Y a d’la haine
Le 4 février 2003
Enragé et brillant.
- Artiste : Asian Dub Foundation
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Leurs concerts incandescents ont fait d’eux l’un des groupes les plus courus dans l’Hexagone. Plus véhéments que jamais dans leur discours politique, les Anglo-Pakistanais d’Asian Dub Foundation recréent sur leur nouvel album une Jamaïque imaginaire en plein Bollywood.
Toutes proportions gardées, le sort d’Asian Dub Foundation s’apparente à celui de Rage Against The Machine. Cultivant toutes les deux un activisme forcené, championnes dans leur pays respectifs d’un mélange rock/hip hop (adapté à la sauce drum’n’bass avec influences indo-pakistanaises chez ADF), les deux formations se sont toutes deux retrouvées fort dépourvues après le départ de leurs rappers respectifs en 2000. Mais contrairement aux Californiens qui se sont empressés de recruter Chris Cornell de feu Soundgarden pour fonder le zepelinissime Audioslave, les Anglais se sont refusés le plaisir de débaucher une gloire nationale pour remplacer le MC Deedar. On n’aura donc pas le bonheur de voir, au hasard, Richard Ashcroft dansant bhangra sur les tablas d’Asian Dub, puisque c’est le guitariste Steve Chandra qui reprend le micro, assisté de quelques invités.
Le groupe londonien propose justement une belle surprise avec la présence sur 1000 Mirrors de la prêtresse dissidente Sinead O’Connor, en ce moment aussi prolixe en featurings (Moby, Massive Attack...) qu’une diva du R&B. Le résultat de la collaboration, superbe, est ce qu’ADF aura produit de plus pop, sans jeter aux orties son credo dub originel. Avec l’orfèvre Adrian Sherwood du label On-U Sound à la console, Enemy of the Enemy parachève au contraire la mue du collectif en véritable sound-system.
Troquant les guitares bulldozer pour celles du Radiohead Ed O’Brien pour quelques contributions, multipliant les changements abrupts et jouissifs de riddims sur de soyeux tapis de cordes orientales, Asian Dub Foundation chasse tous les signes de fatigue qui guettaient une formule éprouvée.
Cette efficacité retrouvée fait du titre d’ouverture Fortress Europe, explosive diatribe contre l’enfermement de l’Europe derrière les murailles de Schengen, l’un des singles les plus percutants du moment, et un morceau peu consensuel en ces temps post-sangattiens. Allusion au statut d’alliés de l’Occident de Saddam et Ben Laden au temps où ils combattaient les ennemis iraniens et soviétiques, le titre même d’Enemy of the Enemy devrait garantir un accueil plus que tiède sur les ondes de la très américanophile Angleterre.
Et il en ira de même pour le morceau La haine, d’après le film de Kassovitz dont le groupe avait proposé sa propre interprétation musicale en 2001 - au plus fort de l’embrasement des communautés asiatiques des Midlands. Comme le Clash de Joe Strummer, dont les derniers pas en studio exploraient d’ailleurs des thèmes très proches, Asian Dub Foundation ne trouve jamais meilleure source d’inspiration que dans ces situations désespérées.
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