Le 30 décembre 2023
Ce polar percutant fait partie des grandes réussites de Polanski. Il bénéficie d’un scénario efficace coécrit par Robert Harris et d’une mise en scène remarquable par sa fluidité.
- Réalisateur : Roman Polanski
- Acteurs : Ewan McGregor, Tom Wilkinson , Eli Wallach, Pierce Brosnan, Timothy Hutton, James Belushi, Kim Cattrall, Olivia Williams, Jon Bernthal, Milton Welsh
- Genre : Drame, Thriller, Politique
- Nationalité : Britannique, Français, Allemand
- Distributeur : Pathé Distribution
- Editeur vidéo : Pathé Vidéo
- Durée : 2h08mn
- Date télé : 19 février 2023 20:55
- Chaîne : Arte
- Box-office : 1 079 660 entrées France / 699 720 entrées Royaume-Uni
- Date de sortie : 3 mars 2010
- Festival : Festival de Berlin 2010
Résumé : Un jeune écrivain anglais est contacté pour une proposition financièrement alléchante : devenir le nègre du Premier ministre à la retraite, Adam Lang, pour l’écriture de ses mémoires. Après avoir accepté, il se rend aux États-Unis, sur une île aride où Lang s’isole. Le travail commence, mais l’écrivain apprend que son prédécesseur est mort dans des circonstances étranges...
Critique : The Ghost Writer se situe dans la filmographie de Roman Polanski entre Oliver Twist, adaptation de Dickens réputée mineure, et Carnage, réjouissante transposition d’une pièce de Yamina Reza. Si le film marquait le grand retour de Polanski, il n’en demeure pas moins comme une œuvre qui doit beaucoup à son coscénariste Robert Harris. Ce dernier est l’auteur du roman (« L’Homme de l’ombre », 2007) qui constitue le matériau initial du métrage. Journaliste politique anglais chevronné, Harris s’est intéressé aux parcours de Tony Blair, ex-Premier ministre britannique, et son épouse Cherie Blair. Sans être cités explicitement dans le roman ou le film, les deux ont visiblement inspiré les personnages d’Adam (Pierce Brosnan) et Ruth Lang (Olivia Williams). La responsabilité de Blair dans l’engagement en Irak, ou ses liens étroits avec la diplomatie américaine, sont à l’origine des situations évoquées dans le scénario. Pourtant, The Ghost Writer n’est pas vraiment un film politique à la Pakula ou Oliver Stone, mais avant tout un thriller percutant, épuré et glaçant, qui porte la griffe de son réalisateur, tant au niveau de la thématique que du récit.
- © RP Productions
Sans mener directement une enquête policière comme l’avait fait Jack Gittes (Nicholson) dans Chinatown, le « nègre » incarné par Ewan McGregor se voit contraint d’endosser le costume d’un détective amateur, à l’instar du cardiologue de Frantic. Persuadé d’être en danger dans un environnement a priori normatif et sécurisé, il se retrouve dans une situation analogue à celle du Trelkovsky dans Le Locataire. Et s’il n’atteint pas son degré de paranoïa, les moments forts du récit surgissent quand le protagoniste, en apparence sain et intègre, apparaît comme un homme potentiellement névrosé. Enfin, comme le colonel Picquart de J’accuse, son souci de connaître la vérité lui attire l’hostilité des plus hautes sphères politiques. Quant à la figure d’Adam Lang, rattrapé par son passé, et objet de haine de la part de manifestants professant des accusations, fondées ou infondées, à son égard, on peut y voir une projection de Polanski lui-même. Rappelons à ce sujet que le réalisateur a supervisé les dernières étapes du montage depuis sa cellule de prison, après avoir été arrêté en Suisse, conséquence d’une vieille affaire judiciaire aux États-Unis. Un tribunal devait prononcer plus tard sa relaxe ; mais déjà en 2010, l’« affaire Polanski » éclipsait, à un degré certes moins élevé qu’en 2019, le sujet passionnant de son film.
- © RP Productions
Pour ce qui est de la mise en scène, on appréciera le brio dans l’art de distiller le suspense avec une économie de moyens (l’escapade en vélo sur l’île, la traque dans le ferry, le dénouement dans la maison d’édition), Polanski se montrant un digne héritier de Hitchcock. On regrettera juste quelques invraisemblances dans la narration, comme la facilité avec laquelle le héros découvre en quelques minutes sur Google des informations que les services secrets mettent des années à avoir… Mais n’était-ce pas là aussi une convention hitchcockienne ? Comme souvent chez Polanski, le casting est impeccable. Ewan McGregor trouvait son plus beau rôle depuis Trainspotting et The Pillow Book, quand Pierce Brosnan composait un personnage bien plus nuancé et ambigu que ses James Bond. Les seconds rôles assurent le job avec classe, tels Kim Cattrall en assistante dévouée, Tom Wilkinson en universitaire véreux, ou Eli Wallach, toujours en forme dans l’un de ses dernières apparitions à l’écran. The Ghost Writter fut un succès en salle et remporta de nombreux prix, dont l’Ours d’argent au Festival de Berlin et le César du meilleur réalisateur.
La chronique vous a plu ? Achetez l'œuvre chez nos partenaires !
Galerie photos
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.
Norman06 7 mars 2010
The Ghost Writer - Roman Polanski - critique
Très bon thriller politique et d’espionnage ; les passages sur l’île sont admirablement filmés et Polanski réussit admirablement son retour à la mise en scène, par cette métaphore des obscurités de la recherche de la justice. Troublant !
roger w 7 mars 2010
The Ghost Writer - Roman Polanski - critique
Polanski, après avoir en partie foiré un premier essai hitchcockien (Frantic) revient à la charge et cette fois-ci transforme l’essai. Son film est d’une rigueur impeccable, avec en plus un aspect politique qui n’est pas négligeable. Et que dire de la dernière scène, petit bijou à déguster d’urgence en salle.
Frédéric de Vençay 13 mars 2010
The Ghost Writer - Roman Polanski - critique
Le dernier Polanski est un bon film policier, classique et bien mené, d’une ironie délectable. De là à parler de grand film ou de chef-d’oeuvre, c’est un pas que je ne franchirais pas (ça ne vaut pas "Le Pianiste" ou "Rosemary’s Baby", quand même). Les dernières minutes font preuve d’un brio éclatant qu’on ne retrouve pas, hélas, dans tout le film.
’Boo’Radley 15 avril 2010
The Ghost Writer - Roman Polanski - critique
Le spectateur a le droit de considérer ce film comme une frustration : échec du personnage principal trop évanescent (une redondance à son statut d’écrivain fantôme), promesses non tenues des nombreuses scènes sans "climax" (la promenade au bord de mer, la visite chez l’universitaire et la course poursuite, la nuit dans l’hôtel du débarcadère), la grossière codification du message secret digne de la bibliothèque verte... Mais quelle virtuosité dans la mise en scène ! Le scénariste Robert Harris a peut-être été remplacé par un nègre mais à coup sûr Roman Polanski était derrière la caméra.
MNMS 4 mai 2019
The Ghost Writer - Roman Polanski - critique
Superbe thriller ! Du grand Polanski