Le 30 octobre 2022
Sous ses apparences de divertissement policier élégant, une œuvre sombre et désabusée, féroce charge de Louis Malle contre la bourgeoisie.
- Réalisateur : Louis Malle
- Acteurs : Bernadette Lafont, Marie Dubois, Geneviève Bujold, Jean-Paul Belmondo, Marlène Jobert, Marc Dudicourt, Françoise Fabian, Jean-Luc Bideau, Charles Denner, Julien Guiomar, Pierre Étaix, Paul Le Person, Martine Sarcey, Roger Crouzet, Nane Germon, Jean Champion, Nicole Chollet, Jacques Debary, Monique Mélinand, Christian Lude, Jacqueline Staup, Gabriel Gobin
- Genre : Comédie dramatique, Policier
- Nationalité : Français
- Distributeur : Les Artistes Associés, Malavida Films
- Durée : 2h02mn
- Reprise: 9 novembre 2022
- Date de sortie : 12 février 1967
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Malavida propose au cinéma le 9 novembre 2022 la rétrospective « Louis Malle, gentleman provocateur partie 1 » qui réunit six restaurations Gaumont : Ascenseur pour l’échafaud, Les amants, Le feu follet, Viva Maria !, Le voleur et Le souffle au cœur.
Résumé : 1890. Une nuit, Georges Randa décide de revenir sur sa carrière de voleur. Orphelin sous la tutelle de son oncle, il revient à Paris, où il pense épouser Charlotte, sa cousine. Ne l’attendent que ses désillusions : l’oncle a détourné sa fortune et sa cousine est promise à un autre. Par dépit et par vengeance, il vole des bijoux et s’enfuit. Georges rencontre l’abbé La Margelle qui dirige une bande de truands, à Bruxelles. Il devient rapidement une figure importante des milieux interlopes.
Critique : Après Viva Maria !, triomphe du box-office porté par BB et Jeanne Moreau, Louis Malle découvrit le roman Le voleur de Georges Darien, écrivain libertaire adulé des surréalistes. Le cinéaste eut le coup de foudre pour ce livre qu’il souhaita adapter au cinéma, toujours pour la société Nouvelles Éditions de Films. En fait, Malle (également coproducteur) s’est entouré d’une partie de l’équipe artistique de Viva Maria !, dont Henri Decae pour la photographie et Jean-Claude Carrière pour la coécriture du scénario, tandis que Daniel Boulanger (qui n’avait jamais collaboré avec le réalisateur) fut chargé des dialogues. L’apport de ce dernier (ainsi que la présence de Jean-Paul Belmondo en tête d’affiche), pouvaient raviver par ailleurs le souvenir de Cartouche et L’homme de Rio de Philippe de Broca, réussites artistiques et commerciales de la comédie d’aventures hexagonale. Il n’en fallut pas plus à certains pour décréter que l’auteur de Zazie dans le métro devait être définitivement classé parmi les faiseurs de la « qualité française » à costumes et à stars, lui qui avait été assimilé (à tort ?) au courant de la Nouvelle Vague. Ces reproches semblent rétrospectivement infondés, et Le voleur apparaît avec le recul comme l’une des grandes réussites personnelles de son auteur.
- © Malavida, Gaumont
On retrouve certes le soin technique, un souci de précision dans la reconstitution et la charge sociale corrosive qui caractérisèrent un certain « cinéma de scénariste » des années 1940 et 50 (celui d’Aurenche et Bost pour Autant-Lara), et qu’un Bertrand Tavernier revisitera dans des réussites comme Le juge et l’assassin. Mais ces films portent aussi la griffe de leurs réalisateurs et l’on ne saurait réduire Malle à l’appartenance à un courant ou une chapelle. Le voleur est en fait passionnant dans sa description du parcours d’un jeune homme de bonne famille qui avait tout pour réussir dans la société bourgeoise et s’en trouve exclu en raison de la cupidité et du cynisme de son oncle. Le cambriolage des demeures de la haute société sera d’abord le fruit d’une vengeance, avant de devenir une raison de vivre. La déviance de Georges Randal fait ici écho à celles de Julien Tavernier dans Ascenseur pour l’échafaud et Maria I dans Viva Maria !, quand son comportement est lié à un concours de circonstances, à l’instar de lui du jeune agent de la Gestapo dans Lacombe Lucien. Et comme ce dernier, Randal n’agit pas par conviction idéologique mais pulsion personnelle. Il préfère d’ailleurs opérer en solo, malgré ses liens avec un abbé arnaqueur (Julien Guiomar) et son respect pour l’anarchiste Cannonier (Charles Denner).
- © Malavida, Gaumont
La charge antibourgeoise de Louis Malle est pourtant bien réelle, et le cinéaste cible la bourgeoisie financière, après avoir réglé ses comptes avec la bourgeoisie intellectuelle dans Le feu follet. C’est d’ailleurs de ce film que se rapproche le plus Le voleur, malgré leurs différences de ton, forme et budget, d’autant plus que le nihilisme désabusé du personnage de Maurice Ronet se retrouve dans l’individualisme détaché de Randal, et que l’addiction pour le vol se substitue à celle pour l’alcool. Il faut souligner ici le jeu sans effets et remarquable de Jean-Paul Belmondo, dont le ton grave contribue à la noirceur progressive d’un récit qui semblait au départ avoir les attributs de la comédie policière. L’acteur est entouré d’une distribution sans failles, de Marie Dubois en aventurière bourgeoise à Paul Le Person en perceur de coffres-forts, en passant par Geneviève Bujold en fausse ingénue ou Martine Sarcey en épouse de député frivole.
- © Malavida, Gaumont
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