Le 14 mars 2020
Le second long métrage d’Agnès Varda est l’un des meilleurs films de la Nouvelle Vague et un très beau portrait de femme.
- Réalisateur : Agnès Varda
- Acteurs : Dominique Davray, Jean Champion, Corinne Marchand, Antoine Bourseiller, Alan Scott
- Genre : Drame, Noir et blanc
- Nationalité : Français, Italien
- Distributeur : Athos Films
- Editeur vidéo : Arte Vidéo
- Durée : 1h30mn
- Date télé : 2 septembre 2024 23:11
- Chaîne : TV5 Monde
- Reprise: 19 mars 2014
- Date de sortie : 11 avril 1962
- Festival : Festival de Cannes 1962
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Résumé : Quatre-vingt-dix minutes de la vie d’une femme.
Critique : Second long métrage d’Agnès Varda, Cléo de 5 à 7 est, avec Sans toit ni loi, son chef-d’œuvre. Cette merveille de délicatesse et d’émotion suit les pas de Cléo, une belle chanteuse qui attend les résultats d’une analyse médicale. La première séquence (et l’unique en couleur) est magistrale, qui voit un jeu de cartes défiler en plan fixe, avec en voix off les inquiétudes d’une cartomancienne. Dès cet instant, Cléo est persuadée d’être atteinte d’une maladie très grave ; et entre superstition et signes supposés du destin (têtes de mort, enseigne d’une société de pompes funèbres, couleur noire...), l’image du trépas est récurrente. Mais la jeune femme est pétulante de vie, au-delà de sa mélancolie et sa peur... Le film est l’un des plus célèbres de la Nouvelle Vague : le tournage en extérieurs montre plusieurs quartiers de Paris, de la rue Rivoli au parc Montsouris, en passant par le café du Dôme ; ce style documentaire, avec caméra légère, fait écho aux déambulations de Jean-Paul Belmondo dans À bout de souffle. En même temps, les coquetteries et les numéros musicaux de Cléo dans son appartement répondent aux scènes d’intérieur de Lola (1961) de Jacques Demy : Varda établit ici des correspondances avec l’œuvre de son époux : à la danse d’Anouk Aimée succède la chanson de Corinne Marchand, actrice attachante et sublime, dont on peut regretter que le cinéma français n’ait pas davantage exploité la sensibilité par la suite. Cléo de 5 à 7, ce sont ces instants de grâce et liberté, ce ton unique après une décennie plutôt académique dans le septième art en France, malgré Ophuls ou Bresson. Des digressions insolites (comme ce court métrage burlesque muet dans lequel apparaissent Godard et Anna Karina), des apparitions comiques inattendues (Michel Legrand, qui signe par ailleurs la musique du film), un mélange de fausse improvisation et de vrais numéros d’acteurs (la truculente Dominique Davray en bonne copine, seul second rôle dans la lignée d’un cinéma de tradition), ou encore cette alchimie entre un style aérien (les travellings du bus) et une économie de moyens en font un long métrage typique d’un courant majeur. En même temps, Cléo de 5 à 7 est daté, au sens positif du terme. La griffe des années 60 est permanente, pas seulement en raison des coiffures et costumes de Corinne Marchand et de la tonalité yéyé du fond musical, mais aussi parce que le film s’inscrit stylistiquement dans la mouvance d’une tendance européenne qui va de Paris nous appartient à Ma nuit chez Maud, en passant par Blow-up. Film d’amours et d’errances, Cléo de 5 à 7 est enfin la première grande réalisation féminine du cinéma en France (après les expérimentations des Alice Guy-Blaché, Germaine Dulac et autres Jacqueline Audry). À ce titre, c’est aussi un document historique.
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