Le 13 décembre 2011
2011, ou le temps du retour au réel, après une année 2010 qui nous avait laissés plus rêveurs. Est-ce pour cela qu’elle nous laisse un goût doux amer ? Un parfum de déception, de "petit" cru ?
2011, ou le temps du retour au réel, après une année 2010 qui nous avait laissés plus rêveurs. Est-ce pour cela qu’elle nous laisse un goût doux amer ? Un parfum de déception, de "petit" cru ?
La cinéaste Kathryn Bigelow était en pleine préparation de son nouveau long-métrage Killing Bin Laden lorsqu’elle apprit, le 2 mai dernier, que son scénario était à refaire : la réalité venait de rattraper la fiction. Si 2010 fut rêveuse et merveilleuse, placée sous le double patronage de Christopher Nolan (Inception) et d’Apichatpong Weerasethakul (Oncle Boonmee), 2011 a été l’année d’un brutal retour au réel, encouragé par une actualité particulièrement riche et dépressive. Petit et grand écrans se sont largement partagés les guerres, révolutions, scandales et autres catastrophes. Dans ce vaste tsunami d’images et d’histoire(s), le cinéma avait évidemment son mot à dire, et les films les plus importants de l’année – selon nous – ne sont pas restés en reste. De ce petit "jeu", c’est le Moyen-Orient qui a le mieux tiré son épingle, nous tendant un miroir saisissant de nos époques et de nos humanités, reflet (forcément) pessimiste tissé de plaies, de failles, de questionnements passés et irrésolus (le Liban fantasmé d’Incendies, le tragi-comique israélien d’Infiltration), présents et insolubles (le vertigineux Une séparation, l’existentiel Il était une fois en Anatolie). Miroir diffracté aussi, qui a su louvoyer entre détours fictionnels et mises en abyme pour mieux atteindre à une vérité, toujours bonne à dire (Même la pluie, sur le sort des Indiens en Bolivie).
On constate, réjouis, que le cinéma français s’est montré au rendez-vous. Les réalisateurs hexagonaux ont enfin assumé leur goût du réel, du naturalisme, du fait divers voire de l’autobiographie, tout en les mêlant à des expérimentations bizarres, des essences étrangères et inattendues. Et les barrières ont été franchies. Certains se sont aventurés du côté de la politique-fiction, genre rare et casse-gueule s’il en est, pour le meilleur (L’Exercice de l’Etat), le pire (La Conquête) ou l’entre les deux (Pater), mais chacun avec un remarquable sens du timing, à quelques mois du prochain bras-de-fer élyséen. D’autres ont démontré que, en dehors du système habituel de production et avec trois sous en poche, on pouvait faire bouger les lignes de son art (Donoma). Et les femmes ont prouvé, si besoin était, qu’elles sont définitivement l’avenir de l’homme et du cinéma : les plus belles choses vues sur un écran cette année, nous le leur devons, qu’elles soient devant la caméra (les putains magnifiques de L’Apollonide) ou derrière (les confirmations Valérie Donzelli et Céline Sciamma). Ce classement n’en gardera qu’un, pour les résumer tous : l’enthousiaste et enthousiasmant Polisse, de Maïwenn, qui affronte la réalité à coups de maladresses et d’énergie, quand d’autres (au hasard : Intouchables) préfèrent la polir et l’embellir, recette d’un succès incomparable.
Et puis il y a les autres, ceux qui s’éloignent temporairement des hommes pour mieux redécouvrir la symphonie de la Nature, réenchanter le monde de leurs images. Ce sont les naturalistes contemplatifs, les Nuri Bilge Ceylan (certains plans, sublimes, d’Il était une fois en Anatolie) et les Michelangelo Frammartino (son chef-d’œuvreLe Quattro Volte, sorti le 29 décembre 2010, n’aura malheureusement pas les faveurs de ce top 10). C’est aussi, bien entendu, le mythique Terrence Malick, qui nous revient imprégné de sa foi dans l’humain et dans le cinéma ; son Tree of life est un bric-à-brac traversé d’éclats inoubliables et de boursouflures improbables, voué à être incompris aujourd’hui, pour mieux marquer l’Histoire du cinéma demain. L’un des temps forts de l’année, œuvre-somme kamikaze, visionnaire, grandiose, déséquilibrée, inclassable... qui, en toute logique, ne trouvera pas sa place dans ce classement.
NB : les films les plus attendus du mois de décembre (Shame, Le Cheval de Turin,A dangerous method, Hugo Cabret) n’ayant pas encore été vus à l’heure où nous écrivons ces lignes, ils ne figureront donc pas dans ce top 10, même si certains auraient sans doute pu y prétendre.
2. Il était une fois en Anatolie
3. True Grit
5. Polisse
6. Fighter
8. Incendies
9. Infiltration
10. Arrietty, le petit monde des chapardeurs
Galerie Photos
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