Le 9 mai 2018
- Réalisateur : Terry Gilliam
- Distributeur : Océan Films
- Festival : Festival de Cannes 2018
A l’issue d’un insoutenable suspense, la décision judiciaire du Tribunal de Paris, s’est faite en faveur de Terry Gilliam, du distributeur Océan Films et du Festival de Cannes, qui pourra bel et bien dévoiler le film en clôture, en présence du réalisateur qui avait fait un malaise cardiaque, peu après l’annonce de cet énième contretemps. Gilliam a consacré 20 ans de sa vie à ce projet maudit. L’annonce nous réjouit tous.
Le distributeur du film de Terry Gilliam rétablit sa vérité
Cannes, son univers impitoyable. La profession s’est déclarée abasourdie quand, une semaine auparavant, le festival a été frappé d’une assignation en référé par le producteur Paolo Branco, pour diffuser le film L’Homme qui tua Don Quichotte, de Terry Gilliam, en sélection officielle hors compétition, malgré le contentieux juridique qui oppose le producteur à l’ancien Monty Python. Aujourd’hui, le distributeur Océan Films prend la défense du réalisateur et du Festival de Cannes, et contre-attaque par voie de communiqué : l’objectif est explicitement d’informer le public des dessous de cette interminable saga judiciaire... Le Tribunal de Grande Instance examinera la version des deux camps lundi 7 mai. Pour tout comprendre, voici le communiqué...
"Les producteurs et le distributeur du film ont pris connaissance de l’assignation en référé que M. Branco a adressée au Festival de Cannes pour une audience fixée au 7 mai 2018. Afin d’éclairer le public qui suivrait cette affaire et tous les amoureux du cinéma de Terry Gilliam, nous voudrions porter une information aussi objective que possible sur le dernier volet rocambolesque de cette incroyable histoire de cinéma et expliquer pourquoi M. Branco n’est pas et ne sera jamais ce qu’il prétend être, à savoir le producteur de ce film.
Parce qu’il ne détient pas les droits d’auteur sur le scénario du film : s’il a bénéficié d’une option pour acquérir ces droits auprès de leur titulaire, la société anglaise RPC, il ne l’a jamais levée car il était dans l’incapacité d’en payer le prix de 250 000€.
Parce qu’il n’a jamais payé le prix des droits d’auteur-réalisateur du film, il n’a pas même versé 1€ à Terry Gilliam à ce titre.
Et parce qu’il n’a pas produit le film sélectionné par le Festival de Cannes.
En août 2016, Terry Gilliam prend conscience que M. Branco, qu’il a rencontré cinq mois plus tôt, n’avait aucunement l’intention d’honorer ses engagements contractuels et qu’il avait décidé de produire le film pour la moitié du budget convenu entre les deux hommes, dans le mépris total de la vision du réalisateur, qu’il avait pourtant juré, sur l’honneur et par contrat, de préserver.
M. Branco se livre alors à un véritable chantage, menaçant Terry Gilliam, à qui il écrit : "Soit tu fais ce film à ma façon, soit tu compromets irrémédiablement la faisabilité du projet et ton film est condamné, il ne verra jamais le jour". Sous le choc, Terry Gilliam refuse de céder. M. Branco lui répond : "Notre collaboration est impossible. Bonne chance avec un autre producteur".
Terry Gilliam décide donc de résilier son contrat. Comment réaliser une œuvre de l’esprit aussi personnelle, qu’il mûrit depuis plus de 20 ans dans un climat de violence contractuelle, de versatilité et de défiance aussi insoutenable, et surtout sans financement sérieux ?
A cet instant précis, la préparation du film n’a pas commencé et M. Branco n’a pas versé un centime à Terry Gilliam. Et c’est toujours le cas aujourd’hui.
En danger d’être à jamais enseveli, le film est alors sauvé par quatre producteurs : la britannique Amy Gilliam, l’espagnole Mariela Besuievsky, avec le soutien du belge "Entre Chien et Loup" et du français Kinology. Elles et ils sont les producteurs du film : ils ont réuni 16M€ de financement et convaincu les distributeurs. Ils sont les propriétaires du film dont la chaîne des droits est enregistrée dans quatre pays. Il leur faut neuf mois pour préparer et démarrer le tournage, le temps de rebâtir sur les décombres laissés par M.Branco qui, en moins de cinq mois de "collaboration", aura été incapable de redonner vie au projet tel qu’il était conçu par son auteur, et aura démontré sa volonté destructrice et autoritaire, dont la séquence que nous vivons en ce moment est une nouvelle illustration.
Avec l’assignation en référé faite au Festival de Cannes, qui a raison de rappeler que sa décision de sélectionner le film n’est en aucun cas un « passage en force » puisque le film lui a été présenté par le réalisateur, des producteurs, un vendeur international et un distributeur français, M.Branco franchit un nouveau palier. Les déclarations de son fils sur les réseaux sociaux y ajoutent une dose de grotesque, qui pourrait faire sourire si cela ne cherchait à mettre à nouveau en péril un film qui s’apprête à voir le jour.
