Travail de mémoire
Le 9 mai 2013
Pour lutter contre la "mémoire de l’oubli", Rithy Panh préfère le pouvoir des mots, témoignages d’anciens bourreaux et de rares survivants, aux images de charniers.


- Réalisateur : Rithy Panh
- Genre : Documentaire
- Nationalité : Français
- Durée : 1h41mn
- Date de sortie : 11 février 2004
- Festival : Festival de Cannes 2003

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Pour lutter contre la "mémoire de l’oubli", Rithy Panh préfère le pouvoir des mots, témoignages d’anciens bourreaux et de rares survivants, aux images de charniers.
L’argument : À la suite de rencontres effectuées sur le tournage de Bophana, une tragédie cambodgienne, Rithy Pahn filme bourreaux et rescapés du fameux S 21, un centre d’extermination situé au cœur de Phnom Penh, où périrent 17 000 hommes, femmes et enfants. Rithy Panh a voulu que ce film ne soit ni un réquisitoire ni une reconstitution, mais la restitution de la mémoire de son peuple.
Notre avis : Six ans après Bophana, une tragédie cambodgienne, Rithy Panh retourne au camp S 21 confronter à nouveau victimes et bourreaux (on se souvient notamment du peintre Van Nath, l’un des 7 survivants du camp et Houy, le chef adjoint de la sécurité du centre d’extermination) et poursuivre le travail de mémoire entrepris alors.
Si dans un premier temps, les gardiens reprennent à leur compte le processus de rationalisation commun aux témoignages d’anciens tortionnaires impliqués dans des crimes de masse : "On ne faisait qu’obéir aux ordres.", "on n’avait pas le choix"), les langues se délient peu à peu sous le feu nourri de questions de Van Nath qui se substitue au réalisateur, interrogeant sans dénoncer pour que surgisse simplement, la vérité. Le vocabulaire est ici tout sauf neutre. Ainsi, on ne tuait pas un prisonnier mais on détruisait un ennemi avec un objectif bien précis : créer un cadre formel à l’entreprise d’extermination, déshumaniser les victimes tout en donnant bonne conscience aux bourreaux qui se contentaient au final de servir leur patrie. Pour étayer ces propos, Rithy Panh a choisi une multitude de photos prises lors de l’arrivée des prisonniers au camp ou de scènes de torture. Paradoxe étonnant que ces photos qui permettent aujourd’hui de sortir les victimes de l’anonymat aient été prises par ceux qui voulaient effacer jusqu’à la mémoire même des condamnés.