Désordre de marche
Le 8 novembre 2015
Cette réflexion humaniste sur le marché de l’art en temps de guerre ne renouvelle pas le coup d’éclat de Faust, qui avait valu à son auteur le Lion d’or du Festival de Venise.
- Réalisateur : Alexandre Sokourov
- Acteur : Louis-Do de Lencquesaing
- Genre : Drame
- Nationalité : Français, Allemand, Néerlandais
- Durée : 1h28mn
- Date de sortie : 11 novembre 2015
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Cette réflexion humaniste sur le marché de l’art en temps de guerre ne renouvelle pas le coup d’éclat de Faust, qui avait valu à son auteur le Lion d’or du Festival de Venise.
L’argument : 1940. Paris, ville occupée. Et si, dans le flot des bombardements, la guerre emportait La Vénus de Milo, La Joconde, Le Radeau de La Méduse ? Que deviendrait Paris sans son Louvre ?
Deux hommes que tout semble opposer - Jacques Jaujard, directeur du Louvre, et le Comte Franz Wolff-Metternich, nommé à la tête de la commission allemande pour la protection des œuvres d’art en France - s’allient pour préserver les trésors du Musée. Au fil du récit de cette histoire méconnue et d’une méditation humaniste sur l’art, le pouvoir et la civilisation, Alexandre Sokurov nous livre son portrait du Louvre.
Notre avis : L’idée de départ était intéressante : montrer comment les musées et les centres d’art sont touchés par la guerre et parviennent à survivre aux méandres de la grande Histoire, en prenant le Louvre (le musée le plus fréquenté au monde) comme point de mire d’une réflexion humaniste sur l’art. En se posant comme narrateur d’un film dramatique qui s’articule autour d’images d’archives et de différentes parties qui jouent avec les époques, Francofonia nous révèle les coulisses des musées et la façon dont leurs ressources se renouvellent et leur organisation se précise, en vue d’expositions ou, en temps de guerre, d’un sauvetage des œuvres.
{{© Sophie Dulac Distribution}}Trois parties sont présentées en alternance : d’abord la reconstitution de la rencontre et des relations professionnelles puis amicales entre les deux protagonistes ; ensuite d’autres images d’un navire dans la tempête, qui transporte bien dangereusement des œuvres inestimables ; enfin une dernière partie plus symbolique révèle la rencontre de Napoléon Bonaparte et Marianne. Le premier volet rappelle que l’appropriation des œuvres d’art est une des raisons qui conduit à des guerres et à des occupations. Notre Marianne nationale affirme que les musées font partie du patrimoine et de l’identité d’une nation, et sont des victimes collatérales des conflits armés.
{{© Sophie Dulac Distribution}}En jouant avec les époques, en faisant survoler la pyramide du Louvre (inaugurée en 1989) par des avions militaires qui faisaient les beaux jours de la Seconde Guerre mondiale ou en doublant des images d’archives, prêtant ainsi des paroles imaginaires à un Führer tout fier de déambuler dans un Paris alors désert, Alexandre Sokourov informe le spectateur et lui apprend quels rouages se mettent en place lorsqu’un musée est en difficulté.
C’est précisément là que le bât blesse : un long-métrage objectif aurait vraiment permis de découvrir un moment d’Histoire et un pan méconnu de l’organisation actuelle du Louvre. Au lieu de cela, le réalisateur se livre à une réflexion hasardeuse, construit sa narration à partir de sa vision de l’art et perd son propos (et le spectateur) dans un film d’1h28 qui parait interminable. Si le but de Francofonia était de montrer que l’art et le patrimoine d’autrui sont les enjeux véritables des guerres, la démonstration qu’en fait Alexandre Sokourov est plus que bancale, et on a peine à partager sa vision.
Certes, d’un point de vue technique et artistique, le film a de belles images à proposer, livre ses trois parties selon différents formats et changements d’échelle, et témoigne d’un réel travail pictural. Mais le rythme est trop lent, et les passages où le réalisateur semble se parler à lui-même trop fréquents, laissant le spectateur au bord de la route, bien mal aisé de partager sa vision. Ainsi, Francofonia plonge peu à peu dans le hors-sujet, occultant le traitement du Louvre sous l’Occupation, réduit à quelques saynètes avec personnages en uniforme nazi errant dans les couloirs du plus grand musée de France. La réflexion humaniste sur l’art, c’est bien. Répondre à sa propre problématique, ça aurait été encore mieux. Dommage.
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