Solidarité
Le 21 septembre 2024
Résolument optimiste mais sans céder jamais au sentimentalisme béat, cette comédie réaliste qui a pour sujet la crise économique est une des très belles réussites de Pál Fejős, cinéaste hongrois à la carrière internationale.
- Réalisateur : Paul Fejos
- Acteurs : Annabella, Gustav Fröhlich, Paul Otto, Hans Marr, Annie Rosar, Jaro Fürth, Walter Brandt
- Genre : Comédie dramatique, Comédie musicale
- Nationalité : Autrichien
- Durée : 1h30mn
- Date de sortie : 5 octobre 1938
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– Sortie en Allemagne : 25 août 1933
– Sortie en Autriche : 15 décembre 1933
Résumé : Hans, chauffeur au chômage sur le point de se jeter dans le Danube, sauve de la noyade Anna, une jeune femme décidée elle aussi à en finir. Se soutenant mutuellement ils parviennent, grâce à des petits boulots, à réunir l’argent nécessaire pour acheter un taxi à crédit. Mais le jeune homme se retrouve à l’hôpital à la suite d’un accident et Anna ne parvient pas seule à réunir la somme due à l’échéance de la traite. La solidarité des habitants de la cité ouvrière permettra au couple de se sortir de cette situation désespérée.
Critique : Difficile de trouver carrière plus internationale et éclectique que celle du hongrois Pál Fejős (1897-1963). Après avoir tourné plusieurs films dans son pays à partir de 1920, il travailla aux États-Unis entre 1926 et 1930, y réalisant notamment le très beau Lonesome - Solitude (1928), ainsi que Broadway (1929), puis, de retour en Europe, œuvra aussi bien en Hongrie (Ítél a Balaton - Tempête sur le Balaton, 1933), qu’en France (Fantômas, 1932), au Danemark (Det gyldne smil - le sourire d’or, 1935) ou encore en Autriche (Frühlingsstimmen, 1933) avant de se consacrer au documentaire et à l’ethnographie.
Produit par la Serge Otzoup-Produktion Wien, Sonnenstrahl (1933), réunit en tête d’affiche l’Allemand Gustav Fröhlich (Metropolis) et la Française Annabella, déjà interprète, quelques mois plus tôt, du sublime Tavaszi zápor - Marie, légende hongroise, un des films les plus justement fameux de Fejös.
Conformément à un usage très répandu dans les premières années du parlant, une version française a été tournée simultanément à la version allemande. L’actrice y récupère d’ailleurs quelques-unes des répliques de son partenaire alors que son rôle est quasi muet dans ce qu’il faut bien considérer comme la version originale. Car, bien que tous les décors soient reconstitués en studio (dans le Sascha Atelier de Sievering), l’ancrage précis dans la réalité viennoise de l’époque confère à Sonnenstrahl un poids de réel qui fait largement défaut à Gardez le sourire, conte trop abstrait, flottant dans un espace-temps indéterminé.
Or c’est précisément l’alliage, à priori risqué, voire incongru, entre un réalisme sans concessions et la stylisation propre à la comédie musicale de l’époque qui fait le charme de Sonnenstrahl. Vivacité du jeu des acteurs, proche parfois de la pantomime, gracieuse chorégraphie des mouvements de caméra, montage rythmé, chansons entraînantes, jolis gags poétiques souvent teintés d’amertume : le film respire une joyeuse et pétillante légèreté qui sert de contrepoids à la gravité du sujet.
La réalité impitoyable de la crise économique (600 000 chômeurs, début 1933, dans la petite Autriche) contre laquelle se battent les deux héros est en effet bien présente et seule la force de l’amour qui les unit leur permet de l’oublier par instants et de relever la tête après chaque nouveau coup du sort.
Le rose bonbon n’est pas de mise : dans la séquence de la fête foraine, un des lanceurs qui prennent pour cible la tête grimée de noir du héros tentant ainsi de gagner quelques sous trouve très amusant de mettre une pierre dans la boule et le propriétaire du stand congédiera le blessé sans autre forme de procès (un remplaçant attend déjà son tour) ; la jeune femme supporte, des semaines durant, d’épuisants lavages de cheveux à répétition dans la devanture d’un coiffeur ; lui est renversé par un tramway alors qu’il essaye de récupérer la pièce, tombée entre les rails, posée par jeu un gamin : la dureté de ces scènes n’est pas esquivée et l’optimisme qui traverse malgré tout le film n’a rien de béat.
Les scènes finales, situées dans une des cités à l’architecture si caractéristique de Vienne la Rouge, sont une vibrante célébration de la solidarité ouvrière et confirment la portée politique de ce conte.
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