La folie en grandeur
Le 6 août 2023
Troisième collaboration de Bertrand Tavernier et Philippe Noiret, ce récit inspiré d’un fait divers juridique est une réussite du cinéma français des années 70.
- Réalisateur : Bertrand Tavernier
- Acteurs : Philippe Noiret, Jean-Claude Brialy, Daniel Russo, Gérard Jugnot, Michel Galabru, Renée Faure, Didier Haudepin, Jean-Roger Caussimon, Jean-Pierre Sentier, Liza Braconnier , Monique Chaumette, Michel Fortin, Arlette Bonnard, Yves Robert, Cécile Vassort, Jean Bretonnière, Aude Landry, René Morard
- Genre : Drame, Historique, Drame historique
- Nationalité : Français
- Distributeur : Universal - StudioCanal, Tamasa Distribution , Fox Lira
- Durée : 2h05mn
- Date télé : 9 mars 2024 20:50
- Chaîne : Ciné+ Classic
- Reprise: 15 février 2023
- Date de sortie : 10 mars 1976
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– Reprise en version restaurée : 15 février 2023
Résumé : Fin du XIXe siècle. Joseph Bouvier est révoqué de l’armée à cause de ses excès de violence. Suite à ce renvoi, l’homme s’attaque à sa fiancée et tente de se suicider, en vain. Après un séjour en hôpital psychiatrique, Joseph ressort de cet endroit encore plus enragé et décide de se venger sur toutes les personnes qui croiseront son chemin en Ardèche. Non loin de là, le juge Rousseau, passionné par l’affaire, prend part à l’investigation et se met sur les traces de Bouvier. Bien décidé à le mettre sous les verrous, c’est le début d’une chasse à l’homme...
Critique : Second grand succès critique et public de Bertrand Tavernier après Que la fête commence (1975), Le juge et l’assassin permit au cinéaste de collaborer à nouveau avec Philippe Noiret et d’opérer les retrouvailles avec (et entre) Aurenche et Bost. Les deux scénaristes et adaptateurs, emblèmes du cinéma de Qualité française vilipendé par la Nouvelle Vague, trouvaient alors un second souffle. Le film est tiré d’un fait divers qui défraya la chronique judiciaire et divisa l’opinion en cette fin de XIXe siècle. Tueur en série, égorgeur et violeur de jeunes bergères, Joseph Bouvier est manifestement un déséquilibré mental. Symbole de la justice et de l’ordre social, le juge Rousseau (Philippe Noiret) fait son devoir de magistrat mais s’obstine à poursuivre Bouvier en dépit des réserves des experts psychiatres. Abandonner les poursuites contre l’assassin et le faire interner, c’est reconnaître les erreurs du début de la procédure et montrer des signes de l’affaiblissement de son pouvoir.
- © Tamasa Distribution
Autoproclamé « anarchiste de Dieu », Bouvier est perçu comme l’ennemi de classe et de la nation, un déviant qu’il faut éliminer au même titre que les révolutionnaires et les dreyfusards. Tavernier réussit un double portrait. C’est d’abord la confrontation équivoque et subtile entre deux hommes que tout oppose, mais aussi la peinture d’une société caractérisée par la répression ouvrière, l’âge d’or du colonialisme, et l’arrogance d’une bourgeoisie s’appropriant tous les pouvoirs, politiques, militaires, économiques et moraux. Cinéaste de gauche, Tavernier porte un regard féroce sur ce beau petit monde mesquin et condescendant. Un personnage emblématique est ici la mère du juge (Renée Faure).
Dame patronnesse servant la soupe populaire en échange d’une signature contre les traîtres dreyfusards, ou s’offusquant qu’un crime horrible ait pu être perpétré dans la région de Lourdes, elle reçoit la bonne société et prépare des cerises à l’eau de vie que son fils jette dans la rivière. Le seul protagoniste en proie au doute est le procureur Villedieu (Jean-Claude Brialy), écartelé entre deux systèmes de valeurs, mais que seul un suicide pourra délivrer de sa turpitude mentale. Les dialogues sont incisifs mais ne cèdent jamais au mot d’auteur, et Tavernier filme les grands espaces de régions montagneuses avec une élégance filmique héritée des maîtres américains qu’il admire, de John Ford à Delmer Daves. Le film doit également beaucoup à ses interprètes.
- © Tamasa Distribution
Tavernier a souvent mis en valeur des acteurs oubliés ou connus des seuls spectateurs de théâtre. Il met ici en lumière le jeu subtil des trop rares Cécile Vassort, Jean-Roger Caussimon ou Jean-Pierre Sentier. Mais c’est la composition de Michel Galabru qui fut bien sûr la plus remarquée. Pour la première fois de sa carrière, le comédien interprétait un premier rôle dramatique, et dans un film de qualité. Sa prestation mémorable lui valut le César du meilleur acteur. Ce rôle fut cependant l’exception dans sa carrière, la suite de sa filmographie le cantonnant à nouveau dans des projets médiocres. Tavernier a projeté l’œuvre devant un public de magistrats, entrée en matière à débats sur la justice. Si ce côté « dossier de l’écran sur un thème de société » peut agacer dans la démarche et les propos du réalisateur, son film échappe cependant à la lourdeur démonstrative et reste l’une de ses plus grandes réussites.
– César 1977 : Meilleur acteur pour Michel Galabru - Meilleur scénario - Meilleure musique
- © Tamasa Distribution
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