Le roi Moody
Le 29 octobre 2003
Plongée dans l’Amérique des seventies, à l’époque où mœurs et consciences évoluent à la vitesse de l’éclair. Un roman choc qui démolit l’utopie familiale des années hippies.
- Auteur : Rick Moody
- Editeur : Editions de l’Olivier
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D’abord il y a une ambiance. Des couleurs, un mode de vie, une musique. Le Watergate, la guerre du Vietnam, glam rock à gogo. Fumette, comics, "papier peint velours à motif floral". Pulls "tricotés mains", ponchos et pattes d’éph. Toute une époque que Rick Moody s’amuse à remettre en place, avec délice et talent, dans la petite ville de New Canaan, près de New York.
Ensuite il y a la famille. Ou plutôt les familles, toutes deux de classe moyenne. Les Hood, Benjamin et Elena, parents de Paul et Wendy. Et leurs presque voisins et amis, Jim et Janey Williams, parents de Sandy et Mike. L’époque est aux expériences en tout genre. Et, même si Ben et Janey sont amants, rien ne les empêche d’assister avec leurs conjoints respectifs à ces soirées durant lesquelles les volontaires déposent un trousseau dans un saladier pour finir la nuit avec celui qui piochera leur jeu de clés. Les enfants sont difficiles à gérer. Le fossé du dialogue s’élargit de plus en plus. Entre libération des mœurs, désirs obsédants et plaisirs violents, les ados se cherchent et testent leurs limites.
Et tout ça témoigne d’un profond malaise, ancré dans les esprits, inscrit dans l’ordre des choses. Car si les parents se la jouent cool, ils n’en sont pas moins dépassés par leur progéniture, ados malheureux de devoir tirer un trait sur l’enfance. Et en même temps, impatients d’en finir avec la servitude et les comptes à rendre. Moody possède l’art et la manière de mener des dialogues qui, paradoxalement, dévoilent toute l’impuissance de ses personnages à pénétrer le cœur des choses et à communiquer. Le récit se déroule le temps d’un week-end, durant lequel une tempête de glace va dénouer les destins et modifier les regards.
On tient là un sacré roman. Et un sacré écrivain. En épluchant les consciences d’une manière si juste, en tapant si violemment dans la fourmilière familiale, Moody s’inscrit dans la lignée d’auteurs comme Carver ou Ford. Le tout non sans humour, mais un humour aussi sec et glacial que cette tempête qui enveloppe le récit. Et finalement, le narrateur (mais de qui s’agit-il ? réponse à la fin du récit) nous rassure dès la première ligne... Il ne s’agit que "d’une comédie sur une famille que je connaissais au temps de mon enfance", écrit-il. Une comédie peut-être. Mais qui se révèle aussi sombre que désespérée.
Rick Moody, Tempête de glace (The Ice Storm, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Michel Lederer), Editions de l’Olivier, 2003, 302 pages, 20 €
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