Un barrage contre le Pacifique - critique

Critique : Un barrage contre le Pacifique, adaptation du roman d’inspiration autobiographique de Marguerite Duras, marque le grand retour de Rithy Panh à la fiction après le cycle documentaire consacré au génocide cambodgien qui le fit connaître des cinéphiles, avec notamment l’excellent S21. Le réalisateur se plonge ici dans une autre période tragique de l’histoire du Cambodge, à savoir la colonisation des années 30. Si l’on peut regretter le conformisme de la mise en scène et le manque d’épaisseur de certains seconds rôles, cette production cossue, qui n’est pas sans rappeler l’autre grande adaptation de Duras, L’Amant (1992) de Jean-Jacques Annaud, pour le coup plus ample et plus ambitieuse, finit par s’animer à mi-course sous l’impulsion d’Isabelle Huppert, ambiguë à souhait. Incarnant tout à la fois la mère maquerelle indigne, prête à prostituer sa fille pour payer ses dettes, et la mère courage aux accents gionesques, qui ne recule devant rien pour défendre son bout de terre contre la tyrannie des éléments et du cadastre, l’actrice joue en permanence - non sans autodérision - sur la corde raide qui sépare la force de la faiblesse.
Une belle interprétation qui permet à cette grande fresque indochinoise de se regarder agréablement.