Le 10 juin 2023
Ce film oublié de Jean-Paul Le Chanois, hymne à la bienveillance éducative, qui privilégie les ruptures de ton, mérite une deuxième chance.
- Réalisateur : Jean-Paul Le Chanois
- Acteurs : Pierre Larquey, Daniel Ivernel, Silvia Monfort, Germaine de France, Dominique Davray, Hubert de Lapparent, Henri Coutet, Bernard Musson, Marc Eyraud, François Guérin, Jacques Mauclair, Françoise Bertin, Colette Régis, Juliette Faber, Paul Faivre, Luce Fabiole, Georges Lannes, Charles Bouillaud, Aline Bertrand, Christian Brocard, Bernard Noël, Françoise Prévost, Christian Fourcade , Louis Velle, Paulette Frantz
- Genre : Comédie dramatique, Teen movie, Drame social
- Nationalité : Français
- Distributeur : Francinor
- Durée : 1h41mn
- Date de sortie : 23 août 1961
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Résumé : Simone et Jean viennent de se marier et, à la recherche d’un logement en région parisienne, ont la chance de trouver une maison avec jardin dans un quartier résidentiel de banlieue. Le jeune couple attend son premier enfant et va notamment se mettre à observer comment les parents des familles voisines élèvent les leurs.
Critique : Jean-Paul Le Chanois avait commencé sa carrière dans les années 1930, membre du groupe Octobre. Sous l’Occupation, ce militant communiste de confession juive avait travaillé en tant que scénariste, sous un prête-nom, pour la firme allemande Continental. Réalisateur traditionnel attaché à des sujets sociaux, il a évoqué les pédagogies innovantes (L’école buissonnière, 1949), la monoparentalité (Sans laisser d’adresse, 1951, Ours d’or à Berlin), ou l’accouchement sans douleur (Le cas du docteur Laurent, 1957). Il est aussi l’auteur d’une version des Misérables (1958), au succès retentissant, mais terriblement académique. Le Chanois qui devint l’une des cibles des laudateurs de la Nouvelle Vague, au même titre que Cayatte ou Autant-Lara, entreprenait avec Par-dessus le mur, dont il a également écrit le scénario, l’un de ses projets les plus personnels. Le thème de société abordé est celui du mal-être adolescent, et de la délinquance qui peut en résulter. Le cinéaste insiste sur le regard porté par les adultes et les effets qu’il suscite. Pour parvenir à sa démonstration (car il s’agit bien d’un film à thèse, avec les écueils inhérents au genre), Le Chanois place au centre de la narration un jeune couple de la classe moyenne, Jean et Simone, installé depuis peu dans le quartier résidentiel d’une banlieue parisienne. Ils vivent un bonheur paisible et attendent un bébé. Ils observent les relations qu’entretiennent les voisins avec leurs enfants, de façon à pouvoir être des parents éclairés.
- © 1961 Tadié Cinéma. Tous droits réservés.
Si la trame humaniste ne brille pas par son originalité, il faut la replacer dans le contexte des années 60, qui virent le dernier souffle d’une société rigide, avant les bouleversements de mai 68. Le métrage a aussi le mérite de traiter la question des banlieues naissantes (Jean et Simone visitant des tours de HLM en construction, un ado fugueur dont on suspecte qu’il a rejoint des jeunes de la cité). Le film vaut surtout par ces ruptures de ton (on passe d’une comédie du couple à la Becker au drame social aux accents néoréalistes) et sa structure en double flash-back, qui casse la linéarité d’un récit accordant un poids aux digressions (la scène avec le voisin sourd, digne de Tati). On regrettera par contre le jeu théâtral et la diction nasillarde de nombreux seconds rôles, dont certains incarnent en outre des figures stéréotypées du « cinéma de qualité » de l’époque, parfois méprisantes et croquées avec dédain : beaux-parents étriqués, notables hypocrites, instituteur malveillant… Et ce par contraste avec les personnages interprétés par les deux acteurs principaux, admirables. Silvia Monfort, que Le Chanois avait déjà dirigée, est sublime et nuancée, et d’une beauté troublante. Elle trouvait ici son meilleur rôle à l’écran depuis La Pointe Courte de Varda, et l’on peut regretter que le cinéma français n’ait pas davantage utilisé le talent de cette tragédienne. À ses côtés, François Guérin, qui fut le jeune premier des Yeux sans visage de Franju, ne démérite pas. À mi-chemin entre le caractère novateur des 400 coups de Truffaut et l’angélisme édifiant de Chiens perdus sans collier de Delannoy, Par-dessus les murs (qui a pour titre alternatif Les enfants du bonheur) a droit au final à une deuxième chance. Car le film était passé inaperçu à sa sortie et a été peu diffusé par la suite. Jean-Paul Le Chanois terminera sa carrière avec des films purement commerciaux (dont deux star véhicles pour Gabin), avant de s’orienter vers la télévision et de se retirer en 1976.
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