Cher disparu
Le 24 novembre 2010
Une désopilante comédie allemande de 1915, génialement interprétée et mise en scène par un Lubitsch de 23 ans.


- Réalisateur : Ernst Lubitsch
- Acteurs : Ernst Lubitsch, Luise Schenrich, Helene Voß , Julius Falkenstein, Lanchen Voss
- Genre : Comédie
- Nationalité : Allemand
- Durée : 40 mn
- Titre original : Als ich tot war / Wo ist mein Schatz?
- Plus d'informations : http://cineminuit.fr.over-blog.com/...

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Une désopilante comédie allemande de 1915, génialement interprétée et mise en scène par un Lubitsch de 23 ans.
L’argument :L’argument :Ernst part rejoindre ses amis pour une partie d’échecs. À son retour, il est chassé. Il se fait passer pour mort et revient chez lui comme domestique, dans une maison désormais tenue par sa belle-mère...
Notre avis : Produite par Paul Davidson pour la PAGU - (Projektions AG Union) de Berlin cette comédie en trois actes et 1070 mètres de pellicule (environ 55 minutes), connue aussi sous le titre Wo ist mein Schatz ? - Où est mon chéri ? est passée à la censure en décembre 1915 et sortie le 27 février 1916. Il n’en subsiste qu’une copie incomplète.
Les films de Carl Wilhelm Die Firma heiratet et Der stolz der Firma avaient rendu célèbre le jeune acteur Ernst Lubitsch, membre de la prestigieuse troupe de Max Rheinhardt. Il y créait un personnage de commis juif débrouillard, faisant fortune dans le monde de la confection, dont il fournira de multiples variantes jusqu’à Meyer aus Berlin (1918). Bien qu’abordant très vite la mise en scène, il continuera de jouer régulièrement dans ses films ou ceux des autres (Fräulein Piccolo de Franz Hofer), couronnant sa carrière d’acteur par une ultime reprise de son rôle de bouffon dans l’adaptation luxueuse du conte oriental Sumurun qu’il réalisa en 1920.
Dans Als ich tot war, Ernst est un homme d’affaires arrivé à qui le sens du commerce ne fait pas oublier les plaisirs de l’existence, ce qui provoque une grave crise conjugale attisée par sa belle-mère. Mais l’ingéniosité de notre homme lui permettra de rétablir la situation à son avantage.
La farce repose sur des ressorts éprouvés : déguisements, quiproquos, caricature. Le portrait de la belle-mère est particulièrement féroce, mais la servante qui fait des avances au nouveau domestique n’est pas piquée des hannetons non plus. Tous les acteurs s’en donnent d’ailleurs à coeur-joie, chargeant leur rôle avec une bonne humeur auquel le spectateur peut difficilement résister.
Lubitsch lui-même en fait des tonnes. Il faut avoir vu ses mimiques insensées lorsque, caché, il assiste à la cour faite à sa veuve par un prétendant ridicule (et intéressé). Un véritable génie de la pantomime se révèle ici, lui permettant de figurer en bonne place dans la liste, fort longue, des grands acteurs burlesques de cette période de transition entre le cinéma des attractions et le cinéma classique, plus assujetti à la narration.
Le très improbable postulat de départ est assumé crânement et confère même à l’ensemble une véritable étrangeté, creusant le comique de situation d’un soupçon d’inquiétude. Les scènes, fort belles, filmées dans les rues de Berlin contribuent à cette impression, un calme inhabituel semblant rêgner dans la ville en cette période de guerre.
Quant à la misogynie et à l’antisémitisme qui pointent leur nez assez fréquemment, Lubitsch (juif lui-même, rappelons-le, et chantre inspiré de la gent féminine) les utilise sans pincettes et les neutralise, pourrait-on dire, par excès.
Le génie de la mise-en-scène de l’auteur de Wenn vier dasselbe tun ou de Ich möchte kein Mann sein est déjà là, tout entier, dans cette oeuvre de jeunesse, l’élégance et la netteté du trait sublimant aisément la grossièreté de la farce.
Bien que privée de certaines scènes, cette désopilante comédie procure toujours un plaisir sans mélange.