se lient rapidement d’amitié avec leurs voisins de palier, Paul et Lillian House. Un jour, cette dernière décède d’une crise cardiaque. Une mort étrange, la vieille dame n’ayant jamais eu de problème de santé majeur. Petit à petit, l’idée d’un meurtre se précise et Carol Lipton est bien décidée à élucider ce mystère.
Critique : Loin de ses expérimentations formelles (Ombres et brouillard) et de ses drames bergmaniens (Intérieurs), Woody Allen s’offre une petite récréation avec Meurtre Mystérieux à Manhattan, réalisant l’un de ses souhaits : un polar. Néanmoins son long-métrage tient finalement plus de la comédie policière légère que du sombre thriller.
S’inspirant d’un véritable fait divers, le réalisateur, non sans nonchalance, mène une intrigue plaisante et assez anecdotique, partant d’un point de départ éternel : des individus ordinaires plongés dans une histoire qui les dépasse. Ici, c’est Larry et Carol, un couple de quinquagénaires news-yorkais dont la petite vie tourne en rond. L’affaire du meurtre est l’occasion pour l’aventureuse épouse, nourrie aux polars, d’éprouver à nouveau un petit frisson et de s’extirper d’un quotidien monotone. L’intrigue, un minimum relâchée (comme souvent chez Woody Allen), avance grâce à d’heureuses coïncidences et offre quelques surprises et rebondissements retors : le mobile du meurtre présumé s’avère plus compliqué que prévu, et les cadavres en cachent souvent d’autres.
Évidemment, le crime passe souvent au second plan au profit des personnages de Larry et Carol, de leur histoire conjugale, entre chamailleries et doutes. Woody Allen reprend son rôle semi autobiographique d’intellectuel hypocondriaque, et reforme le couple de Manhattan et de Annie Hall avec la rayonnante Diane Keaton. Leurs retrouvailles sont particulièrement savoureuses, faisant écho à la propre vie du cinéaste (il a vécu avec l’actrice pendant dix ans).
Un brin bavard, plongé dans l’ambiance bobo new-yorkaise, Meurtre mystérieux à Manhattan s’organise autour de conversations avec des personnages satellites (Alan Alda et Anjelica Huston, comédiens fétiches du cinéaste). Les dialogues, à l’humour satirique toujours aussi acéré, sont un régal (« À chaque fois que j’écoute du Wagner, j’ai envie d’envahir la Pologne ! »). En l’état, le film apparaît comme un mélange divertissant entre les comédies existentielles alleniennes et le whodunit à la Agatha Christie. Comme si Annie Hall rencontrait L’assassin habite au 21 ! Ce croisement est le moteur de scènes hilarantes, comme celle où Larry et Carol inventent un subterfuge pour faire chanter le meurtrier par un faux appel téléphonique. Woody Allen semble tester son personnage d’angoissé chronique en le confrontant à des situations extrêmes (un enfermement dans une cave, un face-à-face à main armée) qui le mettent dans tous ses états et en deviennent drolatiques. Il n’oublie pas non plus de clamer son amour du septième art, lors d’un final brillant sous forme de jeu de miroirs (hommage à La Dame de Shanghaï d’Orson Welles) : coincés dans un vieux cinéma de quartier, Larry et Carol se retrouvent derrière un écran géant diffusant un film noir, comme s’ils étaient eux-mêmes de l’autre côté de la toile, dans une situation de danger qu’ils ont vue mille fois au cinéma, mais jamais vécue jusqu’alors. C’est sur ce clin d’œil que Woody Allen clôt Meurtre Mystérieux à Manhattan, œuvre certes mineure par rapport au récent Match Point->6938], mais irrésistiblement délicieuse.
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Norman06 16 juillet 2009
Meurtre mystérieux à Manhattan - la critique
Excellente critique qui rappelle qu’un Allen mineur reste une modèle de fraicheur et de subtilité. Cette enquête policière avait permis également au cinéaste acteur de retrouver sa première partenaire de prédilection, l’exquise Diane Keaton.