Que disent MM.Branco père et fils ? Que seul le Festival de Cannes est attaqué car seul le Festival de Cannes refuserait de reconnaître "l’autorité de 3 procès gagnés" et donc "les droits exclusifs d’ALFAMA".
Pourtant, les producteurs et le distributeur français du film n’ont pas non plus donné crédit aux prétentions de M. Branco puisqu’ils ont fixé une date de sortie nationale, le samedi 19 mai, ne reconnaissant donc aucunement "l’autorité de 3 procès gagnés" et "les droits exclusifs d’ALFAMA".
Pourquoi ? Parce que le refrain "3 procès gagnés" repose sur l’interprétation spécieuse par M. Branco d’une décision rendue par un juge français et de deux décisions anglaises.
Il y a un an, le 19 mai 2017, le TGI de Paris a débouté M.Branco de sa demande de contrefaçon et a autorisé le tournage du film produit par les nouveau producteurs. Ce n’est donc pas une victoire pour M. Branco. D’autant que le juge du fond a écarté la prétention d’ALFAMA de détenir des droits d’auteur-réalisateur. La "victoire" que M.Branco s’attribue, c’est que le juge a également estimé que M. Gilliam n’aurait pas dû résilier ainsi son contrat. Pour autant, le juge a considéré que cela était sans incidence sur le processus de production du film en cours par les véritables producteurs.
Quant aux deux jugements anglais, voilà ce qu’ils disent : les juges prorogent l’option sur le scénario dont bénéficiait M. Branco. Or, cette option ne peut plus être levée, puisque les droits ont été cédés légalement aux nouveaux producteurs. Et bien cédés, ajoutent les juges anglais qui considèrent que cette cession est valide et opposable à M.Branco, qui ne pourra donc jamais être cessionnaire des droits du scénario.
Il n’existe donc aucune reconnaissance des droits de M.Branco.
Reste la prochaine décision de la Cour d’appel du 15 juin 2018. Il fallait faire appel pour obtenir une décision encore plus claire, le jugement laissant la porte ouverte à une demande indemnitaire éventuelle.
Quel en est l’enjeu ? De savoir si oui ou non, en résiliant son contrat, Terry Gilliam a eu raison de chercher à sauver son film, ou s’il aurait dû l’abandonner aux mains d’un producteur dont il savait qu’il était prêt à le sacrifier. Paulo Branco, rappelons-le, n’a pas payé, rien investi, ni n’a respecté ses engagement envers le réalisateur. Il n’a pas acquis et ne pourra jamais acquérir les droits du scénario n’ayant jamais levé l’option, ce qui l’empêchera à jamais revendiquer la qualité de producteur d’un film dont il s’est écarté de lui-même (voir courrier plus haut), neuf mois avant le début de tournage.
M. Branco soutient que la projection du film à Cannes porterait atteinte à ses droits. Mais à quels droits ? En quoi consisterait son préjudice si le film était projeté à Cannes ? Selon lui, il ne serait alors pas consacré comme celui qui a permis au projet d’être remis sur les rails. Voilà ce qui justifie sa demande d’enterrer The Man Who Killed Don Quixote et qui justifie selon lui une mesure de censure, qui ne lui apporterait rien à lui, mais détruirait la distribution de l’œuvre de Terry Gilliam et la réputation de son auteur avec elle. Pourquoi en est-on arrivé là ? Parce que, le 15 Mars 2018, les producteurs ont refusé l’ultimatum non négociable de M.Branco transmis en présence de tiers : cet ultimatum, c’est 3,5M€ pour lui, qui se répartiraient en 2M€ cash immédiatement et 1,5M€ sur les recettes à venir.
Si M. Branco et ses avocats contestent notre affirmation, qu’ils déposent plainte en diffamation. Pour ceux qui le souhaitent, nous tenons l’explication détaillée de tout cela à leur disposition. Nous aurions préféré parler de cinéma, nous aurions préféré vous parler d’un film que nous sommes impatients de faire découvrir au monde et qui, à deux semaines de l’événement, se trouve en péril.
Même si l’agressivité et la violence de MM.Branco Père et fils choquent, même si la présentation que M.Branco fait de Terry Gilliam dans son assignation heurte, même si M.Branco se décrit lui-même dans des termes si élogieux qu’on en reste pantois, notre intention n’est pas d’offenser en retour, mais simplement de rétablir la réalité en prenant appui sur des documents précis. Nous savons que M. Branco cherchera inlassablement à la démentir, nous venons de nous tenir aux faits tels qu’ils se sont passés."
Galerie Photos
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.