Contre-enquête sur un scandale judiciaire
Le 24 mai 2019
Une chronique judiciaire qui se lit comme un roman, autant qu’un énième rebondissement dans une procédure sans fin...
- Auteur : Isabelle Horlans
- Editeur : Le passeur
- Date de sortie : 18 avril 2019
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Résumé : Le 9 novembre 2017, le procureur de Paris donne son accord pour que la juge d’instruction Charlotte Bilger propose une procédure dite de « plaider coupable » à Gérard Lhéritier, notamment mis en examen pour « escroqueries en bande organisée », et aux huit autres suspects poursuivis dans « l’affaire Aristophil », afin de clore un dossier qui n’a pas abouti à l’issue escomptée. À ce jour, la justice n’a pas rapporté la preuve que Gérard Lhéritier a échafaudé, via sa société, une « pyramide de Ponzi » visant à escroquer ses clients. Pourtant, depuis près de cinq ans, il est la cible d’articles vindicatifs qui ont ruiné sa réputation, il est affublé du surnom de « Madoff français », ses biens sont saisis, ses comptes bancaires et ceux de sa fille, gelés. À ce désastre personnel s’ajoutent le licenciement de ses 61 salariés et la spoliation des 18 750 clients qui ont vu leurs actifs (lettres et manuscrits) placés sous scellés et aujourd’hui dilapidés à vil prix dans des ventes aux enchères. Le scandale que constitue l’éparpillement des 130 000 pièces de la collection est sans précédent dans l’histoire du patrimoine culturel. La journaliste Isabelle Horlans, qui a étudié le dossier, démontre que Gérard Lhéritier n’a jamais escroqué les acheteurs qui lui ont accordé leur confiance. Depuis 2004, il a multiplié l’acquisition de documents autographes précieux, faisant d’Aristophil un partenaire culturel puissant qui a éveillé la jalousie des uns, l’intérêt des autres. Pendant vingt ans, l’Etat l’a laissé exercer son activité, saluant ses expositions, partenariats et conférences. Présidents de la République, ministres, académiciens, écrivains, personnalités du monde des arts, comédiens, journalistes ont tant cru en lui qu’ils l’ont accompagné durant deux décennies. Plus de 700 articles ont fait l’éloge de ses initiatives. La liquidation d’Aristophil donne désormais lieu à un vaste pillage de sa collection, notamment par les Archives de France.
Notre avis : On ne doute pas un instant de l’honnêteté de la journaliste à l’origine de cette enquête. Pour peu que l’on puisse s’identifier à cette personnalité qu’elle nous peint au fil des pages, ce Gérard Lhéritier a de quoi intriguer et l’on se laisse facilement convaincre de son innocence ou tout au moins de sa bonne foi. Cela tombe bien puisque l’une des intentions de l’enquête est ici de réaffirmer le principe de la présomption d’innocence, un principe apparemment bafoué dans les procédures haineuses ici relatées, un principe structurant du droit français opposé à un principe de liberté de la presse qui, dans la course frénétique au scoop, peut conduire aux extrémités du « tribunal médiatique ». Cette machine sujette à l’emballement, dangereusement influençable et obnubilée par la publication des indiscrétions d’une justice avide de lumière, broya Gérard Lhéritier. Entre la préface de Didier van Cauwelaert et la contre-enquête d’Isabelle Horlans, ce personnage de roman noir est tristement réel. L’on peut se convaincre de l’erreur judiciaire que le système - autre mot à la mode en période de troubles politiques - aurait orchestré pour saper une réussite trop scandaleuse. La description au vitriol de plusieurs petits mondes, des marchands de manuscrits qui alignent les zéros aux médias amnésiques qui mettent au pilori ceux qu’ils encensaient auparavant, nous met en présence d’un phénomène qui, généralement, ne s’affiche pas et préfère se cacher, se dissimuler dans le secret des affaires. Dans ces « entre-soi », on s’estime jusqu’à ce qu’on se jalouse et les estimations prennent le pas sur le respect que l’on a les uns pour les autres. De la grâce à la disgrâce, ces règlements de compte souterrains et sournois sont à désespérer d’une certaine forme - que l’on espère peu répandue - de nature humaine, une nature humaine prête à toutes sortes de petites mesquineries pour de gros profits. Ces acharnements suspects, qui en disent plus long sur les acharnés que sur les souffre-douleurs. La presse française ne sort pas grandie de la couverture médiatique qu’elle a réservée au scandale Aristophil. La ligne de démarcation, entre une presse sérieuse et traditionnelle d’un côté et les réseaux sociaux propagateurs de rumeurs et de fausses nouvelles de l’autre, n’est plus si évidente. Les approximations, les raccourcis, les raisonnements fallacieux contribuent à faire de Gérard Lhéritier le Madoff français, le coupable idéal, l’homme à abattre. Mais le lecteur ne peut s’empêcher de s’interroger sur les raisons d’une telle hostilité. Peut-être que tous ne peuvent supporter cette passion napoléonienne qui l’anime. Il est indéniable que cet inconnu dont on découvre le désarroi reste une énigme.
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