Le 18 octobre 2019
Un texte haletant, à la lisière du fantastique. Le récit de Serge Joncour emporte littéralement le lecteur.
- Auteur : Serge Joncour
- Editeur : J’ai Lu
- Genre : Roman
- Date de sortie : 21 août 2019
- Plus d'informations : Le site officiel
- Festival : Rentrée littéraire 2019
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Résumé : L’idée de passer tout l’été coupés du monde angoissait Franck mais enchantait Lise, alors Franck avait accepté, un peu à contrecœur et beaucoup par amour, de louer dans le Lot cette maison absente de toutes les cartes et privée de tout réseau. L’annonce parlait d’un gîte perdu au milieu des collines, de calme et de paix. Mais pas du passé sanglant de cet endroit que personne n’habitait plus et qui avait abrité un dompteur allemand et ses fauves pendant la Première Guerre mondiale. Et pas non plus de ce chien sans collier, chien ou loup, qui s’est imposé au couple dès le premier soir et qui semblait chercher un maître. En arrivant cet été-là, Franck croyait encore que la nature, qu’on avait apprivoisée aussi bien qu’un animal de compagnie, n’avait plus rien de sauvage ; il pensait que les guerres du passé, où les hommes s’entretuaient, avaient cédé la place à des guerres plus insidieuses, moins meurtrières. Ça, c’était en arrivant.
Notre avis : Si, dès la découverte de la quatrième de couverture, un climat angoissant semble petit à petit se mettre en place, la lecture du roman ne déçoit pas cette première intuition. En effet, tout dans le roman participe à la création de cette atmosphère inquiétante, oppressante, presque fantastique*, avec comme cadre une maison isolée, au fin fond de la campagne française, qui surplombe le reste du village, sans aucun réseau...
Cette maison peut faire peur. Pourtant, Lise parviendra à convaincre son époux Franck d’aller y passer trois semaines, alors même que ce dernier ne peut pas vivre sans Internet, ni téléphone.
En parallèle, une autre histoire se déroule, celle du village pendant la Première Guerre mondiale, qui voit partir ses hommes et arriver un dompteur, avec ses fauves. Le roman se découpe ainsi en deux parties qui alternent : l’une dans le présent, l’autre dans le passé. Pourtant, si de prime abord la pertinence de ces basculements entre les temporalités peut sembler étrange voire inutile, on comprend très vite que les segments se répondent les uns les autres, au point qu’ils donnent au lecteur le sentiment que l’histoire se répète. De plus, ces retours dans le passé permettent de mieux comprendre tout le caractère fantastique qui entoure le Mont d’Orcières, dont le nom évoque le mot "sorcière", participant à l’ambiance angoissante du roman, permettant aussi une référence aux traditions et aux croyances, très implantées dans la campagne.
D’ailleurs, on trouve de nombreux passages où il est question de superstitions, notamment lorsque les gens du village inventent le proverbe suivant : si tu es réveillé par le cri du lion, tu passeras une mauvaise journée. Pourtant, loin de porter un jugement méprisant sur ces croyances, qui pourraient sembler absurdes pour les plus cartésiens, Serge Joncour parvient à raconter les campagnes françaises avec beaucoup de justesse, que ce soit celles de 1915 ou celles de 2017.
En effet, lorsque Franck quitte la maison à l’occasion de quelques courses à Limoges, le personnage est mal à l’aise, souvent jaugé et jugé par les habitants qu’il croise et qui sont peu enclin à lui parler, même s’il va malgré tout créer quelques liens avec un barman. Il rencontrera également trois chasseurs qui, là encore, se montreront plutôt méfiant à l’encontre de ce nouveau venu.
L’autre point fort du roman, c’est qu’il évite l’écueil du récit moralisateur et manichéen, en opposant les citadins aux personnes qui vivent à la campagne. A aucun moment, l’auteur ne critique frontalement l’existence hyper connectée de Franck. Il raconte simplement la confrontation de deux modes de vie, celui de Lise, qui voudrait renouer avec la nature, se rapproche des habitants du hameau, et celui de Franck qui ne supporte pas de vivre sans wifi. Bien que la critique soit acerbe, elle évite l’écueil d’une moralisation stérile. L’auteur reste dans le factuel et dresse un portrait assez réaliste de notre société.
Bref, avec Chien-Loup, Serge Joncour a écrit un histoire qui laisse le lecteur en haleine, tant le suspens est, par moment, insoutenable. La façon dont le texte parvient à faire monter la tension avec brio le rend vraiment addictif.
* le terme fantastique ici renvoyant à son sens littéraire, à savoir l’irruption du surnaturel dans un récit pourtant réaliste.
Serge Joncour - Chien-Loup
Editions J’ai Lu
544 pages
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