Mille-feuille synthétique
Le 3 juin 2003
Si My Bloody Valentine était un producteur allemand faisant dans l’electronica...
- Artiste : Schnauss, Ulrich
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Après un premier album d’electronica contemplative, le producteur allemand inocule avec bonheur une bonne dose de noisy-pop anglaise à sa musique parfois un peu trop sage.
Il y a deux ans, Ulrich Schnauss, producteur berlinois jusque-là dévolu à la mise en son du travail des autres, sortait de l’anonymat grâce à Far Away Trains Passing By, un premier disque de pure electronica made in Germany, son cristallin et nappes enveloppantes à l’appui. Sorti sur City Centre Offices, label référence en matière de musique électronique à tendance pop, l’album eut droit à un joli succès critique, figurant même parmi les meilleurs albums de l’année sur les listes de bon nombre de journalistes. Mais malgré le talent indéniable de compositeur du bonhomme (il écrit tous ses morceaux au piano avant de les transformer numériquement), on pouvait craindre de voir sa musique noyée au milieu de la déferlante electronica qui inonde les bacs des disquaires depuis maintenant quelques années.
Heureusement Ulrich a plus d’un tour dans son piano, et, à l’instar d’un Manitoba, il décide en s’attaquant à son deuxième album de se remémorer ses coups de cœur adolescents. Fasciné par la noisy-pop britannique du début des années 90, il dévorait alors des oreilles les essais soniques de la vague shoegazing, My Bloody Valentine et Chapterhouse en tête. Et c’est bien l’intrusion tout à fait opportune de ces fulgurances sonores au sein de l’univers poli et lisse de monsieur Schnauss qui donne son charme à A Strangely Isolated Place. Bien sûr, les nappes de synthé sont toujours là, mais n’ont plus droit qu’à la portion congrue du gâteau (Clear Day est une merveille de mille-feuille synthétique et Blumenthal une charmante bluette électro-acoustique). Et c’est réellement lorsque les couches sonores se superposent par-dessus une base mélodique pop que le disque réussit à s’extirper du peloton des suiveurs de l’electronica. En cela, le début de l’album est remarquable : Gone Forever et ses voix éthérées donne une idée de ce qu’aurait pu faire My Bloody Valentine avec la technologie d’aujourd’hui, et le tourbillon mélodique de On My Own fait remonter le temps à Manitoba, le projetant contre une irrésistible vague électro-noisy-pop.
Comme quoi même en matière de musiques électroniques, où l’absurde course à l’innovation sonore tient parfois lieu d’œillères à bon nombre d’artistes, rien de tel que de se replonger dans le passé pour avancer de plus belle.
Ulrich Schnauss - A strangely isolated place (City Centre Offices/La Baleine), sortie le 11 juin
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