Le 22 octobre 2024
Le meilleur film de Jacques Bral, perle du cinéma d’auteur des années 80, magnifié par ses trois interprètes : Christine Boisson, Gérard Lanvin et André Dussollier.
- Réalisateur : Jacques Bral
- Acteurs : André Dussollier, Christine Boisson, Gérard Lanvin, Elisabeth Margoni, Jean-Pierre Sentier, Henri-Jacques Huet
- Genre : Comédie dramatique, Romance
- Nationalité : Français
- Distributeur : MK2 Distribution, Thunder Films International
- Durée : 1h52mn
- Reprise: 27 janvier 2010
- Date de sortie : 10 juillet 1980
- Festival : Festival de Cannes 1980
L'a vu
Veut le voir
Résumé : Après avoir rompu avec son passé, Léo, musicien de jazz, s’installe provisoirement chez Bony, un vieil ami écrivain. Tous deux font la connaissance de Cora, une jeune femme marginale et solitaire qui conduit un taxi. Drôle de fille qui sort ses griffes à la moindre occasion et fait le dos rond quand on s’y attend le moins. Ils se sentent très attirés par elle. Entre Cora et Léo, que sa situation rend disponible, se tissent, au fil des nuits, des rapports amoureux intenses, tendres et violents...
Critique : Jacques Bral avait quitté son Iran natal en 1968 pour s’installer à Paris, étudier les Beaux-Arts et suivre les cours de l’Institut de formation cinématographique. Après avoir réalisé deux courts métrages, il s’était lancé dans le format long avec Une baleine qui avait mal aux dents (1975). Sa société de production Les Films Noirs lui permit de trouver les financements pour tourner Extérieur, nuit (1980), qui sera sélectionné dans la section Perspectives du cinéma français, que promouvait la Société des Réalisateurs de Films au Festival de Cannes, où le métrage fut bien accueilli. Œuvre sur des trentenaires cherchant un sens à leur existence, Extérieur, nuit est quelque peu aux années 80 ce que furent À bout de souffle et La maman et la putain aux deux décennies antérieures. À la différence près que Jacques Bral n’a malheureusement pas bénéficié de l’attention que les cinéphiles ont portée à la filmographie de Godard et Eustache. Il faut dire que ses films postérieurs ont moins marqué les esprits, malgré les qualités de Polar (1984) et Le noir (te) vous va si bien (2012). On pourrait d’ailleurs faire le lien avec un autre long métrage générationnel, Un monde sans pitié (1989) d’Éric Rochant, encensé par la critique et succès public à sa sortie, mais relativement oublié ainsi que son réalisateur.
Évoquons l’intérêt sociologique et historique d’Extérieur, nuit, même si l’essentiel n’est pas là à notre sens. Léo et Bony, ex-soixante-huitards, vivotent tant que bien que mal en ce début des années 80, fin de la période Giscard d’Estaing, avant l’ère Mitterrand. Le chômage de masse s’installe et l’on ne parlait pas encore de précarité d’emploi. C’est pourtant ce qui concerne Léo, musicien raté, qui démissionne d’un poste aliénant ; mais aussi de son pote, écrivain ayant du mal à noircir les pages ; quant à Cora, si l’ubérisation des emplois n’existait pas encore, son récent statut de chauffeuse de taxi semble fragile, d’autant plus que la jeune femme prend un malin plaisir à agresser et détrousser ses clients… À la précarité de l’emploi s’ajoute l’instabilité des sentiments. Léo quitte la petite amie qui l’hébergeait, quand Cora s’attache sexuellement au jeune homme tout en refusant son amour et les projets de vie commune. Ce contexte ne saurait définir la spécificité d’Extérieur, nuit, tant il a été utilisé dans le cinéma français de l’époque, dans des films aussi divers que Loulou de Maurice Pialat et Viens chez moi, j’habite chez une copine de Patrice Leconte.
Extérieur, nuit est un vrai film d’atmosphère, magnifié par la photo nocturne de Pierre-William Glenn (récompensé au Festival de Locarno) et la musique jazz et tango (au générique) de Karl Heinz Schäfer. Sans le côté arty et artificiel que ce terme pourrait suggérer. Si l’histoire de ce (faux) triangle amoureux n’a rien d’original en soi, le long métrage regorge de beauté, des déambulations en taxi ou à pied dans la capitale (sans la complaisance touristique des prises de vue, malgré les plans sur Pigalle ou les Champs-Élysées) aux huis clos intimistes, comme la séquence où Cora prend un bain en présence d’un Bony à la fois respectueux et rongé par le désir. Le film a également pour atouts ses digressions qui le rangent au rayon des productions post-Nouvelle Vague, à l’image de ce passage où Bony converse avec un quidam mi-poète, mi-clodo (Jean-Pierre Sentier). Enfin Extérieur, nuit doit énormément à ses trois interprètes dont la carrière connut alors un tournant. Féline et androgyne, Christine Boisson révélait un magnétisme certain qui attirera l’attention d’Antonioni et de Philippe Garrel ; Gérard Lanvin, à la fois viril et fragile, se montrait un digne héritier de Belmondo, et confirmera son talent avec Granier-Deferre et Missaien ; quand André Dussollier, comédien fin et intelligent, annonçait ses prestations futures pour Rohmer, Resnais ou Sautet.
Galerie photos
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.