Un homme, un vrai !
Le 6 août 2012
Une joyeuse farce qui moque, de manière moins inoffensive qu’il n’y paraît, les codes de la virilité et offre un rôle en or à une Asta Nielsen en verve, brillamment secondée par l’excellent Ludwig Trautman.
- Réalisateur : Magnus Stifter
- Acteurs : Asta Nielsen, Ludwig Trautmann, Magnus Stifter
- Genre : Comédie
- Nationalité : Allemand
- Durée : 50mn
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– Sortie en Allemagne : 16 août 1916 (Berlin)
Une joyeuse farce qui moque, de manière moins inoffensive qu’il n’y paraît, les codes de la virilité et offre un rôle en or à une Asta Nielsen en verve, brillamment secondée par l’excellent Ludwig Trautman.
L’argument :Lis, jeune fille de bonne famille débordante d’énergie et habituée à obtenir ce qu’elle veut, caresse le portrait d’un homme très viril à moustaches qui représente son mari idéal.
Mais le fiancé qu’on lui destine se révèle être un jeune homme délicat élevé par ses tantes, deux vieilles filles qui le protègent du moindre courant d’air.
Qu’à cela ne tienne : Lis décide de faire de lui un homme. Elle commence par lui apprendre à fumer, puis l’emmène à la gare où elle achète deux billets pour Paris. Là bas elle s’installe avec lui dans un grand hôtel et, travestie en homme, l’introduit dans le monde des viveurs et des cocotes.
Notre avis : La réputation d’Asta Nielsen, première véritable star du cinéma mondial, reposa essentiellement sur des rôles dramatiques. Mais, soucieuse de ne pas s’enfermer dans un registre unique, elle a pris soin très vite de diversifier ses emplois, alternant sujets contemporains et films en costumes, mélodrames et comédies et n’hésitant pas, à l’occasion, à pratiquer l’auto-parodie réflexive comme dans Die Film Primadonna (Gad 1913) ou Die falsche Asta Nielsen - la fausse Asta Nielsen (Gad 1915).
- Asta Nielsen dans Das Liebes-ABC (1916)
Das Liebes-ABC (qu’on peut traduire approximativement par le b.a.-ba de l’amour ou encore quelque chose comme L’amour en dix leçons) est, pour employer un néologisme, une farce transgenre débridée reposant, comme Fräulein Piccolo (Hofer 1914) ou Je ne voudrais pas être un homme ( Lubitsch 1818), sur le travestissement et la permutation des rôles traditionnellement attribués aux hommes et aux femmes.
Comme déjà dans Engelein (Gad, 1914), Asta Nielsen, au jeu parfois si économe d’effets ailleurs, s’aventure avec bonheur, malgré ses presque 35 ans, sur le terrain d’une Dorrit Weixler ou d’une Ossi Oswalda, et trouve ici l’occasion de peaufiner son art de la pantomime grotesque en dessinant de manière extravertie, mais avec une précision millimétrée des gestes et des mimiques, une étonnante caricature d’adolescente délurée à couettes et de démontrer son aisance à singer (et ridiculiser) la gent masculine. Il faut voir avec quelle aisance et quelle virtuosité bouffonne elle porte le smoking ou la tenue blanche d’un mitron.
- Ludwig Trautmann
Le film, dont le sujet est proche de celui de Tempo massimo, joue franchement le jeu d’un comique au ressorts appuyés mais efficaces et feint de laisser la morale traditionnelle reprendre le dessus in fine. Mais le trouble liée à la confusion des genres subsiste jusqu’au bout, les auteurs se gardant de trop insister sur la leçon à tirer. La métamorphose du fiancé n’est d’ailleurs, à l’évidence, que très superficielle, l’excellent Ludwig Trautmann conservant intacte, dans les scènes finales, sa grâce juvénile et presque féminine.
L’acteur, célèbre pour son interprétation du détective Brown dans les films de Harry Piel, n’est nullement écrasé par sa partenaire et réussit, tous sourires et mines étonnées, à être lui aussi très drôle sans avoir à forcer excessivement le trait (par exemple lorsque, arrivant en voiture, il apparaît emmitouflé dans ses couvertures, ses tantes se montrant excessivement préoccupées par sa santé). Les comparses ne sont d’ailleurs pas en restes, à commencer par les inénarrables tantes et le personnel de l’hôtel imperturbable mais qui n’en pense pas moins.
Bref : Das Liebs-ABC est une véritable petite perle de vivacité comique qu’une édition DVD bienvenue, chez Filmmuseum, permet de redécouvrir en même temps que trois autres joyaux de la filmographie de la grande Asta.
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