Tour de piste final
Le 8 septembre 2011
Hommage ému et désabusé au monde disparu de l’avanspettacolo, cette comédie étrange et mélancolique, aux accents parfois felliniens, assume crânement son côté dépressif.
- Réalisateur : Dino Risi
- Acteurs : Ornella Muti, Venantino Venantini, Ugo Tognazzi, Caterina Boratto, Mario del Monaco, Riccardo Billi
- Genre : Comédie
- Nationalité : Italien
- Distributeur : AMLF Distribution
- Editeur vidéo : M6 Vidéo
- Durée : 1h55mn
- Reprise: 22 janvier 2020
- Titre original : Primo amore
- Date de sortie : 25 octobre 1978
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Résumé : Comique sur le déclin, Ugo Cremonesi débarque dans une pension pour acteurs à la retraite. Malgré la présence de vieux amis et de l’espièglerie qu’ils y font régner, il quitte bientôt les lieux, emmenant avec lui Renata, une des employées. En compagnie de sa jeune accompagnatrice, il compte sur la pension versée par le gouvernement pour démarrer une nouvelle vie...
Critique : À la différence des deux autres films de Dino Risi dont le titre comporte le mot amour, Un amore a Roma (1960) et fantasma d’amore (1981), et qui sont des mélodrames, cette œuvre de maturité (1978) appartient au genre dans lequel le cinéaste milanais s’est le plus souvent illustré, et avec la verve que l’on sait : la comédie. Mais c’est une comédie à la tonalité foncièrement mélancolique dont le thème n’est autre que la vieillesse et l’attente de la mort et dont le titre original Primo amore est empreint d’une ironie amère que le distributeur français a voulu gommer, annonçant pour ainsi dire franchement la couleur.
En effet c’est un amour bien improbable et fragile qui lie les deux protagonistes du film : le comique de music-hall sur le retour dont, avec un sens aigu de l’autodérision, Ugo Tognazzi fait une espèce de clown pathétique, et la femme de chambre incarnée par une Ornella Muti resplendissante de beauté et de jeunesse.
Le regard du cinéaste sur ce couple impossible n’est pas dénué de cruauté, on s’en doute, et la description de la maison de retraite pour comédiens où se déroule la première heure (la plus réussie) tout comme celle de la nouvelle société italienne déjà berlusconienne avec ses télés privées et sa vulgarité clinquante dans la seconde partie (plus inégale) fait légèrement froid dans le dos.
La férocité attendue du trait, si elle n’est pas absente, loin s’en faut, s’accompagne pourtant d’une véritable tendresse pour ces personnages tous plus ou moins paumés et le grotesque sans retenue est teinté d’une poésie triste qu’on qualifiera volontiers de fellinienne, impression renforcée par la présence de Caterina Boratto, l’icône maternelle inaccessible de Otto e mezzo et Giuglietta degli spiriti, qui, elle-même star du cinéma des années 30-40, émeut en ancienne diva désespérément accrochée à ses souvenirs.
Le décor grandiose, filmé à Montecatini Terme, du grand hôtel 1900 qui abrite la maison de retraite dirigée d’une main de fer par un ancien colonel (le célèbre ténor Mario del Monaco) est magnifié par la photo de l’immense Tonino delli Colli et suscite la nostalgie d’un monde révolu. Mais l’hommage ému que rend Risi à l’avanspettacolo ne cherche nullement à idéaliser cet univers du spectacle populaire d’antan qui n’est plus qu’un souvenir déjà lointain : les rires provoqués par le numéro poussif que Cremonesi-Tognazzi exécute dans l’hospice ne sont imputables qu’à l’infinie bonne volonté d’un public gagné d’avance et son imitation de Totò tombe lamentablement à plat dans l’ambiance glaciale du dîner chez son fils (croquettes rances au menu).
Le rire s’étrangle souvent dans la gorge à la vision de cette comédie dépressive qui refuse néanmoins de céder au mélo et se maintient sur le fil ténu d’une gaîté désabusée.
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Le DVD
Le film de Dino Risi est disponible en DVD à partir du 17 août 2011 dans la collection Maîtres italiens publiée par M6video
Les suppléments
Un remarquable documentaire réalisé par Emmanuel Barnault et intitulé Dino Risi, le pessimiste joyeux de la comédie italienne dresse un portrait du cinéaste à partir de témoignages et de documents d’archives.
Image
Belles couleurs et excellente définition : la remastérisation et le transfert ont fait l’objet d’un soin tout particulier et nous permettent d’apprécier la poésie de la splendide photo de Tonino delli Colli.
Son
Pas trop de souffle mais quelques stridences et des voix parfois légèrement étouffées. L’oreille ne souffrira pas trop cependant et pourra se laisser bercer par les douces mélodies du Maestro Riz Ortolani. Il y a aussi une version française, correcte mais qui dénature le film.
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