Musique
Le 17 septembre 2002
Une étrange version planante de la country, souffrant d’une production maniérée et peu inspirée.
- Artiste : Beck
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Héros malgré lui d’une génération de paumés grâce à son tube Loser, Beck cherche maintenant son inspiration dans les grands espaces de l’Amérique profonde. Sea Change propose une étrange version planante de la country, mais souffre d’une production maniérée et peu inspirée.
En mixant avec une aisance désarmante hip-hop, country ou easy-listening dans des collages postmodernes, Beck a incarné mieux que quiconque l’esprit musical des années 90. Mais le blondinet californien, visiblement sous le coup d’une rupture, n’a plus le cœur à jouer les amuseurs ou les défricheurs sonores. Déboussolé, il choisit donc de revenir aux ambiances cotonneuses de Mutations, son chef-d’œuvre ambient-folk paru en 1998.
Nigel Godrich, aux consoles sur ce dernier album et habituellement producteur de Radiohead, a même été invité à reprendre du service sur Sea Change. Cela saute d’ailleurs aux oreilles dès l’introduction de The Golden Age qui pourrait passer pour un inédit country de OK Computer. Entourée d’une pedal-steel geignante, la voix peu assurée de Beck essaie de s’imposer dans un mur d’échos et de pianos carillonnants.
On s’attend alors à se perdre délicieusement dans les déserts balayés par des vents glacés qu’évoquent les textes, mais ce plaisir est vite contrarié par l’impression gênante de tourner en rond. Une monotonie à laquelle contribuent des accroches presque identiques et un traitement sonore répétitif, à base de cordes et de samples distordus. Ceux qui avaient connu la première version sépulcrale de It’s All in Your Mind, ballade folk disponible seulement en import, la retrouveront embarrassée d’une orchestration pop tout à fait superflue.
Beck, touche-à-tout de génie, semble ici se poser des restrictions. La seule surprise provient de la relecture du thème de Melody Nelson de Gainsbourg sur Paper Tiger, mais ce n’en ne sera plus une quand vous lirez ces lignes, tant ce clin d’œil à la pop française aura été monté en épingle par la presse avertie. Une reprise de Nana Mouskouri, autre icône avouée de Beck, n’aurait certainement pas provoqué plus de tintouin.
Avec une maîtrise de l’écriture et du chant qui lui permet maintenant de tutoyer des étoiles de la country comme Johnny Cash ou Gram Parsons, Beck est capable de produire classique sur classique. Sea Change en est presque un, mais se perd dans la recherche de la perfection sonore, en prenant ses amis versaillais de Air comme modèle. On ne peut s’empêcher de penser qu’une version enregistrée sur un banal 4-pistes aurait approché la magie de Bob Dylan sur Blood On The Tracks, grand album de rupture et de frustration.
Beck - Sea Change (Polydor) - Dans les bacs à partir du 23 septembre
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