Pas d’urgence
Le 22 juin 2004
Le quintette new-yorkais propose un nouveau disque serein, apaisé et compact, à la rage contenue.
- Artiste : Sonic Youth
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Dans une période particulièrement faste de sa longue histoire, le quintette new-yorkais propose un nouveau disque serein et apaisé, à la rage intérieure, direct rejeton du précédent Murray Street. En pleine possession de son rock, le groupe continue de développer son territoire unique sans urgence, et pour cause : il n’a aucun équivalent sur la scène actuelle.
On pourrait évoquer dans les grandes lignes l’histoire folle de Sonic Youth, sa longévité exceptionnelle, ses différents projets parallèles ou les personnalités extraordinaires qui composent le groupe (d’autant que Jim O’Rourke est maintenant membre officiel). Mais ce serait mal rendre hommage au travail des New-Yorkais, qui n’aiment rien moins que de gloser autour de leur musique instinctive et libre. Contentons-nous donc de parler de Sonic nurse, dix-neuvième album officiel qui mérite au moins autant d’attention que ses prédécesseurs.
Sonic nurse est avant tout un disque compact, dont les dix morceaux relativement semblables dans leur forme et leur structure composent un tout indissociable. Aucune individualité ne vient donc s’extraire de cette équipe solide, dont les piliers culminent à plus de sept minutes. Piliers d’ailleurs placés à des postes prépondérants : Dripping dream en troisième position (soit au début, mais pas tout au début), I love you golden blue en neuvième (soit à la fin mais pas tout à la fin), et surtout Stones en cinquième (soit en plein milieu). Autour de ces valeurs-étalon du groupe (de lentes progressions rock menées par des guitares se tortillant de plus en plus vigoureusement autour d’un chant à la mélodie instable), Sonic Youth prend soin d’alterner les voix de Thurston Moore et de Kim Gordon (aucun instrumental n’ayant droit de cité sur Sonic nurse), mais conserve ce même halo ombrageux autour du chant, élément sans cesse remis en question par le groupe depuis ses débuts : faut-il oui ou non que les constructions d’abord instrumentales soient chantées ? Si oui, peut-on se contenter de hurler des paroles abstraites, ou faut-il faire prévaloir un sens, même nébuleux ou ironique ?
Après plus de vingt ans de réflexion, le groupe semble s’être fixé sur cette dernière solution, réussissant même ici quelques mélodies vocales (supposées improvisées en studio) capables de rivaliser avec leurs célèbres boucles de guitares : Sur Dude ranch nurse, Kim Gordon fait même apparaître entre nos oreilles le fantôme de Nico, et on se dit qu’il n’y a pas de hasard : Il aura fallu quelques années au Velvet Underground, autre enfant de la Big Apple au destin chahuté, pour révolutionner le rock d’une manière éclaire. Sonic Youth, dont la carrière est née dans le chaos, aura mis vingt ans, mais son empreinte n’en est pas moins forte pour autant.
Sonic nurse, Sonic Youth (Geffen/Universal)
Tracklisting :
1 Pattern recognition
2 Unmade bed
3 Dripping dream
4 Kim Gordon and the Arthur Doyle hand cream
5 Stones
6 Dude ranch nurse
7 New Hampshire
8 Paper cup exit
9 I love you golden blue
10 Peace attack
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