Dans le courant du torrent
Le 8 mars 2016
Hou Hsiao-hsien effectue son grand retour avec ce film d’action historique fidèle à son style contemplatif, et interprété par la magnifique Shu Qi.
- Réalisateur : Hou Hsiao-hsien
- Acteurs : Shu Qi, Chen Chang, Zhou Yun, Satoshi Tsumabuki
- Genre : Drame, Action, wuxia
- Nationalité : Taïwanais
- Distributeur : Ad Vitam
- Durée : 2h00mn
- Date télé : 5 août 2019 22:30
- Chaîne : Arte
- Box-office : 250.829 entrées France / 94.251 entrées Paris Périphérie
- Titre original : Nie Yin Niang
- Date de sortie : 9 mars 2016
- Festival : Festival de Cannes 2015
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– Festival de Cannes 2015 : Prix de la mise en scène
– Asian Film Awards 2016 : Meilleur film - Meilleur réalisateur - Meilleur actrice pour Shu Qi - Meilleure actrice dans un second rôle pour Zhou Yun
L’argument : En Chine, au IXe siècle, Nie Yinniang retourne dans sa famille après de longues années d’exil. Bien qu’elle ait été confiée à une nonne, son éducation a intégré l’initiation - dans le plus grand secret - aux arts martiaux. Désormais justicière, elle a pour mission de se débarrasser des tyrans. À son retour, sa mère lui remet un morceau de jade, symbole du maintien de la paix entre la cour impériale et la province de Weibo, et de son mariage avorté avec son cousin Tian Ji’an. Déstabilisé par les rebellions, l’Empereur a vainement tenté de reprendre le contrôle en organisant l’État en régions militaires. Mais les gouverneurs essayent désormais de les soustraire à son autorité. Devenu gouverneur de la province de Weibo, Tian Ji’an décide de le défier à son tour ouvertement. Alors que Nie Yinniang a pour mission de tuer son cousin, elle lui révèle son identité en lui abandonnant le morceau de jade. Que décidera-t-elle : sacrifier l’homme qu’elle aime ou rompre à jamais avec l’ordre des Assassins ?
Notre avis : Hou Hsiao-hsien s’est inspiré de la littérature romanesque des « chuanqi », récits brefs sous forme de nouvelles qui fleurissaient à l’époque des faits mentionnés. Les annales historiques ont également servi de référence, pour les détails anecdotiques (les rites du bain, l’alimentation), mais aussi pour cerner la complexité du contexte politique. Le film met ainsi en lumière le paradoxe des régions administratives et militaires créées par les empereurs Tang pour se protéger des menaces extérieures et canaliser les rébellions internes, et qui seront pourtant à l’origine de la disparition de leur dynastie. Mais The Assassin n’est pas l’archétype du film historique à costumes et décors somptueux, étayé par une reconstitution maniaque. Il n’est guère plus un simple film wu-xia avec combats chorégraphiques, et l’on cherchera en vain les liens avec des productions signées Zhang Yimou (Le secret des poignards volants), Ang Lee (Tigre et dragon), Wong Kar-wai (The GrandMaster) ou Tsui Hark (Detective Dee). Certes, pour la première fois, le cinéaste s’initie au genre mais n’est guère adepte des guerriers qui volent dans les airs et font des pirouettes au plafond. Les rares séquences de voltige sont ici de simples citations.
Se refusant donc aussi bien au didactisme qu’à la profusion de morceaux de bravoure, Hou Hsia-hsien se montre un maître des ellipses et zones d’ombre, donnant à son œuvre les allures d’un polar crépusculaire. Le scénario en lui-même ne semble qu’un prétexte, dans la logique du Grand sommeil, et The Assassin s’intéresse davantage au déroulement d’intrigues qu’à leur résolution. « Si le film était un fleuve, ou plus exactement un torrent, je m’intéresserais […] à sa vitesse, ses méandres, ses tourbillons, beaucoup plus qu’à sa source ou à son embouchure », a déclaré le cinéaste. Et on retrouve pour notre plus grand plaisir la griffe de l’auteur des Fleurs de Shanghai, par ce style contemplatif valorisant les longs plans-séquences englobant l’arrière-plan des personnages, les objets qui les entourent, voire les paysages. Le film est par ailleurs bien servi par l’actrice Shu Qi, qui avait déjà été dirigée par Hou Hsia-hsien dans Millenium Mambo et Three Times. Prix du Jury en 1993 pour Le Maître de marionnettes, le réalisateur a cette année remporté un Prix de la mise en scène qu’il n’a pas volé.
Gérard Crespo - En collaboration avec le site CINEMASMAG
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