Tempo massimo - La critique

La première réalisation du prolifique Mattòli est une exquise et trépidante comédie écrite sur mesure pour De Sica.

L’argument : Alors qu’il est en train de pêcher tranquillement en barque sur un lac le professeur Banti voit tomber du ciel en parachute la fantasque Dora Sandri qui multiplie les paris pour repousser son mariage avec le prince Huerta.
Immédiatement amoureux, le professeur va renoncer à son existence surprotégée auprès de sa riche tante Agata et tout faire pour conquérir la jeune femme, découvrant les joies de l’alcool, se lançant dans une acrobatique descente en ski ou participant à une course cycliste.

Notre avis : En 1932 Gli uomini che mascalzoni ! - Les hommes, quels mufles !, délicieuse comédie de Mario Camerini, avait fait une star de Vittorio de Sica, déjà célèbre sur scène, en particulier grâce à sa participation aux spectacles de la compagnie Za bum, fondée en 1927 et productrice de ce Tempo massimo, trépidante comédie musicale qu’un soupçon d’ancrage social et de réalisme (ou du moins de pittoresque) éloigne de l’univers aseptisé des téléphones blancs.
Mario Mattòli, co-fondateur de la troupe, a écrit sur mesure pour l’acteur le rôle du professeur Banti, lui permettant de composer un personnage keatonien de célibataire naïf à la gaucherie distinguée et à la désarmante candeur que l’amour émancipe du joug d’une tante fortunée et autoritaire (Amelia Ghellini) qui administre à tout propos de l’huile de ricin au trentenaire infantilisé (Non voglio più essere tratato come un bambino. Sono un uomo ! - Chi ride ?)*.
Mais si la prestation de De Sica est bel et bien irrésistible (son grazie bien élevé lorsque, demandant un rafraîchissement au bord de la route pendant la course cycliste, il se prend un seau d’eau en pleine figure), la vivacité de sa partenaire Milly (Faccio tutto così, come uno sport)** fait également merveille et les personnages secondaires, interprétés par des acteurs rompus à la discipline du varietà (la revue de music-hall), sont tous savoureux, à commencer par Camillo Pilotto en valet de chambre attentionné et paternel et Enrico Viarisio en champion cycliste à la gouaille populaire, sans oublier Anna Magnani dans son premier rôle important au cinéma (la femme de chambre Emilia, assurément plus dans ses cordes que celui de la sombre femme fatale de La ciecca di Sorrento tourné la même année).
Entamant ici au pied levé (après la défection de Carlo Ludovico Bragaglia) sa prolifique carrière de cinéaste, Mario Mattòli fait montre d’un talent appréciable de metteur en scène que ses 83 films ultérieurs (en un peu plus de trente ans) ne confirmeront pas tous au même degré. Son sens de la chorégraphie donne à l’ensemble un allant communicatif et il sait laisser respirer les gags sans les étouffer par effet d’accumulation.
La musique entraînante de Marf et Mascheroni (notamment le joli tube Dicevo al cuore), les nombreuses prises en extérieur (en particulier lors de la trépidante séquence finale dans les rues de Milan) et la splendide photo de Carlo Montuori contribuent également à la réussite de cette comédie vive et enlevée au charme inoxydable.

*Je ne veux plus être traité comme un enfant. je suis un homme ! - Qui rit ?
** Je fais tout comme ça, comme un sport.