Tsili - la critique + le test DVD

Un film énigmatique sur la survie d’une jeune fille juive pendant la seconde Guerre Mondiale, adapté du roman éponyme d’Aharon Appelfeld.

L’argument : Après que sa famille entière ait été déportée dans les camps, Tsili, une jeune juive, part se cacher dans la forêt au sud de Czernowicz. En pleine zone de guerre, elle se construit un refuge dans la nature où elle échappe aux sauvageries qui se déroulent dans la vallée.
Son abri est découvert par Marek qui s’adresse à elle en yiddish. Découvrant qu’ils font partie du même peuple ils décident de rester ensemble. Un jour, Marek descend au village chercher des provisions mais ne revient jamais et la guerre finit par prendre fin.
Après avoir quitté son refuge, Tsili rencontre près de la côte un groupe de survivants à la recherche d’un bateau qui pourrait les mener vers un autre monde.

Copyright Trikita Entertainment

Notre avis : Passé inaperçu lors de sa sortie en salles, ce long-métrage du célèbre réalisateur israélien Amos Gitai aborde la question des juifs pendant la seconde Guerre Mondiale sous un angle original. Adapté du roman éponyme d’Aharon Appelfeld, Tsili n’est autre que le récit de la survie d’une jeune fille juive abandonnée par sa famille lors de la déportation. La Guerre n’est que l’arrière-plan de ce film, qui se concentre sur les détails du quotidien de Tsili, qui tente de trouver une nouvelle voie. Hormis quelques bruits de bombardements et les dialogues évoquant les camps et la condition juive, rien ne renvoie à la guerre et l’aspect historique n’est pas exploité. Très minimaliste, le film s’intéresse aux détails et repose sur une multitude d’expérimentations esthétiques, quitte à négliger un peu le sujet. Finalement, il ne se passe presque rien dans ce long-métrage divisé en deux parties. La première - extrêmement lente - évoque la vie en forêt de Tsili et sa encontre avec Marek. Plans fixes à n’en plus finir et silence quasi absolu (l’accent est mis sur les bruits de la nature et les dialogues sont rares) en font une séquence relativement austère, qui semble n’être qu’une expérience cinématographique. Un épisode central néanmoins, qui parvient parfaitement à restituer le côté routinier de ce quotidien, dont chaque jour semble n’être qu’un éternel recommencement.

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Quant à la seconde, plus dynamique dans la mise en scène, elle retrace la rencontre de la jeune fille avec les réfugiés. En rupture avec la première partie du film, elle fait intervenir d’autres personnages, du mouvement et de la musique, avec cet air de violon qui vient occuper l’espace sonore. Beaucoup de passages sont éludés par rapport au roman d’Appelfeld, dans lequel il y a plus d’aventures. Si le réalisateur s’en explique en déclarant qu’il a souhaité se concentrer sur la thématique de la jeune fille perdue protégée par la nature et que c’est au spectateur de compléter le récit, cela s’avère tout de même frustrant. Amos Gitai brouille les pistes en proposant une narration très fragmentaire et elliptique, procurant ainsi l’étrange sentiment que tout s’est passé sans que l’on ne s’en rende compte. Les coupures - à grands coups de fondus au noir - sont nettes et brutales entre les différents plans et ont pour effet de très vite marquer la rupture avec ce qui s’est passé avant. On notera aussi que l’un des fils directeurs du film est l’idée de conservation de la mémoire, avec l’utilisation d’images archives à la fin et de la langue yiddish pour les dialogues. Finalement Tsili réussit le pari de nous entraîner dans une atmosphère singulière et laisse songeur. Il captive tout en ennuyant, il hypnotise en quelque sorte. Ses défauts sont aussi ses qualités, et inversement. Une curiosité à découvrir au moins pour l’expérience sensitive.

Les suppléments :

Un entretien avec le réalisateur Amos Gitai (10mn) par Jean-Michel Frodon, dans lequel Amos Gitai retrace la genèse du film en évoquant notamment sa lecture du texte d’Appelfeld et sa collaboration avec l’auteur. Le réalisateur livre entre autres des informations intéressantes sur le parti pris scénaristique et sur les choix de mise en scène. Des éléments importants pour mieux comprendre sa démarche.

L’image :

Si l’image est un peu terne et manque de contraste, elle souligne néanmoins parfaitement les détails, surtout dans les séquences en forêt.

Le son :

L’édition présente une version Dolby Digital 5.1 en VOST (le film est en yiddish) de bonne qualité. Le bruit de la pluie, le bruissement des feuilles et autres innombrables sons de la nature sont parfaitement restitués mais les rares dialogues sont parfois un peu faibles.