Le 15 septembre 2005
Un public nombreux pour une programmation riche et militante.
Un public nombreux pour une programmation riche et militante, tel pourrait être le résumé de cette session 2005 de la Fête de l’Humanité.
Tiken Jah Fakoly
L’Afrique a trouvé son Don Quichotte : il se nomme Tiken Jah Fakoly. Grand, élancé, habillé de haillons, la barbe au menton, Tiken Jah, durant son concert, s’est fait le chantre de la cause noire au travers de ses textes et de petites interpellations. Démunis du Sud, repus du Nord, Afrique violée, hôtels parisiens incendiés, tels sont quelques-uns des thèmes développés dans des paroles simples, rythmées par un reggae nonchalant. Tiken Jah propage sa colère et déploie sa longue cape dans des courses effrénées sur la scène de l’Huma. L’ingénieux Africain a bien belle figure.
Asian Dub Foundation
Après des performances un peu convenues ces derniers temps,
Asian Dub nous est revenu revigoré, énergique, et bondissant. On peut s’amuser du look singulier de chaque chanteur que l’on pourrait croire créé pour lancer une collection de figurines à échanger dans les cours d’école. La palme du style revenant, sans conteste, à Ghetto Priest (cf. photo). Toujours est-il que la mécanique tourne à plein régime, et que les enchaînements break/rythme jungle sont plus que jamais efficaces avec des jeux de lumière kaléidoscopiques étourdissants.
Mickey 3D
Quoique beaucoup plus sobre, Mickey 3D n’en est pas moins amusant : pour preuve sa bonne bouille,
ses échanges avec le public parisien sur le foot ("vous aussi vous aurez un jour une équipe de foot" ; pour mémoire, il est Stéphanois) avant d’envoyer son tube Johnny Rep et ses petits mots contre certains maux de notre société. Mais son concert reste un peu trop dans le registre rock-folk-mollasson. Il faudra attendre la fin du set pour profiter de l’énergie de Il faut viser la tête, excellente chanson de son dernier album Matador, et une reprise d’Indochine très rock’n roll.
Fantasio
"L’homme-contrebasse", était lui aussi de la fête. Artiste de la rue parisienne et de la culture squat, il baigne dans les influences, de Goran Bregovic à Tom Waits.
Certaines chansons pèchent un peu par la fadeur de leurs paroles et l’interruption du set par un texte à l’intérêt très relatif lu a cappella aurait pu être évitée. Ceci-dit, rythmes maltraités, chant polyglotte et instruments bigarrés (avec notamment l’utilisation par Ben le bruitiste de boîtes à meuh pour marquer le tempo) et de bien d’autres surprises ont su rendre le concert intéressant.
Archive et le chœur de Radio France
Le rapprochement peut paraître osé et pourtant, Archive et le chœur de Radio France ont bénéficié de la même attention religieuse de la part du public. Archive a envoûté par un éclairage bleuté, enfumé, et une performance tout à la fois rageuse et atmosphérique en phase avec leur album Noise. Le combo créé par Darius Keeler et Danny Griffith a enchaîné des titres aux longues montées captivantes, appuyées par la voix
torturée de Dave Penny (remplaçant ponctuel de Craig Walter) ou celle jazzy-vaporeuse de Maria Q. Une jolie démonstration d’opéra-trip-rock ! Beaucoup moins rageur mais tout aussi séduisant, le chœur de Radio France dirigé par Bruno Casoni a interprété le Carmina burana de Carl Orff avec sobriété, s’autorisant même un rappel après l’ovation du public. Le baryton solo Mark Pancek a ravi les oreilles par l’étendue de son répertoire et Paola Munari, soprano solo, vêtue d’une robe de soirée rouge contrastant avec le noir des autres interprètes, a apporté sa grâce à l’ensemble. Une pose communiante dans l’esprit festif de l’Huma, ce qui fit dire à un jeune fan d’Offspring : "Mais pourquoi ils invitent ce genre de groupe à la fête de l’Huma, c’est triste, putain". Ben oui, grand nigaud, mais c’est beau.
Bernard Lavilliers
Bernard Lavilliers serait-il le Sancho Panza de Fakoly Quichotte ? Après la collaboration du chanteur africain au dernier disque du Stéphanois,
leur présence à tous deux à la fête de l’Huma pourrait le laisser penser... Fidèle à ses pères spirituels, Léo Ferré ou Aragon, Lavilliers avait préparé un répertoire militant composé de ses chansons, Question de peau ou Sertão, et de reprises (le texte de l’Affiche rouge). Mais Sancho ne serait pas Panza sans quelques titres plus légers et latinos avec des standards comme L’été, La salsa et une version du Bal excellente, durant laquelle ses techniciens, munis de percussions, sont venus renforcer le groupe de musiciens. Après deux rappels, Lavilliers a salué un public conquis.
En plus des groupes chroniqués, la Fête de l’Huma accueillait d’autres pointures comme La Rumeur, Nosfell, Amadou et Mariam, Emir Kusturica, Juliette, Deportivo et bien d’autres, autant dire que le choix était large et éclectique. Le public qui le samedi soir a atteint cent mille personnes était chaleureux et venu tant pour faire la fête que pour découvrir de nouveaux horizons. Bref un état d’esprit ouvert, propice à profiter pleinement d’une fête politique, gastronomique et culturelle de très bonne tenue.
Prochaines dates de concerts :
Bernard Lavilliers 5/10 à Vitry-sur-Seine (94), 7/10 au 10/10 au Zénith à Paris (75), 14/10 au Mans (72), 15/10 à Amiens (80), 19/10 à Toulouse (31), 21/10 à Clermont-Ferrand, 22/10 aux Mureaux (78), 23/10 à Roubaix (59) , 25/10 à Troyes (10).
Tiken Jah Fakoly 20/10 à Marseille (13), 22/10 à Morlaix (29), 25/10 à Troyes (10), 26/10 à Lille (59), 27/10 à Zurich (Suisse), 28/10 à Annemasse (74), 04/11 à Saint-Etienne (42), 5/11 à Strasbourg (67), 8/11 et 9/11 à Paris (75), 23/11 à Murs-Erigne (49).
Mickey 3D 29/10 à Clermont-Ferrand (63), 03/11 à Lausanne (Suisse), 4/11 à Lyon (69), 5/11 à Grenoble (38), 09/11 à Paris (75), 10/11 à Meisenthal (57), 11/11 à Amneville (57), 12/11 à Caen (14).
Galerie Photos
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.