Les Yeux sans visage d’Almodovar
Le 20 janvier 2024
Vingt-et-un ans après Attache-moi !, Pedro Almodóvar retrouve Antonio Banderas pour une adaptation policière qui exprime la quintessence de son art.
- Réalisateur : Pedro Almodóvar
- Acteurs : Antonio Banderas, Marisa Paredes, Eduard Fernández, Elena Anaya, Jan Cornet, Blanca Suárez, Bárbara Lennie, Roberto Álamo, José Luis Gómez
- Genre : Drame, Policier / Polar / Film noir / Thriller / Film de gangsters, Thriller
- Nationalité : Espagnol
- Distributeur : Pathé Distribution
- Durée : 1h57mn
- Reprise: 19 juin 2019
- Âge : Avertissement : des scènes, des propos ou des images peuvent heurter la sensibilité des spectateurs
- Date de sortie : 17 août 2011
- Festival : Festival de Cannes 2011
Résumé : Depuis que sa femme a été victime de brûlures dans un accident de voiture, le docteur Robert Ledgard, éminent chirurgien esthétique, se consacre à la création d’une nouvelle peau grâce à laquelle il aurait pu la sauver. Douze ans après le drame, il réussit à cultiver une peau qui est une véritable cuirasse contre toute agression. Outre les années de recherche et d’expérimentation, il faut aussi à Robert un cobaye, un complice et une absence totale de scrupules. Les scrupules ne l’ont jamais étouffé. Marilia, la femme qui s’est occupée de Robert depuis le jour où il est né, est la plus fidèle des complices. Quant au cobaye...
Critique : Dès le générique et les premiers plans, Pedro Almodóvar impose son style et l’on se doute que ce film n’est pas une pure rupture dans son œuvre, La peau que j’habite ne pouvant être perçu comme une simple incursion dans un « cinéma de genre ». Les trames policières ont de toute façon été le matériau récurrent de sa filmographie : d’Attache-moi ! à Étreintes brisées, en passant par En chair et en os, le réalisateur a utilisé avec brio séquestrations, meurtres et autres actes criminels pour structurer ses récits et cerner les motivations de ses personnages.
- Copyright Pathé Distribution
La peau que j’habite permet de retrouver une structure en flash-back et mise en abyme, la construction sous forme de puzzle aboutissant progressivement à un éclairage des premières séquences : l’art du montage est ainsi primordial, et ce qui pouvait apparaître un brin artificiel dans La mauvaise éducation est ici éblouissant. En fait, Pedro Almodóvar tend vers l’épure, et la sophistication de certains de ses précédents films (Tout sur ma mère) fait place ici à un modèle de concision et de concentration dramatique. Bien entendu, les thèmes chers au cinéaste sont toujours présents : les rapports entre Marilia et son fils font écho aux conflits de filiation de Talons aiguilles ou La fleur de mon secret ; les obscurs secrets de famille n’ont rien à envier à ceux de Volver ; quant aux troubles de l’identité sexuelle et de ses métamorphoses, ils sont dans le prolongement des désormais classiques La loi du désir ou Tout sur ma mère.
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En même temps, Pedro Almodóvar s’autorise des références externes explicites ou implicites : l’acharnement de Robert Ledgard à modeler un visage s’apparente tant à la folie du chirurgien incarné par Pierre Brasseur dans Les yeux sans visage qu’à la névrose obsessionnelle du détective campé par James Stewart dans Vertigo. Voilà donc une pièce majeure de l’œuvre d’Almodóvar , qui dirige avec bonheur deux de ses comédiens fétiches : Antonio Banderas, vingt-et-un ans après Attache-moi !, n’a rien perdu de sa prestance et de son charisme ; dans le rôle secondaire de la fidèle gouvernante, Marisa Paredes confirme le talent dramatique dont on se souvenait depuis Talons aiguilles et La fleur de mon secret.
– Goya Awards 2012 : Meilleur actrice pour Elena Anaya - Meilleur espoir masculin pour Jan Cornet - Meilleure musique - Meilleurs maquillages et coiffures
– BAFTA Awards 2012 : Meilleur film étranger
– Academy of Science Fiction, Fantasy & Horror Films, USA 2012 : Meilleur film international
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Frédéric de Vençay 21 août 2011
La piel que habito - Pedro Almodóvar - critique
Exercice de style très maîtrisé, "La piel que habito" démarre lentement, de manière presque laborieuse... Mais c’est une fausse piste : le récit à tiroirs, machiavélique, délivre toutes ses clés en milieu du film et se révèle aussi malaisant que captivant, tétanisant que passionnant. Bourré de références littéraires, picturales et cinématographiques, travaillant son motif principal (la "seconde peau" et l’identité sexuelle) avec une extrême sophistication, voilà un grand film trans-genres à la puissance vénéneuse. Un peu trop désincarné, cependant, pour égaler la réussite des derniers grands Almodovar ("Etreintes brisées", "Volver").
roger w 1er septembre 2011
La piel que habito - Pedro Almodóvar - critique
Le nouvel Almodovar propose une plongée dans un monde bien plus noir qu’à l’accoutumée. Si le cinéaste n’arrive toujours pas à éviter certains débordements humoristiques, on peut saluer sa volonté de traiter son sujet de manière assez sérieuse. Il réussit ainsi une oeuvre gigogne stimulante et finalement assez étonnante.
Jujulcactus 21 septembre 2011
La piel que habito - Pedro Almodóvar - critique
Difficile de critiquer un film comme « La piel que habito » tant il est préférable d’en savoir le moins possible avant d’aller le voir. Si le nouveau né de Pedro Almodovar m’a globalement séduit, je reste assez mitigé sur le traitement de son intrigue (très) invraisemblable. En fait assez schématique, le film se découpe pour moi en trois parties (une de présentation, une d’explications et une de dénouement), mais malheureusement l’une d’entre elle ne tient pas la route. L’entrée en matière est pourtant prometteuse tant elle est déroutante et froide, le réalisateur nous laisse peu de clefs et cultive un mystère passionnant. Nous menant sur des pistes incertaines, il choisit à un moment donné de mettre ses personnages en dormance pour passer aux explications.. Aïe : le faux pas... Voulant à tout prix tout expliquer, Pedro Almodovar se montre trop démonstratif et surtout maladroit, en multipliant les flash-back. Heureusement il retombe sur ses pattes, son twist n’est pas final et il en fait justement un point fort, et ouvre un dernier chapitre assez dérangeant. Singulier, ce thriller à la sauce espagnole possède une ambiance toute particulière en grande partie grâce à sa mise en scène soignée et à son casting qui tente constamment de nous déconcerter. En fait c’est un peu comme si Almodovar nous avait concocter un puzzle, il excelle à nous présenter les pièces en vrac, on est intrigué, ensuite il nous explique lourdement comment il l’assemble, on commence à décrocher, mais une fois terminé, il nous montre tout satisfait son travail, et c’est du bon travail !