Fly or die

Une chose est certaine : si, depuis plusieurs mois, les guitares rock ont envahi la planète hip-hop/r’n’b (The Roots, Cody Chestnutt, Outkast...), on le doit en grande partie à Pharrell Williams et sa bande. Rappelez-vous, il y a deux ans : à quelques jours de la sortie commerciale du premier album de N*E*R*D, tous les exemplaires déjà pressés sont rappelés par la maison de disques (quelques pays, dont la France, auront la chance de voir l’album vendu quelques jours durant ; donc si vous possédez une copie de cette première mouture : bingo !). Motif : le groupe veut retravailler l’ensemble des morceaux avec un groupe de rock, car Pharrell se sent tout à coup investi d’une mission : le rock et le funk doivent se réunifier, et ils le feront de plein fouet sur les disques de N*E*R*D ! Ce sera donc chose faite quelques mois plus tard, lorsque In search of... ressort avec ses titres minimaux, secs et funky (l’empreinte des Neptunes, en somme) parés de guitares baveuses, de basses teigneuses et de batterie live. Et en avant les hits Lapdance ou Rock star, et surtout l’avalanche d’influences citées ci-dessus...

Mais on ne révolutionne pas un genre musical deux fois de suite avec les mêmes ingrédients, et l’effet de surprise ne peut donc plus jouer pour Fly or die. Dès lors, l’album se retrouve parfois prisonnier du concept de départ, et certains titres en souffrent singulièrement : malgré l’efficace Don’t worry about it (petit frère de Lapdance, et tube en puissance), le début de l’album ne séduit pas, car trop dépendant de l’équation clichée "grosses guitares + basse + caisse claire = gros son rock". Il faut en fait attendre le cœur du disque pour enfin assister à une prise de risques (pourtant habituelle chez les Neptunes) : Breakout et son opposition couplet pop désabusée/ refrain rock carré, Wonderful place et son sifflement innocent apportent un peu de soul à l’ensemble. N*E*R*D ose la retenue, et ça marche. Dès lors, tout s’éclaire : pour être autorisé à apprécier Fly or die, il faut donc passer la barrière des clichés et des idées préconçues, enjamber les titres rébarbatifs pour atteindre le cœur de l’album. Et l’auditeur d’être finalement récompensé de manière ironique par un titre acoustique caché non pas à la fin du disque, mais juste après ce formidable Wonderful place, au beau milieu de l’album. Là où tout se passe.