Trafics et quiproquos
Le 29 juin 2010
Une oeuvre de jeunesse de Fritz Lang, encore un peu décorative mais qui porte indéniablement la marque de son auteur et annonce les chefs d’oeuvre à venir.


- Réalisateur : Fritz Lang
- Acteurs : Rudolf Klein-Rogge, Carola Toelle, Anton Edthofer, Ludwig Hartau, Hermann Böttcher
- Genre : Drame, Policier / Polar / Film noir / Thriller / Film de gangsters, Film muet
- Nationalité : Allemand

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– Durée : 1h21mn
– Titre original : Kämpfende Herzen (Die vier um die Frau)
Une oeuvre de jeunesse de Fritz Lang, encore un peu décorative mais qui porte indéniablement la marque de son auteur et annonce les chefs d’oeuvre à venir.
L’argument : Harry Yquem, spéculateur boursier, achète pour sa femme Florence, un bijou d’une grande valeur dans un repère de truands et de receleurs. Il remarque un homme qui ressemble beaucoup à une photo qu’il avait aperçue dans les affaires de sa femme. Curieux, il suit l’homme jusqu’à son hôtel et lui laisse une lettre lui proposant un rendez-vous à son domicile. Cet homme, William Krafft vient chez Harry...
Notre avis : Longtemps considéré comme perdu avant qu’on en retrouve miraculeusement une copie au Brésil, Kämpfende Herzen est le septième film de Fritz Lang (ou le sixième si on réunit les deux parties de Die Spinnen - Les araignées) et précède, dans son oeuvre, les deux réalisations majeures qui vont fonder sa réputation de cinéaste : Der müde Tod - Les trois lumières et le diptyque du Dr. Mabuse.
Dans l’adaptation que Lang et Théa von Harbou ont faite d’une pièce de théâtre d’un certain Rolf E. Vanloo on relève d’ailleurs de nombreux éléments propres au roman-feuilleton, genre auquel appartiennent également Les araignées et la série des Mabuse : bar louche qui abrite des trafics douteux et où se retrouve une faune des plus colorée, quiproquos et confusions d’identité (les deux frères jumeaux joués par le même acteur, le mari qui cache ses activités illicites sous une façade de respectabilité), l’accumulation de circonstances qui réunit tout le monde dans la villa pour un final multipliant les coups de théâtre. L’intrigue est, il faut le dire assez confuse et invraisemblable et les personnages n’ont guère d’épaisseur, même si les acteurs font montre d’un plaisir évident à composer des silhouettes souvent cocasses.
Mais la patte de Fritz Lang est bien là, dans la manière d’utiliser les décors : les deux côtés d’une porte fermée, une serre la nuit où les ombres de détachent sur les verrières, un hall de grand hôtel et le fameux bar louche évoqué plus haut. Et les objets jouent bien entendu un rôle capital : une bague discrètement subtilisée, une photo, des lettres.
La plupart des plans sont superbes. La classe et le professionnalisme de l’exécution impressionnent, signe que l’art du cinéaste n’est pas encore arrivé à maturité et reste quelque peu décoratif.
Cette oeuvre légère et au rythme enlevé a pourtant beaucoup de charme et, par moments, un réel impact. Sa vision est d’autant plus recommandable que la copie restaurée et teintée est magnifique.