Franc-tireur
Le 3 juin 2003
Devenu projet solo de Mark "E" Everett, Eels développe sans surprise le virage blues-rock amorcé sur Souljacker.
- Artiste : Eels
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Cinquième album de Eels, groupe devenu petit à petit le projet solo de Mark Everett dit E, Shootenanny ! est dans la lignée de son prédécesseur Souljacker : un rock mélodique teinté de blues qui trempe dans l’acide vitriolé de textes acerbes.
Rien de nouveau sous le soleil californien de mister E. En 2003, il se déteste toujours autant, ne croit toujours pas en son "œuvre" (il décrit Shootenanny ! comme une simple suite de chansons) et tire toujours sur tout ce qui ressemble de près ou de loin à l’establishment culturel, notamment Hollywood et la télévision. Encore une fois, il a inventé un néologisme d’un cynisme de circonstance (Shootenanny ! pouvant se traduire par Tire sur la vieille !), et prétend avoir donné ce titre à l’album de façon à "posséder un titre accrocheur qui passe bien sur MTV". Mouais...
De ces provocations là, on se passerait pourtant aisément, tant le personnage est capable de séduire lorsqu’il fait preuve d’introspection et de retenue. Lone Wolf, titre remarquable où E s’avoue à lui-même qu’il est asocial, est à l’image de ce que le bonhomme est capable de faire de mieux : des paroles percutantes, une mélodie simple soutenue par une rythmique blues-rock binaire, et une idée ou deux dans les arrangements (ici un chant puissant ponctué de falsettos dans les chœurs). Il sait également faire preuve de retenue et de maîtrise pour des ballades déchirantes (Numbered Days, où le héros de la chanson compte les jours qui lui restent pour profiter de son histoire d’amour sur le déclin). Mais son cynisme écrasant prend trop souvent le dessus et gâche le plaisir que peut éprouver l’auditeur à l’écoute de Fashion Awards ou de Dirty Girl. E donne ainsi de plus en plus l’impression de s’amuser à nos dépens, nous proposant un repas de qualité qu’il a au préalable truffé d’épices indigestes. On s’attache ainsi à la mélodie parfaitement délicate de Fashion Awards, avant de jeter un coup d’œil au texte vitriolé qui prend pour cible les ...remises de prix en tout genre. Quelle subversion !
Mais ce qui déçoit le plus, c’est que E semble avoir renoncé aux trouvailles sonores qui donnaient à Beautiful Freak et Electro-Shock Blues ce côté frais et décalé. Avec Souljacker, il était déjà revenu à un son plus direct, plus rock, prenant comme il aime à le faire le contre-pied du disque précédent. Mais ici, point de contre-pied. Le bonhomme semble résigné, et ne tente même plus de donner une unité à l’ensemble. Restent une certaine qualité d’écriture et une voix passionnante. Mais pour Le Grand Album, il faudra repasser.
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