Noir c’est noir
Le 14 août 2024
Un petit bijou couleur sombre de la RKO, qui porte à son point d’excellence le genre « polar » et se laisse encore aujourd’hui apprécier avec plaisir.
- Réalisateur : Anthony Mann
- Acteurs : Raymond Burr, Steve Brodie , Audrey Long, Douglas Fowley, William Challee
- Genre : Drame, Policier / Polar / Film noir / Thriller / Film de gangsters, Thriller
- Nationalité : Américain
- Editeur vidéo : Éditions Montparnasse
- Durée : 1h13mn
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– Année de production : 1947
Résumé : Le camionneur Steve Randall est appelé pour effectuer un travail dont on lui cache qu’il est commandé par des gangsters. Il devient sans le vouloir complice d’un hold-up. Injustement accusé, Steve alerte la police et dénonce les vrais coupables. Poursuivi par les gangsters en quête de vengeance, Steve s’enfuit avec la femme qu’il vient d’épouser.
Critique : Une silhouette qui se profile le long d’un escalier, l’arme à la main, tandis que les voisins referment précipitamment la porte, bouchant leurs yeux et leurs oreilles ? Vous êtes à la bonne entrée, celle du film noir : brutal comme un coup de poing en pleine face, et aussi accueillant qu’un chef de gang crapuleux, l’univers du genre revêt des tons tout en contrastes, dans une Amérique où l’on fume, boit et tombe de traquenard en traquenard. Desperate, s’il répond aux codes narratifs les plus traditionnels de son école, n’en est pas moins d’une beauté plastique remarquable, due au travail exceptionnel du réalisateur et du directeur de la photographie. C’est cette richesse du graphisme et de la matière visuelle qui fait oublier au spectateur le caractère attendu des rebondissements, la tension s’accroissant graduellement mais de manière relativement prévisible tout le long du récit. Ce conventionnalisme de l’intrigue n’est d’ailleurs pas un obstacle pour apprécier pleinement le métrage, car l’on se glisse avec plaisir dans les « passages obligés » du film de genre (règlements de compte entre gangsters et policiers, interrogatoires musclés dans des caves mal éclairées...), ceux-ci étant rehaussés de détails qui échappent au simple « truc » scénaristique. Étonnants se révèlent notamment les échanges de regards, filmés en gros plans et avec une intensité rare - ce n’est pas pour rien que Sergio Leone innervera toute sa carrière de sources hollywoodiennes classiques -, entre des personnages dont la crédibilité psychologique est, pour une fois, acceptable, en partie grâce au jeu à la fois grave et rentre-dedans de Raymond Burr (le « méchant » de service, plus noir que noir).
Desperate s’affirme ainsi non seulement comme un classique du genre et un « objet d’époque » témoin de la production de la RKO à la fin des années 1940, mais aussi comme une œuvre nerveuse et dense, qu’Anthony Mann considérait comme sa première véritable réussite artistique. Pour les amateurs du réalisateur, il sera intéressant de relever les liens avec le reste de sa filmographie, en particulier ses westerns, et de savourer les scènes variées - dialogues ingénieux et rythmés, affrontements silencieux ou armes à la main - qui garnissent toute la palette caractéristique de la Mann’s touch. Pour les novices, pas d’inquiétude : Desperate se laisse découvrir sans trop d’anachronisme ni d’ironie, et prouve que l’aura d’une mécanique hollywoodienne bien huilée, marque de fabrique de cet « âge d’or », n’en a pas fini de fasciner.
Le DVD
Édition simple et sobre, mais qui montre le souci de restituer le film lui-même dans toute sa richesse.
Les suppléments
L’incontournable Serge Bromberg dresse un aperçu éclairant de la situation du film de genre à Hollywood et de ses caractéristiques principales. Le propos est intéressant, mais un poil trop bref et nous laisse un peu sur notre faim...
Image
Une belle version qui donne toute la mesure du travail graphique de la mise en scène et de la photographie ; les contrastes sont rendus à merveille sur tous types d’écrans.
Son
Le son est dans l’ensemble d’une qualité correcte, en mono d’origine. Des grésillements au début et à la fin du film viennent perturber un peu l’écoute, mais sont vraisemblablement à mettre sur le compte de la qualité de la bande sonore d’époque.
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