Le 8 février 2018


- Scénaristes : Sente, Yves>, Steve Cuzor>
- Collection : Aire Libre
- Genre : Historique
- Editeur : Dupuis
- Famille : BD Franco-belge
- Date de sortie : 19 janvier 2018
Lorsqu’il s’est engagé en 1944 pour combattre les nazis, le soldat Lincoln pensait atterrir sur le front français. Mais les soldats de couleur de l’armée américaine ne sont pas autorisés à avoir l’étoffe des héros. Une découverte de sa sœur, à savoir le journal d’une domestique noire de 1776, va lui permettre de finalement rejoindre les combats, à la recherche d’une relique perdue mais qui pourrait faire tomber les lois de ségrégation.
Une œuvre magistrale, qui vaut ses cinq étoiles.
Cette bande dessinée, qui traite du racisme et de la ségrégation, le fait d’une manière à la fois historique et mythique. Sorte de mélange entre Monument Men et la Couleur des Sentiments, Cinq branches de coton noir a tout d’un film, qui pourrait être aussi bien indépendant que hollywoodien. De l’action, de la recherche historique, du patriotisme, de la sociologie... chaque force se répand et se croise dans un récit qui lui aussi joue sur les narrations et les époques. L’ouverture d’un journal, authentique, est chevauché par la correspondance entre le frère et la sœur, tous deux militants pour un pays plus juste. Les reproches, les menaces et les offenses viennent en effet davantage de leurs compatriotes que des Allemands ou Japonais, contre qui le pays est pourtant en guerre. Autour du drapeau américain, créé à Philadelphie, va se nouer des destins. De fait, si une petite accroche typique du cinéma d’outre-atlantique avait prévenu « Cette bande dessinée est inspirée de faits réels », le lecteur n’aurait eu aucun mal à le croire, tant cette œuvre paraît authentique et son histoire réaliste.
© Dupuis
Bien entendu, le dessin joue également son rôle de vecteur des émotions et du réalisme ambiant. Le noir semble imprimé, véritable encre qui viendrait se placer sur des fonds tantôt rouges, bleus ou verts. Le blanc est absent, évité, parce qu’il occupe en vérité tout l’espace à cette époque. Le jais, l’ébène sera donc à l’honneur, les couleurs venant apporter des tonalités différentes par planche, par double page, par chapitre, pour éviter une œuvre en noir et blanc (même si le volume en tirage limité semble lui aussi magnifique par son contraste). D’un sujet inédit et d’actualité, le duo a su produire une œuvre magistrale, que le graphisme transcende. Il serait ainsi aisé de dire que déjà la couverture annonçait la couleur : une œuvre de lutte, de larmes et de liberté.
© Dupuis
Jetant un regard en même temps aventureux et sociologique sur l’Amérique, depuis son indépendance jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, le duo Sente/Cuzor a parfaitement saisi l’esprit américain, mélange de patriotisme exacerbé et de honte refoulée. On leur souhaite désormais qu’un producteur tombe sur ce bijou.
176 pages - 24€