Le 21 mars 2007
Entre l’appétit belliqueux des studios hollywoodiens et les désirs de reconnaissance du cinéma mondial se dessine un nouveau rêve américain, incarnés de manière antagoniste par 300 et Golden door.
Entre l’appétit belliqueux des studios hollywoodiens et les désirs de reconnaissance du cinéma mondial se dessine un nouveau rêve américain, incarnés de manière antagoniste par 300 et Golden door.
La mondialisation des ambitions. N’ayons plus de complexe, le cinéma international brille de tous ses songes et brûle de ses désirs. Bref, il s’exporte. Qu’il soit asiatique, sud-américain, européen et évidemment américain, il ne se contente plus de ses embarrassantes frontières. Visant dès leurs conceptions les marchés étrangers (leurs budgets gargantuesques ne peuvent plus se rentabiliser sur leur seul territoire), les convoyeurs de culture sur pelloche traversent les océans pour s’exposer aux autres et multiplier les profits.
Bien sûr, rien de bien nouveau pour Hollywood dont l’avidité à déployer ses armées de blockbusters tout autour du globe a toujours été de notoriété publique. Le septième art américain étant une marque de fabrique commerciale d’une logique industrielle imparable, il a été combattu de ce fait de toutes parts par les cinématographies étrangères en manque de moyens pour subsister face à un envahisseur gênant. Mais aujourd’hui la donne semble changer.
L’anti-américanisme aidé par l’impopularité de Bush et les dérapages belliqueux de la politique étrangère de son administration, mais aussi les formules éventées des studios qui ne maquillent même plus leurs intentions hégémoniques, ont ainsi quelque peu détourné les spectateurs du rêve américain. Si bien qu’aujourd’hui, chaque nation commence à se tourner vers sa propre cinématographie se rappelant qu’on n’est jamais aussi bien servi et surtout compris que par soi-même. Une quête identitaire inévitable et nécessaire, qui, même si dans le monde, le cinéma hollywoodien n’a jamais été aussi puissant, fait apparaître les failles du colosse yankee, déjà bien exposé aux menaces du piratage abusif.
L’épopée épique 300, réalisée pour un budget moyen de 60M$, semble destinée à rétablir le bon ordre sur les marchés internationaux récalcitrants. Une vraie machine de guerre faite pour dégommer ses adversaires avec une promo savamment lancée il y a près d’un an. Mais comment réagiront les spectateurs internationaux face à son sous-texte belliqueux, limite républicain, où le mépris de l’adversaire, forcément barbare et pervers, s’exprime au nom de la liberté (quelle démagogie !) en bâtissant des murs de cadavres ? Une certaine vision du rêve hollywoodien, très conservatrice, qui trouvera son public, sans finesse, mais au risque de lasser un peu plus les populations mondiales des dents trop longues d’une Amérique sur l’offensive.
Heureusement l’alternative à ce rêve américain se dessine et se dévoile cette semaine avec la nouvelle toile poético-sociale d’Emanuele Crialese. L’auteur du formidable Respiro, relate dans Golden door la traversée d’immigrants italiens vers une Amérique fantasmatique à l’entrée de laquelle Ellis Island veille à trier les nouveaux venus pour se défausser des pions dégénérés. Un bel exemple de co-production européenne (il s’agit d’une œuvre franco-italienne), avec une Charlotte Gainsbourg jouant la carte de la célébrité mondiale, qui ose confesser son désir manifeste de conquérir tous les marchés y compris celui des USA. Jodie Foster apposera d’ailleurs son nom au titre pour la sortie américaine. Dès lors des espérances à La cité interdite (une œuvre chinoise nommée aux Oscars, numéro un du box-office en France cette semaine) ou à la Vie des autres sont possibles. Ce dernier, magnifique représentant allemand à l’assaut des sommets mondiaux depuis des semaines, sans montrer le moindre signe d’usure, prouve que le cinéma le plus ringard qui soit peut s’avérer un féroce compétiteur. Dans un mouvement insolite de conquête de l’ouest digne des années 50 et 60, décennies fastes pour l’audace cinématographique européenne, le rééquilibrage par la curiosité et la qualité s’avère des plus réjouissants.
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