Le 9 août 2019
- Acteur : Toni Morrison
L’écrivaine afro-américaine alliait un grand talent stylistique, illustré par des audaces formelles, à un engagement propre au roman social, dans la meilleure des traditions du récit américain, de Twain à Steinbeck, en l’associant à un art faulknérien de la psychologie et de l’émotion.
News : Lauréate du prix Pulitzer en 1988 puis du prix Nobel de littérature en 1993, Toni Morrison laisse une œuvre qui, au delà de son roman le plus connu Beloved, l’histoire tragique d’une ancienne esclave dans une Amérique ségrégationniste, n’a cessé de témoigner de la réalité sociale de son pays, avec une vraie puissance stylistique, de son premier récit L’œil le plus bleu (The Blues Eyes), sorti en 1970, qui raconte le long calvaire d’une enfant noire victime du racisme et d’agressions sexuelles, doublement victime d’une insupportable violence, à cause de sa couleur de peau et de son sexe, jusqu’à Délivrances, publié il y a quatre ans, où l’héroïne se construit une réussite factice, pour échapper à des traumatismes d’enfance, liés à ses origines.
Toni Morrison a prolongé, à travers des essais comme L’origine des autres (2018) sa réflexion sur des thématiques indissociables de tous ses récits : le racisme, la construction de l’Autre, les fondements de l’exclusion qui, au-delà même de la discrimination des Noirs, construisent aussi la notion d’"étranger" pour s’en prendre à lui... Cette réflexion, Toni Morrison l’a menée dans le cadre de ses activités universitaires, ayant enseigné la littérature dans de nombreuses facultés américaines, comme celles de Yale (1976-1977) ou Princeton, où elle restera durant dix-sept années, de 1989 à 2006, avant de partir à la retraite. Célébrée à travers le monde pour l’importance de sa contribution à l’art et son combat pour l’émancipation des Afro-américains, soutien indéfectible de Bill Clinton et Barack Obama, la vieille dame s’était jurée de survivre au mandat de Trump, dont elle estimait, dans une tribune au New Yorker en novembre 2016, qu’il était un candidat "approuvé par le Ku Klux Klan". L’actuel président, contrairement à son prédecesseur, n’a rendu aucun hommage à Toni Morrison, qui s’est éteinte à l’âge de 88 ans.
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