Héros, mais pas trop
Le 26 janvier 2014
Un des rares exemples de films de guerre réalisés en Allemagne pendant le conflit de 1914-18. La propagande y cède le plus souvent le pas à l’esprit feuilletonesque et Ernst Hoffman y incarne un héros pas si édifiant que ça.
- Réalisateur : Carl Froelich
- Acteurs : Ernst Hofmann, Olga Engl, Esther Carena, Gustav Botz, Heinz Sarnow, Edith Sorel, Ernst Rennspies
- Genre : Film de guerre, Film muet
- Nationalité : Allemand
- Durée : 1h35mn
- Plus d'informations : http://www.filmportal.de/video/ikar...
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– Titres alternatifs : Der Adler von Flandern (l’aigle des Flandres) - Ikarus, im Höhenflug der Leidenschaften (Icare, dans l’envolée des passions)
– Sortie en Allemagne : 04 juillet 1919
– Production : Neutral-Film GmbH (Berlin)
– camera : Hermann Böttger
– décors : Artur Günther
Un des rares exemples de films de guerre réalisés en Allemagne pendant le conflit de 1914-18. La propagande y cède le plus souvent le pas à l’esprit feuilletonesque et Ernst Hoffman y incarne un héros pas si édifiant que ça.
L’argument :Le jeune ingénieur Günther Ellinghaus a conçu les plans d’un nouveau moteur d’avion. Mais il a des dettes de jeu que son père refuse de payer. Clémence de Montignon, à qui il fait la cour, et son acolyte le baron d’Aubigny sont en fait deux agents français. Ils tentent de le convaincre de leur remettre ses plans. Il refuse et, sur le conseil de sa cousine Erika, part pour New York où il travaille comme serveur dans un restaurant.
Lorsque la guerre éclate il retourne en Allemagne en se faisant engager sous un faux nom comme soutier sur un paquebot hollandais. Il devient pilote de guerre et retrouve Clémence dans le château de celle-ci, situé à quelques kilomètres du front. Lorsque d’Aubigny vient la chercher pour l’emmener à bord de son avion ils ligotent Ellinghaus dans sa chambre puis mettent le feu au château.
Ellinghaus parvient à s’échapper, les poursuit avec son avion et parvient à abattre le leur.
Après la guerre ils se retrouvent par hasard dans un hôtel en Italie. D’Aubigny finit par accepter la main tendue de Ellinghaus.
Notre avis : La Première Guerre mondiale, dont on commémore en cette année 2014 le centenaire, a entraîné, dans les pays belligérants, un contrôle de la production cinématographique commerciale par la censure militaire et la réalisation de nombreuses bandes d’actualités à visée ouvertement propagandiste.
Mais si la Guerre en cours était parfois évoquée au détour d’une scène dans les fictions contemporaines, les longs-métrages relevant du genre film de guerre à proprement parler sont restés très minoritaires face aux innombrables farces, aventures policières ou mélodrames qui inondaient les écrans.
- Ernst Hoffmann et Esther Carena (dans la glace) : Ikarus, der fliegende Mensch - Deutsche Kinemathek - Museum für Film und Fernsehen
- Ernst Hofmann dans Ikarus, der fliegende Mensch - Deutsche Kinemathek - Museum für Film und Fernsehen
Ainsi, du très riche panorama de la production allemande de ces années là, on retient surtout des titres signés Lubitsch, Franz Hofer, Emmerich Hanus, Otto Rippert, Joe May ou encore des comédies comme Der karierte Regenmantel de Max Mack ou Das Liebes ABC avec Asta Nielsen,
dans lesquels seuls quelques détails (cartes alimentaires, heure du couvre-feu) rappellent au détour d’une scène le contexte guerrier.
Certains de ces joyaux peuvent être visionnés sur www.europeanfilmgateway.eu ou sur les sites des cinémathèques associées au projet First World War Collections. On y découvre aussi quelques uns des rares films de guerre au sens strict comme le remarquable Journal du Dr Hart de Paul Leni (1916-17) ou ce Ikarus, der fliegende Mensch dont la sortie tardive, après l’armistice, explique sans doute la présence d’une scène finale de réconciliation franco-allemande qui n’était certainement pas prévue au départ.
- Heinz Sarnow, Esther Carena et Ernst Hofmann dans Ikarus, der fliegende Mensch - Deutsche Kinemathek - Museum für Film und Fernsehen
Le pathos édifiant (mais relativement retenu) de ce retournement in extremis jure certes quelque peu avec l’esprit feuilletonnesque de l’heure et demie qui précède mais ne semble pas totalement incongru, la mise en scène de Carl Froelich (Wagner) ayant jusque là ménagé suffisamment de jeu pour que l’action échappe au rouleau compresseur du discours de propagande et que les personnages ne soient pas entièrement assujettis à leur emploi pourtant bien défini.
Car si le film ne manque évidemment pas de célébrer les vertus patriotiques il privilégie le spectaculaire (belles scènes aériennes filmées caméra sur l’aile ; superbe travail sur la photo, notamment dans l’épisode nocturne avec les torches) et la perception en temps réel de l’action, par exemple dans une superbe séquence en suspension qui montre le héros s’apprêtant à se coucher dans le château français, défaisant lentement ses guêtres, allant à la fenêtre, s’interrompant à plusieurs reprises, visiblement troublé par ses retrouvailles imprévues avec la femme qui l’avait autrefois trompé.
- Ikarus, der fliegende Mensch - Deutsche Kinemathek - Museum für Film und Fernsehen
L’allure frêle, le dandysme nerveux, la décontraction sportive mais inquiète d’Ernst Hofmann (qui était déjà l’officier polonais se ralliant in extremis à la cause allemande dans le film de Leni) permettent au personnage d’Ellinghaus d’échapper aux poses de surhomme attendues, ses acrobaties (il saute de la fenêtre du premier étage pendant l’incendie) et ses transformations (serveur de grand restaurant ou soutier de paquebot) mettant surtout en avant son caractère instable et fragile.
Une jolie découverte donc qui confirme que Carl Froelich vaut mieux que sa réputation de cinéaste officiel au service d’une idéologie conservatrice et que ses films, y compris ceux de la période 33 à 45, méritent un examen attentif.
http://www.europeanfilmgateway.eu/fr/node/33/detail/Ikarus+der+fliegende+Mensch/video:NTljNDA0MGUtZjA4Yy00NTRlLWEyMzctOWNlNzAwMzZkYTA5X1VtVndiM05wZEc5eWVWTmxjblpwWTJWU1pYTnZkWEpqWlhNdlVtVndiM05wZEc5eWVWTmxjblpwWTJWU1pYTnZkWEpqWlZSNWNHVT06OmF2Q3JlYXRpb24uREsvREtfYXZDcmVhdGlvbl8xMDM3NDc5MDAwMDAwMTk1MDE2/paging:dmlkZW8tMS00LWltYWdlLTEtNC1zb3VuZC0xLTQtcGVyc29uLTEtNC10ZXh0LTEtNA==
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