Fête des morts
Le 30 décembre 2010
Schroeter confronte deux touristes exaltées, une allemande et une américaine, à la réalité du Mexique. Un objet à l’étrange beauté qui s’inscrit parfaitement dans la riche filmographie du cinéaste.
- Réalisateur : Werner Schroeter
- Acteurs : Magdalena Montezuma, Ellen Umlauf
- Genre : Comédie dramatique, Documentaire, Expérimental
- Nationalité : Allemand
- Durée : 1h11mn
- Titre original : Der schwarze Engel
- Plus d'informations : http://www.centrepompidou.fr
- Festival : Rétrospective Schroeter à Beaubourg
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– Diffusé à la télévision allemande Le 7 mai 1974
Schroeter confronte deux touristes exaltées, une allemande et une américaine, à la réalité du Mexique. Un objet à l’étrange beauté qui s’inscrit parfaitement dans la riche filmographie du cinéaste.
L’argument : Une Allemande et une secrétaire d’ambassade américaine s’éprennent des Dieux mexicains.
Notre avis : Tourné au Mexique en novembre 1973, entre les mises en scènes théâtrales, à Bochum, de Salomé d’Oscar Wilde et de Lucrèce Borgia de Victor Hugo (dans la traduction de Georg Büchner), Der schwarze Engel s’amuse à déjouer les attentes du spectateur.
Son titre évocateur de Lucifer, l’ange noir de la mélancolie regrettant à jamais le paradis perdu, les citations de Hölderlin, Nietzche ou Hans Henny Jahn, le concerto pour violon de Max Bruch ou l’air Ombra mai fu du Serse de Händel placent ce film déroutant sous le signe d’une célébration romantique de la mort, ce qui ne surprendra pas de la part d’un cinéaste dont l’auteur préféré était le Lautréamont des Chants de Maldoror*.
On sait que la mort occupe une place tout à fait centrale dans la culture mexicaine et que la Toussaint est l’occasion d’une fête de caractère carnavalesque qui la tourne en dérision.
C’est donc tout naturellement au Mexique, sur les marches des temples précolombiens, que sa quête mystique amène l’allemande Magdalena, drapée dans ses voiles noirs. Mais la théâtralité de ses poses tragiques apparaît comme légèrement incongrue dans un environnement tiers mondiste filmé sur le mode du documentaire.
Le personnage de l’américaine (jouée par l’allemande Ellen Umlauf) est, quant-à-elle, une véritable caricature de touriste recherchant dans l’exotisme un sens à son existence et la tonalité burlesque de ses aventures rappelle celle de Der Bomberpilot.
On peut aisément interpréter les trajectoires de ces deux exaltées comme une critique du néo colonialisme mais le film dépasse cette lecture réductrice et c’est avant tout le regard précis et attentif sur la réalité du pays qui frappe à la vision de L’ange noir, regard qu’on retrouvera dans les documentaires des années 80, aux Philippines ( L’étoile qui rit) ou en Argentine. Schroeter est à l’évidence fasciné comme le fut Eisenstein lorsqu’il tourna Que viva Mexico.
Der schwarze Engel est un étrange objet, bancal et captivant, qui passa relativement inaperçu lors de sa sortie française en 1975, décevant sans doute les attentes des admirateurs de La mort de Maria Malibran. La puissance déstabilisante de la beauté y est pourtant à l’oeuvre.
*On a pu voir, le 20 décembre au Goethe Institut de Paris, l’enregistrement video réalisé le 26 décembre 2009 à Berlin par Elfi Mikesch d’une très belle mise en scène théâtrale par Schroeter d’un des Chants de Maldoror. Ce fut l’avant dernière mise en scène de Schroeter, avant Quai Ouest de Koltès à la Volksbühne en mars 2010.
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