Le 1er décembre 2021

- Date de sortie : 1er décembre 2021
Tout sourire, Vladislav Opelyants nous partage les immenses défis que recèle La Fièvre de Petrov en matière de cadrage et lumière. Venu au Gaumont Fauvettes pour récupérer son prix d’artiste technicien de l’année, il ne cache pas son honneur de recevoir l’une des plus belles récompenses pour un chef opérateur, si ce n’est la meilleure.
Les prix CST (Commission supérieure technique) sont indissociables du Festival de Cannes. Depuis 74 ans, à la rentrée et dans la capitale, ils prolongent le plaisir en récompensant le meilleur artiste technicien des films en sélection officielle du Festival. Chefs monteurs ou chefs opérateurs peuvent donc espérer une reconnaissance. Notons, cette année, la nouveauté que constitue le prix de la jeune technicienne de cinéma, décerné à Armance Durix, pour son travail sur Mi Lubita de Noémie Merlant.
Critique du (grand) film de Kirill Serebrennikov ici.
Après avoir essayé de traduire "aVoir-aLire" en russe, nous sommes rentrés dans le vif du sujet.
AVAL : La Fièvre de Petrov a été présenté au Festival de Cannes cette année. C’était le cas de votre précédente collaboration avec Kirill Serebrennikov, Leto. Comment cela s’est déroulé pour vous ?
V. Opelyants : Évidemment tout le monde était absolument enchanté et ravi, mais cela était très dommage que nous ne puissions pas venir.
AVAL : Cette cérémonie est le pendant du Festival de Cannes. Comment accueillez-vous ce prix : meilleur artiste technicien ?
VO : Jusqu’à présent je n’y crois pas ! Pour un chef opérateur c’est l’un des meilleurs prix qui existe ! Je suis content que ce film existe, et que ce prix existe. Alors je veux dire merci à tous ceux qui ont poussé ce film, l’ont mis en avant pour qu’il reçoive ce prix. Les gens ne se rendent pas compte de l’importance pour un chef opérateur de notre pays (Russie, ndlr), d’avoir une telle distinction.
AVAL : C’est votre troisième collaboration avec Kirill Serebrennikov. Qu’est ce qui fait qu’à chaque fois vous recommencez à travailler ensemble ?
VO : Je pense d’abord que c’est un type génial. C’est toujours très intéressant de travailler avec lui. On se comprend très bien quand on est ensemble. Dans le processus de travail, on n’a même pas besoin de se parler, on se comprend au regard ! Il me laisse expérimenter ce que j’ai envie, et je lui suis extrêmement reconnaissant de toutes les idées cinématographiques qu’il me souffle.
- © CST
AVAL : Depuis vos débuts, diriez-vous que vous avez évolué, et comment ?
VO : J’ose espérer que oui ! Je crois que je fais chaque film en repartant à zéro.
AVAL : Pourtant, difficile de croire que Leto n’a eu aucune influence sur La Fièvre de Petrov. Il y a beaucoup de similitudes esthétiques entre les deux films ! Vous n’auriez probablement pas fait Petrov ainsi sans Leto, n’est-ce pas ?
VO : La Fièvre de Petrov est complètement différent de Leto. Au début j’ai eu très peur de m’en approcher. Il y a beaucoup de trames différentes. De la couleur, du noir et blanc. De tout ce que j’ai fait, c’est le film le plus compliqué. Leto était beaucoup plus léger, facile. Nous l’avions tourné en moins de vingt jours. C’était une fête. Cela s’est terminé par l’arrestation de Kirill, et la fête s’est terminée... Donc oui les deux films sont très différents. Dans Petrov, vous avez une atmosphère étouffante. Leto est bien plus aérien.
AVAL : Justement, cette arrestation a t-elle eu une influence sur votre manière de travailler et d’aborder la suite, et notamment Petrov ?
VO : Bien sûr. Cela m’a été très difficile. Pour nos amis c’était difficile. Mais pour Kirill... Nous tournions beaucoup la nuit, car dans la journée il devait répondre à la police. Alors il y avait les interrogatoires, puis il revenait pour le tournage. Il dormait très peu, et était sur les nerfs. Peut-être que cela se retrouve inconsciemment dans le film...
AVAL : Quels étaient les défis esthétiques spécifiques à Petrov ? Le noir et blanc, les plans séquences... Comment s’y prépare t-on ?
VO : Sur le plan technique, j’utilisais deux optiques. Une pour le noir et blanc et une pour les couleurs. A un moment, nous avons créé un casque pour les scènes racontées à travers le regard du Petrov enfant. Je bougeais la tête avec la caméra pour l’éclairage (il mime des regards de droite à gauche). Donc nous avions beaucoup de préparation, d’essais.
AVAL : Donc parfois vous ne saviez pas comment vous alliez procéder pour certaines scènes ?
VO : Avant le tournage, on savait comment on allait tourner... mais pas quoi exactement ! Kirill aime beaucoup expérimenter avec les acteurs. Donc il avait une notion de ce qu’il allait faire, mais pas précisément. Nous savions le style, mais parfois tout surgissait de manière spontanée.
AVAL : Dans ces cas là, c’est l’adaptation permanente ?
VO : Oui, mais on se comprend très bien et cela va assez vite. L’équipe technique était très réactive et soudée.
AVAL : Y a t-il une scène dont vous être particulièrement fier dans ce film ?
VO : J’aime beaucoup la représentation stylistique de l’enfance du personnage.
La Fièvre de Petrov est en salles à partir du 1er décembre 2021.