Le 11 mars 2025


- Scénariste : Marion ACHARD>
- Dessinateur : Toni Galmés
- Collection : HISTOIRE & HISTOIRES
- Genre : Drame, Historique, Témoignage
- Editeur : Delcourt
- Famille : BD Franco-belge
- Date de sortie : 29 janvier 2025
Après la petite soeur Lisou qui a échappé à la déportation, découvrez l’aînée Mylaine, qui en est revenue...
Résumé : Durant la Seconde Guerre mondiale, la famille Veil s’est cachée dans les Alpes, mais en février 1944, les nazis les ont rattrapé. Si la benjamine Lisou est envoyée pour prévenir ses parents, la grande sœur Mylaine se sacrifie et est emmenée dans les camps...
Critique : Le premier tome de ce diptyque Quand la nuit tombe s’était intéressé à la survie chanceuse de Lisou et de ses parents, cachés dans les Alpes puis en Suisse pour échapper à la Gestapo et aux autorités françaises, grâce au sacrifice effroyable mais tellement beau de sa grande sœur Mylaine. C’est désormais d’elle et de sa survie non pas chanceuse, mais miraculeuse, car elle a dû traverser l’enfer des camps d’extermination allemands pour revenir auprès des siens, formant ainsi une famille si rare qui n’aura pas à déplorer de morts sans avoir émigrer avant la guerre. Marion Achard s’est donc faite relais dans sa famille, voulant faire parler, voulant partager ces années qui ont tant marqué, tant traumatisé, tant fait réévaluer l’inhumanité. Lisou avait donc une fin heureuse programmée, du danger et des risques, mais on comprend très vite que si Mylaine a une fin où elle ne disparaît pas, son âme sera autrement meurtrie. En effet, la déportation est d’autant plus violente qu’elle est seule, et si elle raconte qu’elle s’accroche à cette idée que les siens sont en sécurité, tous ceux qu’elle verra ne seront que de passage, la plupart fauchées par le froid et l’épuisement, le manque de nourriture ou la maladie, mais surtout par les exécutions des Allemands. Il est terriblement touchant de voir comment ce témoignage s’articule entre petite entraide et amitiés éphémères mais qui comptent tant, avec des passages de violence crûe, de scènes sordides où l’on reste une nuit dans la neige, où l’on compte trois petits pois dans un bol d’eau chaude pour se redonner une gorgée d’humour, où une kapo vous ôte tout espoir... Comme Mylaine, le lecteur se demande comment elle s’en est échappée, ce que son cerveau a dû oublier pour ne pas sombrer dans la folie, comment ces cerveaux fous ont-ils pu arriver à un tel degré de haine, ici pour des femmes et des enfants si innocents, comme à chaque ouvrage traitant des atrocités de 1939-1945.
© Delcourt / Galmés
Toujours avec justesse, avec un coup de pinceau vivant, Toni Galmés complète donc cette nuit qui tombe avec un aller (et heureusement un retour) vers l’Allemagne et la Pologne, vers ces camps qui se dressent, et que Mylaine se souvient immenses, dans une foule où personne ne se connaît vraiment, avec des changements de soldats et de directeurs. Le dessinateur apporte sans le chercher une dimension chaleureuse, à travers ce personnage de Mylaine, non pas solaire mais forte à l’intérieur, non par rayonnement mais par un cœur, un noyau qui continue de brûler. Ainsi, grâce à elle, celles qui croisent sa route peuvent acquérir une certaine aura, une petite luminosité. Les camps, les SS, les gardiennes, s’ils restent abominables, eux aussi arrivent à ne pas être maléfiques, sans faire oublier leur inhumanité, mais en la racontant avec un dessin qui peut toucher tous les publics.
© Delcourt / Galmés
Dans une époque et une actualité qui ramène hélas des idées et des discours qui paraissent éteints, Quand la nuit tombe : Mylaine rappelle que des hommes ont fait subir le pire à d’autres humains, et si Mylaine a survécu, c’est pour le raconter.
112 pages – 22,50 €