Le 17 janvier 2020
Le portrait d’une femme d’aujourd’hui, courageuse et puissante, que le quotidien empêche de vivre libre.
- Auteur : Nina Bouraoui
- Editeur : Editions Jean-Claude Lattès
- Genre : Roman & fiction
- Nationalité : France
- Date de sortie : 2 janvier 2020
- Plus d'informations : Le site officiel
- Festival : Rentrée littéraire 2020
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Résumé : Sylvie est une femme banale, modeste, ponctuelle, solide, bonne camarade, une femme simple, sur qui on peut compter. Lorsque son mari l’a quittée, elle n’a rien dit, elle n’a pas pleuré, elle a essayé de faire comme si tout allait bien, d’élever ses fils, d’occuper sa place dans ce lit devenu trop grand pour elle. Lorsque son patron lui a demandé de faire des heures supplémentaires, de surveiller les autres salariés, elle n’a pas protesté : elle a agi comme les autres l’espéraient. Jusqu’à ce matin de novembre où cette violence du monde, des autres, sa solitude, l’injustice se sont imposées à elle. En une nuit, elle détruit tout. Ce qu’elle fait est condamnable, passable de poursuite, d’un emprisonnement mais le temps de cette révolte Sylvie se sent vivante. Elle renaît.
Notre avis : Elle court partout, Sylvie. Elle n’a le temps de rien. Le travail, les enfants, la maison, elle gère tout. Elle aime « l’effort, la rigueur, la ponctualité, l’attention, la répétition aussi ». Ça la rassure : elle sait qu’ensuite, elle pourra être tranquille. C’est seulement son « devoir » accompli qu’elle s’octroie, parfois, un moment à elle devant la beauté du spectacle de la nature pour se retrouver, s’abandonner.
« Je m’appelle Sylvie Meyer. J’ai cinquante-trois ans. Je suis mère de deux enfants. Je suis séparée de mon mari depuis un an. Je travaille à la Cagex, une entreprise de caoutchouc. Je dirige la section des ajustements. Je n’ai aucun antécédent judiciaire. »
Cela faisait longtemps qu’elle n’avait plus de temps pour son mari, Sylvie. Et lorsqu’il est parti, elle n’a rien dit. Manque d’amour, et de désir aussi. Vingt ans qu’elle contrôle des machines. Elle y passe tellement de temps, ne partant qu’une fois le travail terminé. Son travail, c’est un peu son amant. Lorsque son patron lui demande en plus de contrôler ses collègues, ses « abeilles » comme elle les appelle affectueusement, en vue d’un plan social, elle ne dit rien. Il lui tresse des lauriers : il a besoin d’elle, il doit licencier, c’est comme ça, il n’y peut rien. Elle accepte poliment, mécaniquement, en bon petit robot corvéable à merci. La fatigue ? Elle la nie. Et se plaindre est une perte de temps. Elle observe donc, note, dissèque, épie. Elle y prend goût aussi, aux flatteries, au pouvoir. Mais elle trahit.
C’est pour ce petit supplément d’âme, tapi encore au fond d’elle-même, que Sylvie réagit. Elle va commettre un délit : pour la morale, pour la nature immense et pure, pour toutes les femmes aussi.
Otages est un texte intense et brut, qui se lit d’une traite. Après Tous les hommes désirent naturellement savoir, Nina Bouraoui, qui a déjà beaucoup écrit sur toutes les oppressions, donne ici la parole à une femme normale, travailleuse acharnée et mère aimante. Sylvie entravée, ligotée, n’aspire qu’à la liberté, retrouver le désir, celui qui fait vibrer et se sentir exister. Ce très beau roman s’est d’abord écrit comme pièce de théâtre en 2015, « en hommage aux otages économiques et amoureux que nous sommes ». Il n’a pas fini de résonner dans le bruit assourdissant de nos vies actuelles.
Nina Bouraoui - Otages
JC Lattès
151 pages
20.5 x 13.1 x 1.4 cm
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