Ma vie sans moi - la critique

Une jeune femme condamnée à mourir dresse la liste des dix dernières choses à faire. Une petite leçon d’humanité...

L’argument : Anne, vingt-trois ans, mène une vie sans grand relief. Elle habite dans une roulotte placée dans le jardin de sa mère avec ses deux petites filles et un mari au chômage (qui est aussi le seul homme qu’elle ait jamais connu). Pour nourrir sa petite famille, Anne fait des ménages la nuit. Un beau jour, elle est prise d’un malaise. A l’hôpital, le docteur lui annonce que ses jours sont comptés. La jeune femme décide de ne rien dire à ses proches et dresse la liste des dix dernières choses à faire avant de mourir.

Notre avis : "Dire à mes filles que je les aime... plusieurs fois par jour, enregistrer des messages d’anniversaire pour mes filles, jusqu’à leurs dix-huit ans, faire l’amour avec d’autres hommes pour voir ce que ça fait, aller voir mon père en prison, me faire poser de faux ongles... et changer de coiffure..." Ma vie sans moi c’est d’abord la petite leçon d’humanité qu’Anne griffonne sur son cahier. Et ces dix commandements-là en valent bien d’autres.
Adapté d’une nouvelle de Nanci Icincaid, Ma vie sans moi part d’un scénario risqué tant son pouvoir dramatique recèle les pièges du mélodrame mielleux. Fort heureusement, Isabel Coixet évite de tomber dans le sentimentalisme vaseux grâce à une réalisation simple, efficace et souvent subtile. La réalisatrice aborde le thème de la mort avec pudeur sans sombrer dans le sensationnel. Rationnellement, son personnage central prépare ses proches à la vie sans elle. Comme une simple transition.
La cinéaste a également su offrir à ses acteurs des rôles taillés sur mesure. Sarah Polley, qu’on a vue dans l’excellent Exotica d’Atom Egoyan, rend le personnage profondément humain, courageux et jamais larmoyant. Accompagnée de quelques portraits de femmes savoureux comme Maria de Medeiros en surprenante coiffeuse, niaisement fan de Milli Vanilli ou la collègue de travail obsédée par son poids, la réalisatrice s’offre non sans humour un clin d’œil à "ces femmes un peu perdues, à la recherche d’un petit quelque chose d’insignifiant ou de trivial auquel s’accrocher".
Nourri de ces petits riens pleins de sensibilité et de compassion, Ma vie sans moi sonne comme une chanson triste. Mais une belle, au regard altruiste et pudique.

Coup d’œil : Ma vie sans moi est produit par El Deseo, la société créée en 1985 par Pedro Almodovar et son frère Augustin. On lui doit notamment tous les films du maître depuis cette période, de La loi du désir (1985) à Parle avec elle (2000). En 1992, El Deseo décide de soutenir des projets d’autre réalisateurs comme Alex de la Iglesia (Accion mutante, 1992) ou encore Guillermo del Toro (L’échine du diable, 2000). Isabel Coixet est la cinquième réalisatrice à être produite par cette bouillonnante société de production hispanique.