Transat en solitaire
Le 14 juin 2006
Au rythme des tambours vaudous, Louis-Philippe Dalembert cherche encore des traces de l’enfance et nous entraîne, à chaque roman, d’un bord de l’océan à l’autre.
- Auteur : Louis-Philippe Dalembert
- Editeur : Les Editions du Rocher
- Genre : Roman & fiction
- Nationalité : Française
Depuis longtemps, Louis-Philippe Dalembert nous a habitués à ces ponts qu’il jette entre son Amérique natale et les vieux continents, ceux des racines ou des lendemains. L’autre face de la mer flirtait entre deux traversées, celle funeste, des bateaux négriers, et l’autre, non moins sombre, qui fait fuir sa terre pour une vie meilleure. Rue du Faubourg Saint-Denis évoquait ces côtoiements, ces mondes que le hasard a réunis tant bien que mal, et qui s’enracinent, entre souvenir et nostalgie.
Les dieux voyagent la nuit nous ramène encore au-delà de l’océan, dans une New York qui fait figure d’escale sur le chemin de l’enfance. De ce va et vient par dessus la mer va en naître un autre, entre la vie d’homme et ces premières années où l’on finit toujours par chercher ce que l’on est. L’auteur alterne ces images des années haïtiennes, et, comme une litanie, au rythme syncopé de la transe vodou, la contemplation du corps défendu de la femme qui repose près de lui. Au cœur de l’interdit, il y a le vodou, justement, le culte redoutable et maudit, qui fraie avec le Diable et exige d’enterrer de la nourriture ! Il y a l’attrait irrépressible pour le mystère qu’on nous refuse, et, ancrée au-delà des ans, la fascination aussi intacte que l’impossibilité d’y céder.
Louis-Philippe Dalembert construit son livre comme une cérémonie, un rituel qui le conduit sans cesse à cette enfance perdue, au début de l’errance. La langue s’échappe, sans excès de violence mais avec une liberté qui fendille volontiers une écriture jusqu’alors presque sage, et les notes de bas de page, sorte d’appendice à l’usage des non-initiés, sont des clins d’œil désopilants qui feraient passer le panthéon vodou pour une joyeuse bande de pieds-nickelés, paresseux, capricieux, goinfres et érotomanes !
Dalembert, lui, comme ses dieux vagabonds qui ramènent leurs morts à la Guinée des origines, cherche sans cesse ce qui le relie à ses terres, celle du début ou celles qui l’ont vu passer, celle de l’enfance ou celles que l’on se choisit, sans toujours savoir pourquoi.
Louis-Philippe Dalembert, Les dieux voyagent la nuit, éd. du Rocher, 2006, 220 pages, 16,90 €
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maeva 20 juin 2006
Les dieux voyagent la nuit - Louis-Philippe Dalembert
enfin un roman qui bouleverse les idées reçues et le langage minimal du roman actuel ! De l’humour certes mais aussi une autre façon de connaître ce qu’a pu être une enfance en Haïti dans les années 70. Un gosse attachant, vu à travers les yeux de celui qui a l’intelligence que lui confère une double culture. Un roman qui se lit avec un égal bonheur de la première à la dernière ligne. Bravo !