Los olvidados
Le 8 février 2009
Un documentaire universel sur la jeunesse démunie au Brésil. La démarche est noble mais le film n’évite pas le pathos politiquement correct.
- Réalisateurs : Jean-Pierre Duret - Andrea Santana
- Genre : Documentaire
- Nationalité : Français, Brésilien
- Distributeur : Pierre Grise Distribution
- Durée : 1h30mn
- Date de sortie : 4 février 2009
- Festival : Festival de Venise 2008
L'a vu
Veut le voir
L’argument : Brésil. Nordeste. Une immense station-service au milieu d’une terre brulée, traversée par une route sans fin. Cocada et Nego ont 13 et 14 ans. Cocada a une rêve, devenir chauffeur routier. Il dort dans une cabine de camion et, la journée, il rend service et fait des petits boulots. Son père est mort assassiné et il s’est trouvé un père de substitution, Mineiro. Un routier qui prend le temps de lui parler et de le soutenir quand la tentation de l’argent mal acquis se fait trop forte. Nego, lui, vit dans une favela, entouré d’une innombrable fratrie. Après le travail des champs, sa mère voudrait qu’il aille à l’école pour qu’il ait une éducation mais Nego veut se sortir de là, gagner de l’argent. Le soir, il rôde à la station, fasciné par les vitrines allumées, les commerces qui vendent de tout, la nourriture abondante. Avec son copain Cocada, ils regardent le mouvement incessant des camions et des voyageurs. Avec cette singulière maturité qu’on acquiert trop tôt dans l’adversité, ils s’interrogent sur leur identité et leur avenir. Leur seule perspective : une route vers Sao Paulo, vers un ailleurs.
- Copyright Pierre Grise Distribution
Notre avis : On est partagé face à ce documentaire singulier mais dérangeant. Le grand mérite des deux auteurs est d’avoir placé la caméra dans un cadre plutôt réservé à la fiction. De Los Olvidados aux récents Khamsa et Slumdog millionnaire, nombreux sont les récits qui ont su, avec plus ou moins de bonheur, capter les drames de l’enfance livrée à elle-même. Mais rares ont été les incursions dans le genre du documentaire. En suivant les journées de ces deux pré-adolescents, non scolarisés, désaffiliés sur le plan familial et contraints d’accepter des petits boulots moyennant une aumône, Duret et Santana pointent les dysfonctionnements du système de protection sociale de maints pays émergents, à une époque où on leur a demandé un effort croissant pour libéraliser leurs économies. Mais le film ne se réduit pas à un support documentaire pour soirée altermondialiste. Au-delà de sa portée humaniste, l’œuvre établit une proximité physique de la caméra avec les protagonistes et leur entourage, qui lui donne la force de l’univers de Pialat dans L’Enfance nue ou de Truffaut dans Les 400 coups.
Les situations sont évidemment équivoques. On sait que le documentaire est par nature « documenteur » et que les propos et situations concernant les personnes filmées sont influencés par la présence de ce corps étranger que constitue une caméra. Contrairement à Depardon, les réalisateurs mettent en scène un simulacre de récit où l’on peut penser que les individus jouent leur propre rôle (démarche similaire à celle des récents Je veux voir et L’Apprenti). De là à penser que Duret et Santana ont manipulé ces enfants et leur famille pour créer des situations de pathos et de sensiblerie, il n’y a qu’un pas que l’on ne franchira pas, tant on est convaincu de la sincérité de leur dispositif. On peut toutefois être agacé par ces gros plans insistants, un misérabilisme ambiant (les vues sur l’animal agonisant) et l’on a parfois le sentiment d’être face à un produit culturel incarnant la bonne conscience occidentale. Sans aller jusqu’à faire l’analogie avec les actions des dames patronnesses, on peut juger ambigu le rapport des cinéastes avec « leurs pauvres ». Coproduit par Jamel Debbouze, le film est distribué dans 18 salles, certaines grandes villes l’ayant préféré au documentaire de Terence Davies, sorti la même semaine.
Galerie photos
Le choix du rédacteur
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.