Le 9 février 2021
Une immersion dans les banlieues, loin des clichés habituels. Un ouvrage d’utilité publique.
- Auteurs : Adil Jazouli, Eric Briat, Najat Azmy
- Editeur : Parenthèses, ANCT -Agence nationale de cohésion des territoires
- Plus d'informations : Site de l’éditeur
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Résumé : Des quartiers populaires, l’habitude est prise de ne montrer que les failles, les tensions, les échecs… De décennie en décennie, articles, documentaires, études sociologiques en ont tracé insidieusement un tableau sans nuance, amalgame anxiogène de victimisation et de stigmatisation. Prendre à rebours cette vision réductrice pour restituer à ces quartiers et à leurs habitants leur relief, leur diversité, leur vitalité, telle est l’entreprise de cet ouvrage. Grâce à un travail photographique de grande ampleur, qui montre la vérité nue de ces lieux marginalisés, et au recueil de récits de vie à la fois lucides et sincères, c’est un visage méconnu des « quartiers » qui émerge. À travers cette galerie de portraits, se dévoile une banlieue en éveil, bouillonnante d’espoirs, d’initiatives et de combats, qui lutte au quotidien contre les a priori qui l’enferment. Une banlieue qui, par-dessus tout, se bat pour, qu’enfin, ses habitants soient reconnus comme des citoyens à part entière.
Critique : Cet ouvrage est d’utilité publique. Au-delà des réactions que ceux qui n’y vivent pas ont vis-à-vis des phénomènes auxquels sont associées les banlieues, il propose d’écouter ceux qui s’y engagent, y sont plongés au quotidien et sont légitimes pour en parler. C’est cette vérité-là que les agents publics de l’administration centrale ont voulu recueillir, en allant à la rencontre de personnalités emblématiques de la vie en quartiers populaires. Au fil de trente-trois portraits, cette galerie permet d’acquérir une autre perception de ces périphéries urbaines. Le point de vue des auteurs de l’ouvrage contraste radicalement avec les attentions médiatiques généralement stigmatisantes et anxiogènes qui renforcent ce malaise français. Chacun, à sa manière, avec ses mots et ses émotions exprime combien la question sociale, urbaine et politique des banlieues est en perpétuelle effervescence. Le lecteur peut voir dans ces territoires une sorte de laboratoire du vivre ensemble, de l’avenir de la solidarité multiculturelle, le siège d’une indispensable réactivation de la promesse d’égalité des chances et de fraternité citoyenne.
Par ce tour de France des périphéries urbaines, l’ouvrage offre autant de récits personnels que de panoramas sociaux. Ce qu’ils expriment est fait d’espoir et de découragements, autant de doutes que d’ambitions. Cette importance du témoignage de ceux dont la parole est peu entendue et qui doivent affronter beaucoup de préjugés paresseux trouve ici toute sa dimension. En plein débat sur le sens à donner à un terme aussi stigmatisant que « séparatisme », la portée de ces témoignages est immense. Les images de ces paysages urbains et de ces portraits en situation réconcilient l’acteur social avec son environnement. La plupart exprime l’importance de rester dans leur quartier, de s’y investir, de se battre pour faire que chacun y trouve sa juste place. Ces figures de l’engagement prennent des responsabilités officielles, sont bénévoles, ne peuvent concevoir leurs existences sans entraide et générosité. Cette fraternité en actes est généralement invisible. Le livre cherche à réparer une injustice de représentations. Cette volonté de rectification et de réparations concerne tout le monde. Ainsi, Anoueche à Nîmes veut démontrer que la police, « ce n’est pas que de la répression. » Séverine, quant à elle, ne peut supporter les clichés : « L’assistanat, ça ne passe plus. »
Chacun a ses raisons d’espérer. A Alès, Joël s’est ouvert au monde en découvrant les plaisirs de la lecture en prison. Celle-ci l’a changé pour le meilleur et, après avoir purgé sa peine, il a transmis cette passion du livre autour de lui. Souvent, la création d’un conseil citoyen a été à l’origine de vocations pour améliorer le quotidien dans ses quartiers populaires. Cela a été un déclic. C’est aussi le cas de Sabrina, à Vigneux-sur-Seine, qui intervient dans un conseil de discipline pour lutter contre les discriminations que certains jeunes subissent. Elle se reconnaît un peu dans ce que vivent des jeunes dans un quartier qui mêlent dix-sept nationalités. Elle est consciente qu’il s’agit d’un engagement à vie.
Ces témoignages se combinent pour étayer une certitude : les problèmes que traversent ces quartiers existent. Souvent, ils se cumulent. Les solutions ne peuvent venir totalement du sommet de l’Etat. Elles ne peuvent non plus venir que de ces héros du quotidien. La solution ne peut que résulter d’un dialogue et d’une prise en compte de ces paroles souvent inaudibles ou malmenées. Créer les espaces de ces dialogues, de ces partages, de ces rencontres dont l’ouvrage est porteur s’avère indispensable. Les photographies prises de ces quartiers deviennent des prétextes à changer notre regard : les évasions sur lesquelles elles ouvrent modifient nos angles et nos perspectives. On n’y voit plus seulement des tours et du béton. Lasse, Anne-Sophie à Saint-Brieuc regrette : « On ne montre que le mauvais côté de ces quartiers-là. » Pour cela, plusieurs mots d’ordre sont lancés au fil des pages : il faut changer d’approche, cesser l’occupationnel, se plonger dans l’éducatif. Nelson Mandela est cité : « L’éducation est l’arme la plus puissante que nous pouvons utiliser pour changer le monde. »
Collection : Photographies
240 × 300 mm, 304 p. relié, avec 264 photographies, 2020.
Prix : 29 €
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