Marching band - la critique

Drôle, rythmé et engagé, le premier documentaire signé Claude Miller est une réussite.

L ’argument : Un documentaire sur les marching bands, ces orchestres étudiants affiliés à des universités.

Notre avis : D’entrée de jeu Claude Miller ne cherche pas à se départir de son point de vue politique sur les élections présidentielles américaines. Immédiatement perceptible, son enthousiasme à l’égard de Barack Obama est patent et communicatif. Le cinéaste, accompagné de deux jeunes collaborateurs, a posé ses bagages en Virginie, pendant les trois mois qui ont précédé l’élection du premier président afro-américain des États-Unis d’Amérique. Sa caméra en main, il immortalise les répétitions des marching bands de deux grandes universités ainsi que les joyeux débats politiques des étudiants.

© Les Films du Losange

Les universités n’ont pas été choisies au hasard : il s’agit de University of Virginia (UVA) et de Virginia State University (VSU). Elles représentent symboliquement deux communautés importantes des États-Unis que sont respectivement la population blanche aisée et les afro-américains. Par ailleurs, la Virginie est l’un des états dont les scrutins ont été le plus longuement recomptés lors de la réélection de Georges W. Bush en 2004. Ces nouvelles élections se devaient d’être limpides et étaient ardemment attendues, notamment par les plus jeunes.
En s’intéressant à des étudiants engagés dans la fanfare de leur université, Miller fait un choix judicieux : ces jeunes sont passionnés et se confient aisément à la caméra. Leurs commentaires argumentés rendent le documentaire constructif et particulièrement plaisant à suivre. Le cinéaste laisse les jeunes s’exprimer librement et l’on constate rapidement que la Virginie qui votait pour le parti de l’Eléphant depuis 1968 est en pleine mutation politique. Le choix de Barack Obama apparait comme une dominante dans l’une et l’autre des universités. C’est dans ce rapprochement idéologique que le sujet initial de Claude Miller - les marching bands - prend corps et sens. En effet, ces fanfares aux tendances musicales distinctes répètent chacune de leurs côtés et ne se rencontrent que pour s’affronter lors des matchs de football. Croire, même un peu naïvement, en un renouveau politique et social, fédère leur amour commun de la musique. Le temps d’une campagne électorale, ces étudiants ne sont plus en compétition et Claude Miller marque cette période euphorique et presque hors du temps sur pellicule.

© Les Films du Losange

Si Marching Band rend compte du premier engagement politique d’une génération, il est aussi le premier film documentaire que réalise Claude Miller après quatorze œuvres de fiction. Le réalisateur utilise sa maîtrise du montage pour rendre son quinzième opus le plus rythmé possible et crée une cohérence et une logique parfaite entre chacun des plans. Le cinéaste a tout filmé, sa caméra s’est faufilée dans tous les recoins des lieux de vie des musiciens ; il a ainsi réussi à saisir de nombreux détails. On retrouve dans Marching Band la poésie et la singularité plastique de La chambre des magiciennes. Ce long-métrage réalisé en 2000, avait été tourné avec deux caméras mini-DV, donnant au film un degré de réalisme et de proximité avec les personnages rarement atteint dans une fiction. Intégré aux fanfares, le cinéaste partage le quotidien des étudiants et saisit les instants où ceux-ci oublient la présence de sa caméra et se révèlent. C’est décidément au plus proche de la réalité et empreint d’un lyrisme qui lui est propre que Claude Miller est le meilleur : avec Marching band, il prouve encore une fois la pluralité de son talent et son ouverture sur la multiplicité des possibles cinématographiques.

© Les Films du Losange

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