Le 24 avril 2025
Drôle, et d’une tendresse inouïe, L’amour c’est surcoté offre sur les écrans une vision de la banlieue qui se moque de ses propres stéréotypes et témoigne de la difficulté et de la beauté pour chacun d’entre nous, des choses de l’amour.


- Réalisateur : Mourad Winter
- Acteurs : Clotilde Courau, François Damiens, Abbes Zahmani, Steve Tientcheu, Alassane Diong, Laura Felpin, Benjamin Tranié, Hakim Jemili, Abdulah Sissoko
- Genre : Comédie romantique
- Nationalité : Français
- Distributeur : Studio Canal
- Durée : 1h38mn
- Date de sortie : 23 avril 2025
- Festival : Festival Alpe d’Huez 2025

L'a vu
Veut le voir
Résumé : Diagnostiqué “nul avec les meufs” depuis son plus jeune âge, Anis mène une existence charnelle placée sous le signe du calme plat. Trois ans jour pour jour après la perte d’Isma, son meilleur ami et mentor, il prend son courage à deux mains et se décide enfin à sortir faire de nouvelles rencontres. Sauf qu’en abordant Madeleine, Anis ignore que débute une grande aventure. Un truc inattendu. Un truc qui s’appelle “l’amour”.
Critique : Il est des films rares où non seulement on rit d’un bout à l’autre, mais surtout où l’humour ne se confond jamais avec la médisance ou le mépris. L’amour c’est surcoté met en scène un bon gars, Anis, issu de l’autre côté du périphérique parisien, qui trimbale sa mélancolie et sa solitude avec ses trois amis d’enfance. Le pauvre est raillé par ses amis pour son célibat chronique, sujet de moqueries délicates jusqu’au moment où la vie le met en face d’une jeune femme de vingt-trois ans, Madeleine, dont il tombe malgré lui amoureux.
Le récit est habilement construit entre un entretien d’Anis avec ce qui semble être une psychologue, et l’illustration de son récit de vie dans des séquence rythmées et d’un humour permanent. Le protagoniste apparaît comme un être débonnaire, timide, gauche, qui invente en permanence son existence pour la rendre plus attrayante aux yeux de sa nouvelle compagne et de toutes les celles qu’il s’imagine. Il s’enfonce ainsi dans une suite de mensonges, tous les plus hirsutes les uns que les autres, dont on pense qu’il n’en sortira jamais. Dit autrement, le spectateur assiste à une construction amoureuse basée sur une série d’impostures qui ne doivent qu’inévitablement conduire à l’échec. Mais Madeleine porte aussi sa propre tristesse larvée, malgré des dehors joyeux et une certaine assurance.
- Copyright 2024 - Iconoclast
L’amour c’est surcoté puise sa réussite dans la galerie des personnages qu’il met en scène. On peut craindre la caricature dans ces descriptions de banlieusards à la langue très imaginative, mais la tendresse et l’humour l’emportent immédiatement. Mourad Winter est un humoriste qui maîtrise l’art du rire et du dialogue. Son premier film, inspiré de son roman à succès du même titre, ne succombe jamais à la moquerie gratuite. Le cinéaste joue sur la théâtralité en se faisant succéder des farces, toutes aussi drôles que burlesques, qui rappellent la tradition des pièces d’Alfred Jarry à travers son célèbre héros, Ubu. Le scénario restitue les vieux débats de lutte des classes dans des modèles de familles qui témoignent de la polarité de la société contemporaine. On rencontre notamment une famille richissime suisse que la fortune ne rend pas forcément plus subtile qui contraste évidemment avec les jeunes d’Ivry-sur-Seine qui galèrent entre chômage et discriminations.
L’amour c’est surcoté est une comédie romantique qui refuse de se prendre au sérieux. Chacun y trouvera un point d’accroche, même si le propos est très inspiré de la culture hip-hop. Le cinéaste n’en rajoute pas non plus, et rend son récit très accessible au plus grand nombre. Il y a d’ailleurs quelque chose de rassurant dans cette fiction joyeuse qui démontre que l’amour, la timidité, le manque de confiance en soi transcendent les classes sociales. Chacun des personnages évolue dans ses maladresses, ses gaucheries, et laisse peu à peu surgir la véritable beauté de son cœur.
- Copyright 2024 - Iconoclast
On ne peut que comprendre le couronnement de cette œuvre au festival de l’Alpe d’Huez. La réussite est indéniable, grâce notamment au duo totalement incongru formé par Laura Felpin et Hakim Jemili. Le hasard fait que les deux acteurs ont grandi dans la même région de l’est de la France. Ils composent un couple atypique, roublard, qui leur permet de mettre à profit leur vrai talent d’humoristes et de chroniqueurs. En bref, tout spectateur désireux de fuir l’ennui se doit de voir cette drôle de farce moderne qui donne le sourire pour plusieurs heures.