Trois femmes à Yokohama
Le 22 mai 2010
Un magnifique mélodrame baigné dans la lumière du port de Yokohama, entre Ozu et Sternberg, par un des grands maîtres du cinéma japonais, le trop méconnu Hiroshi Shimizu.
- Réalisateur : Hiroshi Shimizu
- Acteurs : Tatsuo Saitō, Michiko Oikawa, Yukiko Inoue, Ureo Egawa, Ranko Sawa, Yumeko Aizome, Yasuo Nanjô
- Genre : Drame, Film muet
- Nationalité : Japonais
- Durée : 1h12mn
- Titre original : 港の日本娘
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– Sortie au Japon : 1 juin 1933
Un magnifique mélodrame baigné dans la lumière du port de Yokohama, entre Ozu et Sternberg, par un des grands maîtres du cinéma japonais, le trop méconnu Hiroshi Shimizu.
L’argument : Sunako aime Henry, or celui-ci a de mauvaises fréquentations. Dora, l’amie de Sunako, veut intervenir, mais Sunako surprend Henry avec une autre femme, Yoko, dans une église. Elle blesse Yoko avec un revolver, fuit avec un peintre qui l’aime, puis se prostitue.
Dora et Henry se marient. Sunako revient à Yokohama ...
Notre avis : Les scènes d’ouverture nous installent dans le port de Yokohama : de superbes plans larges sur la mer, les paquebots blancs, la ville vue depuis les hauteurs qui la surplombent, le tout baignant dans une magnifique lumière d’été. La suite sera parfois sombre, mais la luminosité du début continuera d’imprégner l’ensemble. Et le drame de Sunako ne versera jamais dans le larmoyant, l’issue évitant le tragique au profit d’un presque happy end.
Hiroshi Shimizu, dont c’est le quatre-vingt dixième film (sur 166 !) était un ami d’Ozu, né comme lui en 1903. Son cinéma n’est pas indigne de celui de son plus illustre collègue, dont on retrouve d’ailleurs certains acteurs (Ureo Egawa ou Tatsuo Saito). Les parentés de style sont assez frappantes également. De magnifiques travellings accompagnent les personnages comme dans Hogarakani ayume - Va d’un pas léger (Ozu, 1930). Il y a des espaces vides de personnages, une fenêtre donnant sur le noir de la nuit, des feuilles agitées par le vent sur la jetée en très gros plan avec la mer au fond. Les pointes d’humour sont nombreuses et bienvenues. Et puis il y a une admirable netteté du trait, aussi bien dans le dessin de personnages aux caractères bien trempés et à la gestuelle précise que dans le découpage sans bavure.
On remarquera quelques brillants effets avant-gardistes : l’enchaînement d’ouvertures de portes lorsque Sumako cherche Henry dans tous les bars de la ville, ou encore la succession rapide de plans de plus en plus rapprochés pour cerner la détresse soudaine d’un personnage. Ce bonheur expressif est propre aux oeuvres les plus épanouies du muet et ne se retrouvera que rarement par la suite.
L’atmosphère portuaire et la focalisation sur de sublimes personnages féminins fait parfois penser à Sternberg d’autant que le travail sur la composition des plans et la photo est d’une extrême sophistication sans devenir pourtant une fin en soi.
Dans ses oeuvres ultérieures : Arigato-san/Monsieur Merci, 1936, Anma to onna/Les masseurs et la femme, 1938, ou Kanzashi/Le peigne, 1941, Shimizu parviendra à affiner encore plus son écriture pour parvenir à un ton tout à fait personnel, mélange d’élégance, de nonchalance apparente, d’humour, et d’une émotion qui arrive comme par mégarde, sans prévenir. Mais tout est déjà là dans Minato no Nihon musume, qui séduit par sa beauté formelle et touche par la grâce du regard chaleureux et attentif qu’il accorde à ses personnages.
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