Rap’s not dead
Le 5 janvier 2006
Le rap n’est pas mort. Il suffit, pour s’en convaincre, d’écouter Kwal ou Black Baudelaire.
Les banlieues s’enflamment, deux cents députés se ridiculisent à poursuivre des rappeurs pour outrage à la nation, l’heure est aux raccourcis et aux amalgames, certains médias en profitent pour annoncer la mort du rap. Pourtant, à l’écoute de Black Baudelaire ou de Kwal, on se dit que le genre se porte bien et que, si mort il y a, elle se trouve ailleurs...
Pourquoi cette chronique comparée ? Parce que Kwal (alias Vincent Loiseau, ex-Ambassade et ex-Carc[H]arias) et Black Baudelaire (collectif barcelonais produit par David Bourguignon de Radio Bemba) partagent un certain nombre de points communs dans les compositions d’une part, et dans la démarche d’autre part. Musicalement, ils sont unis par ce que l’on pourrait définir comme de l’ethno-rap. Les deux albums nous emportent dans un voyage aux influences multiples, des consonances indiennes à celles du Mali pour Kwal et des rythmes sénégalais aux guitares flamenco pour Black Baudelaire. La confrontation des cultures est la ligne directrice.
Black Baudelaire explore, pour ce premier album, Cuidado, la culture afro-arabe à travers l’histoire d’un Africain confronté à la désillusion du rêve européen : sample de jazz sur Kess Kess ou rythme funky sur le tubesque L’imposture dans la lignée de US 3, chants wolof entraîné par une basse dub sur Bou. Et puis après un petit passage obligé par la frontière andalouse aux airs flamenco de Cuidado, nous atteignons Barcelone avec des ajouts électro dignes de Télépopmusic sur Tchanch ou de beat jungle sur Danger. Les paroles sont engagées, contestataires : "Nous sommes les enfants de Sabra et Chatila" fait écho au Concerto en lutte, hymne aux Palestiniens déracinés, de Kwal.
Le rappeur angevin laisse peu de place à la fantaisie sur son album, Mogo ya, si on exclut l’amusante Piqûre du mystique. Le son est aussi dense que l’écriture et cette tension contenue trouve sa traduction dans le titre Asphyxie. Loin d’asséner des vérités, Kwal préfère l’anecdotique, comme il le chante dans Issa : "Ce récit n’est qu’une simple histoire...", et prépare l’auditeur à l’écoute du monde. Mélange de hip-hop, d’électro et de musiques traditionnelles, Kwal rend hommage aux lieux visités en empruntant les sonorités et en collaborant avec les artistes rencontrés comme les gamins de rue de Bamako, les Ruffans (aujourd’hui dissous). Chants maliens et arabes, percussions indiennes, airs flamenco, le voyage se poursuit dans "l’anti-monde de Bush-Cassidy" (Huit ans de malheur).
Sur leur site, Black Baudelaire présentent Cuidado ainsi : "Un disco para cantar y reflexionar" (un disque pour chanter et réfléchir). Encore un point commun avec Mogo ya. Et peut-être serait-il utile de faire un envoi groupé de ces deux albums à nos deux cents députés...
Cuidado - Black Baudelaire (Kasbamusic)
Mogo ya - Kwal (Créer c’est résister/Naïve)
Black Baudelaire sur le net
Kwal sur le net
Tracklisting - Ciudado :
1 Intro
2 Bou
3 Nègres du systèm
4 Cuidado
5 Guay
6 Jotna daye
7 Kess kess
8 Black Baudelaire
9 L’imposture
10 Dramé
11 Melanine
12 Tchanch
13 Legicy
14 Potjo
15 Si tu brûles mes textes
16 Danger
+ Nègres du systèm [vidéoclip]
Tracklisting Mogo ya :
1 Ciwara (feat. Dobet Gnahoré)
2 Babel (feat. Lassy King Massassy, Malika, Puk, Tomawak, Binzen, Aurélius et H-B)
3 La rue (feat. Les Ruffans)
4 Concerto en lutte (feat. Leila Bounous, Ramzy Abu Redwan et Mohammed Amr))
5 Adama dén ko (feat. Adama Yalomba)
6 Huit ans de malheur
7 Asphyxie
8 Interlude (feat. Laurent Jaulin)
9 Loin, très loin (feat. Toma Ke Toma)
10 La piqûre du mystique (feat. Amanat et Ashok Ali Kzwa)
11 Shéhérazade (feat. Leila Bounous)
12 Des fleurs (feat. Nathalie Loiseau)
13 Issa (feat. Foy-foy)
14 Faya (bonus track feat. Lassy King Massassy et Aurélius)
Galerie photos
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toldai 13 juin 2006
Cuidado & Mogo ya
A ce qui est dit dans l’article, je voudrais ajouter que Vincent LOISEAU mène sa vie avec KWAL conformément aux valeurs de générosité et de bienveillance pour les vies modestes qu’on ressent à l’écouter, encore plus à le rencontrer.
Dans le mondes des simulacres de telles énergies nous soutiennent le moral, pour le moins ! Et cette qualité de l’intention, lumineuse dans les textes, s’exprimera sur plusieurs registres musicaux, j’en suis sûr !